Augmentation des salaires à cause de la flambée du prix du pétrole, plus de flexibilité dans l'horaire continu, respect des droits syndicaux et des dispositions du code du travail… la liste des revendications des centrales syndicales est longue. Le Premier ministre, Driss Jettou, a pris l'initiative de rencontrer, en compagnie de plusieurs ministres, notamment ceux de l'Emploi, de la Modernisation des secteurs publics et du Commerce et l'Industrie, en fin de semaine dernière, l'ensemble des centrales syndicales pour débattre de ce qu'il a lui-même appelé : la rentrée sociale. Plusieurs thèmes étaient à l'ordre du jour des rencontres qu'il a eues avec, chacune de son côté, l'UMT, l'UGTM, la FDT, la CDT et l'UNTM. Le Premier ministre a souhaité aborder avec ces centrales la question de l'INDH, l'AMO, la retraite, l'opération des départs volontaires, l'application de l'horaire continu ainsi que les préparatifs des Assises de l'emploi. Selon le secrétaire général de l'UGTM, Abderrazak Afilal, "cette réunion a été importante puisqu'elle nous a permis de passer en revue un certain nombre de problèmes, notamment la question de la création d'emplois et l'encouragement de l'initiative privée". Pour sa part, Abdessalam Maâti, secrétaire général de l'UNTM, a estimé que l'application de l'horaire continu dans la fonction publique nécessite davantage d'efforts. Le syndicat a proposé "un peu plus de flexibilité à l'entrée et à la sortie des fonctionnaires qui commencent à subir les méfaits de ce nouveau régime". Cependant, précise Abdessalam Maâti, "il n'est pas question de revenir sur le principe de l'instauration de l'horaire continu, au contraire, il faut faire preuve de souplesse pour que tout le monde s'y adapte". En fait, il est même question de généraliser cet horaire continu à l'Education nationale. Par ailleurs, pour ce qui est de l'INDH, l'ensemble des centrales ont attiré l'attention du Premier ministre sur l'impact négatif de la flambée du prix du pétrole sur les finances des ménages. En d'autres termes, le gouvernement devrait réfléchir à une augmentation des salaires des travailleurs. Toutefois, estime Miloudi El Moukharek secrétaire national de l'UMT, "nous avons tenu à inscrire à l'ordre du jour deux autres points que notre centrale considère comme primordiaux et prioritaires". Il s'agit "des violations graves et répétées" des libertés syndicales non seulement dans des établissements privés mais également dans le public. "Les cadres et les structures de l'Union marocaine du travail font l'objet des pires actes anti-syndicales", assure le secrétaire national de l'UMT. Et d'ajouter : "Dès qu'un bureau de l'UMT est constitué, ses membres sont automatiquement licenciés et mis à la porte". A cela, Miloudi El Moukharek donne deux exemples. La société de textile "Top Wear", installée à Rabat a dernièrement eu des démêlés avec ses 450 ouvrières "à cause de leur appartenance syndicale". C'est le cas également de ST Microélectonics qui a mis à la porte plusieurs ingénieurs, "de hauts cadres, donc", pour la simple et unique raison qu'ils ont constitué une section syndicale. Le directeur général de ce centre de recherches leur a donné un ultimatum, alors qu'ils n'avaient même pas déposé de cahier revendicatif. Face à tout cela, regrette Miloudi El Moukharek, "le gouvernement adopte une attitude de spectateur". Or, les autorités publiques ont pour obligation de veiller au respect des dispositions légales et constitutionnelles, puisque le droit syndical est garanti par la Loi fondamentale. Hormis cet "harcèlement" que subissent les syndicalistes, l'UMT a également soulevé, lors de sa rencontre avec le Premier ministre, un autre point important : "les déviations graves que connaît l'application du code du travail". Sur cette question, la centrale de Mahjoub Benseddik, pointe clairement du doigt l'administration du travail. Pour Miloudi El Moukharek "le ministère de l'Emploi a la fâcheuse habitude de légiférer par circulaire". Il en veut pour preuve la question de la durée du travail. Alors que le code prévoit une baisse de cette durée de 48 à 44 heures par semaine, dans le cadre d'une vaste négociation entre les partenaires sociaux, sans aucune réduction des salaires, le ministère de l'Emploi a autorisé la diminution des salaires. "C'est une violation flagrante des dispositions du code du travail", lance Miloudi El Moukhrek. Même constat pour le cumul des indemnités de licenciement et de préjudice. "C'est un principe acquis dans le code du travail, mais le ministère de l'Emploi a, là-encore, dérogé à ses dispositions", s'insurge le secrétaire national de l'UMT. Si le département du travail persiste dans ce genre de pratiques, on se dirigera vers une grande agitation sociale, prévient ce dernier. En somme, Driss Jettou a tâté le pouls des syndicalistes. Il a ainsi promis de les revoir très prochainement pour poursuivre l'examen des questions litigieuses.