Une résolution condamne la discrimination à l'égard de l'Islam depuis le 11 septembre, mais ceux qui font l'amalgame entre l'Islam et la violence n'ont pas désarmé. Après plusieurs tentatives, les délégations musulmanes ont réussi à faire voter une résolution contre l'islamophobie. Dans le cadre de sa lutte contre le racisme, la xénophobie et toutes les formes de discrimination, la commission a adopté par 31 voix pour, 16 contre et 5 abstentions, une résolution sur la diffamation des religions. Nouveauté cette année, elle spécifie l'Islam. «la commission charge le rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme à étudier la situation des populations musulmanes et arabes dans diverses régions du monde, la discrimination dont elle font l'objet (…), ainsi que les violences dont leurs lieux de culte, commerces, etc, font l'objet depuis le 11 septembre 2001 ». La résolution est encore plus claire un peu plus loin. «La commission se déclare profondément préoccupée par le fait que l'Islam soit souvent et faussement associé aux violations des droits de l'Homme et au terrorisme». Cette résolution est une victoire de la diplomatie arabo-musulmane. Les deux dernières années, elle n'avait pu aboutir, certains pays se cachant derrière la nécessité «de lutter contre tous les racismes» et, donc, refusant toute référence à l'islam. Au contraire, c'est l'antisémitisme qui était signalé, comme s'il y avait des racismes moins abjects que d'autres. Les arguments, d'ailleurs, n'ont pas disparu. Ainsi, les USA ont voté contre, parce que la résolution ne tient pas compte de toutes les religions. Ils ont été suivis par tous leurs alliés traditionnels, y compris la France, les Pays-Bas et l'Allemagne. Ceci est loin d'être anecdotique. Ces pays, en refusant une résolution contre l'islamophobie, refusent, en fait, de reconnaître le phénomène, lié aux événements du 11 septembre et au terrorisme international. S'ils se déclarent par principe opposés à toute forme de discrimination par la religion, ils préfèrent un discours général sur la non-diffamation des religions. Nous sommes face à une mauvaise foi caractérisée. Les représentants de ces pays n'ont pas hésité à mettre en exergue la montée de l'antisémitisme dans leur propre pays pour faire barrage au projet de résolution. Derrière, il y a une véritable cabale contre la religion musulmane. Celle-ci est considérée comme contraire aux droits de l'Homme. La lapidation, la barbarie des Houdoud sont utilisées par ceux qui veulent mettre au ban des nations un milliard de personnes. La riposte de ce courant ne s'est pas fait attendre. Quelques jours après l'adoption de cette résolution, trois associations organisaient une conférence dont l'intitulé est déjà problématique : «Les victimes du Jihad». Les associations sont l'union internationale humaniste et laïque, l'Association pour l'éducation mondiale, l'Association des citoyens du monde. Elles ont toutes les trois un parcours fort honorable, sauf sur l'Islam. Cette conférence aurait dû être elle-même condamnée par la Commission des droits de l'Homme. Pendant une journée, l'Islam était au banc des accusés. Les thèmes étaient : «Jihad et Musulmans», «Dhimmis et dhimmitude» «Infidèles et apostats», «Femmes et fillettes». David G. Littman, activiste pro-israélien, a donné le la. Caroline Forrest, auteur d'un livre sur Tareq Ramadan, Bat Ye'or, «spécialiste» de la «dhimmitude», n'ont montré aucune gêne à le suivre. Pour «meubler», un certain Simon Dieng, présenté comme un ancien esclave soudanais et la fameuse Tashima Nassir, mauvais écrivain et bonne propagandiste. Le propos était clair : le texte sacré, le Coran, est incompatible avec les droits de l'Homme, sans nuance aucune. Ainsi, le fait que certains pays soient multiethniques, que Chrétiens et Juifs y soient des citoyens, même rappelé, est inaudible. De véritables âneries ont été proférées sur l'esclavage en terre d'Islam. Comme si le judaïsme ou la chrétienté interdisaient l'esclavage dans leur «version originale». Au nom d'un académisme plus que douteux, l'Islam de l'Andalousie était rayé de l'Histoire, l'historicité du texte balayée et l'image d'une religion obscurcie. Malheureusement, cette tendance n'a personne en face. Les intellectuels arabo-musulmans sont aux abonnés absents. Toute personne, quelles que soient ses convictions religieuses, ne pouvait qu'être ulcérée par cette propagande nauséabonde. Il est fondamental que les démocrates de cette sphère doivent résolument et activement agir contre cette dérive. Cette manière d'ostraciser l'Islam ne peut aboutir qu'à un blocage régressif des sociétés concernées. Malheureusement, lors des travaux de cette commission, l'insistance de certains délégués sur la «spécificité», en particulier celui de l'Arabie Saoudite, met de l'eau dans le moulin de cette tendance. La voie vers l'universalité n'est pas un fleuve tranquille. • DNES à Genève Jamal Berraoui