De nouvelles violences sont venues confirmer les difficultés rencontrées par les troupes américaines en Irak. Incapables de rétablir la sécurité, elles sont elles-mêmes régulièrement prises à partie. L'incident s'est déroulé hier à Bagdad même où un militaire américain a ouvert le feu sur des manifestants irakiens. Deux hommes, qui lançaient des pierres devant le quartier général américain– un ancien palais de Saddam Hussein - ont été tués. C'est à cet endroit qu'environ 300 soldats irakiens s'étaient rassemblés pour protester contre leur limogeage émanant de la dissolution de l'armée. Cette initiative, prise le 23 mai par l'administrateur Paul Bremer, a laissé sans emploi quelque 400.000 Irakiens, militaires, membres des services de sécurité et des ministères de la Défense et de l'Information. Visiblement très irrités, les manifestants s'en sont pris mercredi à des véhicules de l'ONU et des médias étrangers avant de viser le QG américain. Des protestations similaires avaient déjà eu lieu il y a une semaine à Mossoul, au nord, lorsque des centaines d'anciens soldats avaient réclamé leur salaire. Signe que les tensions sont très vives dans le pays entre une population toujours démunie et leurs occupants, ces violences entre civils et militaires s'ajoutent à la récente vague de violences impliquant des Irakiens armés. Ceux-ci ont causé la mort d'au moins 50 soldats de la coalition depuis le 1er mai et la fin officielle des combats. Le dernier d'entre eux a été la cible lundi soir d'un tireur isolé à Bagdad. Au cours de cette même nuit, une voiture piégée a explosé au niveau d'un barrage routier à la sortie nord de la capitale, que venaient juste d'évacuer les Américains. Deux femmes y ont été tuées et deux soldats blessés. La veille, au moins sept soldats américains avaient été blessés dans deux attaques contre leurs convois dans la même zone. Ces violences ont poussé l'armée à mener des opérations musclées à Bagdad même, bloquant les rues et fouillant les habitations de plusieurs quartiers. Dans le reste du pays, la coalition a aussi lancé deux offensives majeures, d'abord «Péninsule» qui a fait la semaine dernière 113 tués, puis «Scorpion du désert». Comme la précédente, cette opération lancée dimanche vise les partisans de l'ancien régime baassiste. Les régions quadrillées sont celles de Kirkouk, au nord, de Tikrit, l'ancien fief de Saddam Hussein plus au sud, et Falloujah. Le Centcom a déjà annoncé plus de 400 arrestations des loyalistes du parti Baas qui seront bientôt jugés par le Tribunal pénal central créé par les Américains, et des saisies d'armes. Mais les attaques et même les actes de sabotage n'ont pas pour autant cessé. Un groupe jusque-là inconnu, les Brigades de résistance irakiennes, a d'ailleurs revendiqué mardi «toutes les opérations de combat» menées contre les troupes américaines en Irak, sans lien avec l'ancien régime. Dans son communiqué obtenu par Al-Jazeera, il a même qualifié Saddam Hussein et ses partisans d'« ennemis qui ont contribué à la perte de la patrie et à aggraver ses blessures». Qui sont ces Brigades ? Mercredi, aucune information n'était venue compléter leur revendication. Une chose est sûre, les Américains se méfient aujourd'hui de plus en plus des Sunnites du nord alors qu'ils avaient d'abord craint la communauté chiite, majoritaire dans le sud.