Latente depuis le week-end dernier, la progression de la protestation vers les grandes villes iraniennes était manifeste la nuit dernière. Poussé à plus de réformes, le pouvoir reste ferme… tout comme sur le dossier nucléaire. Depuis sept nuits, les rassemblements et manifestations se poursuivent en Iran dans les milieux étudiants mais aussi au sein d'une population qui souhaite plus de réformes. Promises par le président Khatami depuis son arrivée au pouvoir en 1997, celles-ci - axées sur la justice et les libertés individuelles - restent bloquées par l'opposition conservatrice du pays. Egalement opposé à l'emprise qu'exercent de nombreux mollahs non élus dans le pays, le vent de protestation reste tenace malgré les actes d'intimidation et d'agression des miliciens islamistes. Dans la nuit de lundi à mardi, les rassemblements ont même gagné de nouvelles villes de province alors qu'ils étaient jusque-là concentrés sur Téhéran. Selon l'agence officielle Irna, ils ont été constatés à Machhad, au nord-est, Ispahan, au centre, Karaj, à l'ouest, Kerman, au sud-est, Kermanchahr, à l'ouest, et Tabriz, au nord-ouest. Toujours d'après Irna, dix membres des forces de l'ordre ont été blessés dans des heurts à Hamédan, au nord-ouest, où 12 personnes ont été arrêtées. A Ispahan, 150 personnes, des «voyous» selon les autorités, ont également été interpellées ces derniers jours, selon le quotidien Jomhouri Eslami. Dans presque toutes ces villes, les rassemblements se sont déroulés dans les universités, où les étudiants ont dénoncé les agressions perpétrées par les miliciens, notamment les Bassidji. A Téhéran même, les manifestants étaient par contre moins nombreux que les nuits précédentes, au cours desquelles 250 personnes ont été arrêtées. Plusieurs centaines de voitures ont toutefois bloqué le quartier de l'Université pour montrer leur soutien envers les étudiants. La police s'est comme d'habitude interposée entre eux et les islamistes en civil, armés de chaînes et de bâtons et circulant à moto. Les autorités, qui devaient se pencher mardi sur ces événements lors d'une séance au Parlement, continuent pour leur part d'accuser les Etats-Unis de les encourager afin de déstabiliser la République islamique. Le régime est aussi éprouvé par un bras de fer qui dure depuis des mois avec Washington sur son programme nucléaire. Ce dossier a été remis à l'ordre lundi lors de la remise d'un rapport par l'Agence internationale pour l'énergie atomique. Depuis Vienne, son directeur, Mohamed El-Baradeï, a en effet appelé Téhéran à coopérer afin de fournir des «assurances crédibles sur la nature pacifique de (ses) activités nucléaires». Il a aussi dit souhaiter que l'Iran laisse l'AIEA «prélever des échantillons environnementaux à l'endroit où il y aurait des activités d'enrichissement » d'uranium. Et de souligner que c'est «dans l'intérêt à la fois de l'agence et de l'Iran», l'une et l'autre étant soumis à de larges pressions de la part de l'administration américaine. Celle-ci continue de clamer que l'Iran, un des maillons de «l'axe du mal» du président Bush, cherche à se doter de l'arme atomique en violation du Traité de non prolifération qu'il a signé. L'Union européenne a de son côté réclamé des garanties de l'Iran sur la vocation civile de son programme.