Dès que cette jeune femme de trente-deux ans se tient à la barre, elle rejette énergiquement l'accusation d'escroquerie que lui attribue le procureur du Roi près le tribunal de première instance de Casablanca. Mieux encore, dévisageant les victimes, présentes à l'audience, elle assure qu'elle ne connaît aucune de ces personnes et qu'elle n'a jamais vu ces visages. Toutefois, chacune de ses proies qui sont tombées dans ses filets se souvient d'elle. Car, chacune s'est attablée avec elle dans un café une ou deux fois avant qu'elle ne lui donne plus signe de vie. C'est le cas de Rahma qui rêvait de migrer en Espagne avant de voir s'évaporer les cinquante mille dirhams qu'elle a donnés à cette femme. Elle affirme au juge qu'elle lui a promis de l'aider à passer la Méditerranée sans problème pour avoir rapidement ses papiers à l'autre rive. Mais en vain, a-t-elle ajouté, puisqu'elle a perdu, outre son rêve, la somme d'argent dont elle a emprunté une partie. Abdellah, quant à lui, partageait le rêve de son fils, à savoir rejoindre la majorité de ses voisins en Europe. Bachelier chômeur, son fils n'avait qu'un seul but : aller à l'eldorado. Les victimes se succédaient à la barre. Elles affirment avoir donné à la femme des sommes d'argent allant de vingt à cinquante mille dirhams en échange d'une promesse qui n'a jamais été tenue. Et pourtant, la mise en cause continue de se disculper. Mais les témoignages accablants des victimes et son passé de repris de justice puisque elle a déjà purgé une peine de six mois de prison ferme pour le même motif jouaient en sa défaveur. Effectivement, jugée coupable, elle a été condamnée à deux ans de prison ferme assortie d'une amende de 5 mille dirhams et des dommages et intérêts qu'elle doit verser à ses victimes.