En perspective des prochaines élections communales, l'Istiqlal et l'Usfp veulent renforcer leur coordination. L'objectif est d'élargir la Koutla pour qu'elle ratisse large et qu'elle puisse faire face à la mobilisation des mouvements islamistes. La tendance générale dans le camp de la gauche est de ne pas réitérer les erreurs de la campagne des législatives. Vers une union forcée. Depuis quelque temps, des informations de plus en plus persistantes font état de la remise en état de la machine de la Koutla. Les deux ogres de ce pôle, en l'occurrence L'USFP et le parti de l'Istiqlal, s'attellent à lui redonner vie. Les leaders de ces deux partis auraient enterré la hache de guerre qui les a opposés depuis l'avènement du gouvernement d'alternance jusqu'aux élections législatives où elle a atteint son paroxysme. Les deux partis ont alors versé dans des alliances incroyables pour s'accaparer le fauteuil de la primature, avant que la désignation de Driss Jettou ne vienne les clouer au pilori. Depuis, les deux frères ennemis se sont assagis pour accepter le fait accompli et rentrer dans les rangs. L'erreur de la désunion était fatale pour les deux prétendants, alors autant reconstituer le puzzle de la Koutla qui a fait leur force pour arriver au gouvernement. Selon certaines sources, les deux leader, Abderrahmane Youssoufi et Abbas El Fassi, auraient entrepris des concertations informelles sur la nécessaire redynamisation de la Koutla. Il était temps d'autant plus qu'il est question de son élargissement à d'autres partis comme le PSD qui s'est rapproché du PPS lors des dernières élections. Ce retour à la source est dicté par la conjoncture politique qui prévaut dans notre pays depuis les dernières législatives. La montée en force des islamistes avec le PJD et leur domination territoriale de l'espace politique et social, voire culturel, n'est pas étrangère à ces retrouvailles. Le spectre de l'avancée islamiste est si présent que les élections communales pointent à l'horizon avec les risques d'une marée islamiste. Apparemment, les responsables de la Koutla tentent de réoccuper leur terrain de prédilection, sachant qu'ils en ont perdu beaucoup en avançant en ordre dispersé. L'alternance en a pris un coup terrible et la transition est mise dans les oubliettes, malgré la participation des composantes de la Koutla au gouvernement. D'autant plus que l'effet Jettou s'est rapidement estompé, quoique l'homme n'ait rien perdu de son sérieux et de son intégrité. Mais il faut plus, en ces temps de crise, pour réinstaller la confiance et surtout dissiper ce climat malsain qui a accaparé toutes les composantes de la société. En plus de la crise économique et d'une conjoncture internationale minée par le spectre du terrorisme et d'une guerre imminente contre l'Irak, la scène politique nationale reste terriblement vide. On assiste à une démission collective des partis démocratique, qui permet aux islamistes de mener les débats à leur guise. À tel point qu'ils ont commencé à s'attaquer à tout ce qui est moderniste à travers les médias et des sit-in jusqu'à essayer d'interdire des films et des manifestations artistiques. Il ne manque plus que les fatwas. Ce qui gène aux entournures, c'est que dans les camps des démocrates, qu'ils soient de gauche ou de droite, brille par une inanité déconcertante. Aussi l'éventuelle réactivation de la Koutla est perçue par la société civile et les militants politiques de base comme une action primordiale et nécessaire. L'ex-leader du l'Istiqlal, M'hammed Boucetta, qui est un membre fondateur de la Koutla, se félicite naturellement de cette idée de remettre sur les rails ce pôle démocrate. Il précise même que les fondements de l'accord de 1992 ont été détournés vers des préoccupations outre que celles qui lui ont été définies :" La création de la Koutla n'avait aucunement pour objectif essentiel la participation aux élections ou au gouvernement. Ses principes sont beaucoup plus importants que le choix participatif pour aborder tous les problèmes fondamentaux que connaît notre société. Cette union se voulait fédératrice pour avoir la capacité et les potentialités nécessaires pour prendre les décisions adéquates relatives aux questions économiques, politiques et sociales. C'est, en résumé, plus un projet de société qu'une alliance politique qui a poussé à la création de la Koutla que j'estime aujourd'hui plus nécessaire que jamais.» Parole d'un homme politique d'envergure qui a roulé sa bosse sur cet échiquier bien avant l'indépendance. Pourvu qu'il soit entendu par ses pair en ces moments où le mot crise affecte tous les secteurs et où l'extrémisme est en train de gagner du terrain. Le socialiste rebelle, Mohamed Sassi, est du même avis que M'hammed Boucetta et développe la nécessité de l'émergence d'un pôle démocratique avec sa pertinence habituelle. Il affirme, sans ambage que c'est l'absence d'une Koutla active qui a mis fin à la continuité de la transition politique entamée par le gouvernement d'alternance. Il estime que l'avancement en rôle dispersé des partis politiques les a rendu très fragiles jusqu'à adopter un profil bas : «Si les composantes de la Koutla ont parlé d'une seule voie, la situation politique ne serait pas arrivée à l'impasse qu'elle connaît aujourd'hui. L'intérêt de la nation, dans une conjoncture difficile, nécessitait pourtant le dépassement de toutes les susceptibilités et autres visées personnelles ou collectives. La fragilité des partis de la Koutla et l'impossibilité de la constitution d'une union de la gauche, affectent énormément le projet moderniste de notre société. Cette situation a été subtilement exploitée par les Islamistes qui ont commencé à occuper le terrain avec une incroyable audace qui n'augure rien de bon, face à la démission des partis démocratiques. Devant les multiples défis qui guettent la nation, ces partis sont aujourd'hui au pied du mur. Pour des raisons incompréhensibles, ils se sont retirés de la scène pour laisser les services de sécurité seuls face à la montée des islamistes. Une situation intenable dont les conséquences risquent d'affecter les libertés et le processus démocratique et, par ricochet, l'existence des partis de la Koutla. Pourtant, ces derniers ont les moyens de réoccuper le terrain pourvu qu'ils passent à l'action et encadrent efficacement toutes les couches de la société face au danger islamiste. À preuve, nous n'avons pas de femmes artistes qui ont porté le voile et l'ont déserté. De même que les sportifs de haut niveau et les intellectuels n'ont pas suivi cette mouvance pour que les démocrates abdiquent de cette manière. Ces derniers doivent sortir de leur coquille et cesser de se couvrir derrière le Roi à chaque fois qu'un dossier s'avère délicat comme celui du statut de la famille.» Autrement la Koutla doit être réactivée, mais ces partis doivent, eux aussi, afficher une solidarité active pour défendre les intérêts de la nation sous l'égide de S.M. le Roi Mohammed VI.