Déficit, retraites publiques, investissements… Le constat effectué par le premier président de la Cour des comptes est pour le moins alarmant. Invité au Parlement pour la présentation du rapport annuel 2016-2017, Driss Jettou a tiré la sonnette d'alarme, notamment en ce qui concerne le système des retraites civiles. Au cours de 2017, les indicateurs de ce dernier ont continué à se dégrader sachant que le nombre des actifs est passé à 2,12 pour chaque retraité contre 2,24 en 2016, révèle un rapport de la Cour des comptes. Plus loin encore, Jettou a expliqué qu'au moment où le nombre des retraités est passé à 358.000 en 2017 contre 337.000 en 2016, les contributions recouvrées en 2017 ont atteint 18,6 milliards DH (MMDH) pour un total de retraites payées de 24,2 MMDH. Comme résultat direct de cette situation, le régime civil a enregistré un déficit technique de 5,6 milliards de dirhams l'an dernier, contre un déficit de 4,76 milliards en 2016. C'est dans ce sens que le premier président a attiré l'attention devant le Parlement avec ses deux Chambres sur les «risques élevés que présentent les indicateurs du déficit de la Caisse marocaine des retraites (CMR) sur l'équilibre des finances publiques, en dépit de l'importance de la réforme entreprise par le gouvernement, entrée en vigueur à partir d'octobre 2016». Le patron de la Cour des comptes a, en outre, considéré que toutes les prévisions actuarielles indiquent que l'accroissement des engagements du système vis-à-vis des retraités, y compris ceux qui en bénéficieront ultérieurement, «restera plus élevé que celui de ses ressources, en raison d'une multitude de facteurs». Il a notamment cité le rythme de promotion dans la fonction publique qui débouche sur le reclassement quasi-automatique d'une partie des fonctionnaires en cadres. «De ce fait, la part des cadres parmi les nouveaux retraités est passée de 79,5%, en 2016, à 88,6% en 2017, ce qui se traduit par une forte augmentation du niveau des retraites», a-t-il expliqué. M. Jettou a dans ce contexte relevé que la moyenne des retraites pour l'ensemble des affiliés au système a atteint, en 2017, un montant de 7.162 DH, au moment où elle a atteint, pour les fonctionnaires admis à la retraite pour la seule année 2017, un montant de 10.126 DH, soit une différence de plus de 41 %. S'agissant du déficit du Trésor, il a atteint 692 milliards DH (MMDH) à fin 2017. En effet, la dette du Trésor a connu une évolution ascendante, passant à 692 milliards DH à fin 2017, soit 65,1% du PIB et un endettement supplémentaire d'environ 35 MMDH, précise ce document. M. Jettou a recommandé à l'Exécutif de veiller à l'élargissement de l'assiette fiscale et à la maîtrise des dépenses. Il a également plaidé pour l'aménagement d'un environnement économique à même d'accélérer le rythme de la croissance pour alléger l'endettement et garantir la capacité à faire face aux charges de la dette sur le moyen et le long termes. M. Jettou a d'autre part évoqué l'endettement des entreprises et établissements publics, constitué de la dette intérieure et extérieure, précisant qu'il a continué à augmenter pour s'établir à 277,7 MMDH en 2017, contre 261,2 MMDH l'année précédente, soit une hausse de 6,3 %. La composante extérieure de cette dette représente une part importante du total puisqu'elle a atteint, en 2017, un montant de 178,3 milliards DH, représentant ainsi 53,9 % de la dette publique extérieure. D'après le rapport, le volume global de l'endettement du secteur public est passé de 918,2 milliards DH en 2016 à 970 milliards DH à fin 2017, soit une augmentation de 51,8 milliards DH en une seule année. Par ailleurs, la Cour des comptes a demandé au gouvernement de procéder à une refonte de l'investissement public pour revoir les priorités nationales en la matière, révèle un rapport de cette institution. Cette recommandation, a-t-il dit, s'inscrit dans la lignée des Hautes orientations royales visant l'adoption d'un nouveau modèle de développement «apte à réduire les disparités sociales et les inégalités existantes et à instaurer la justice sociale», en veillant à le doter de mécanismes efficaces pour sa mise en œuvre sur les plans local et régional. Il a à cet égard rappelé que SM le Roi Mohammed VI a fixé un délai de trois mois pour la présentation des contributions et études y afférentes et a décidé de confier à une commission ad hoc la responsabilité de les collecter.