Entretien avec Mehdi Lougraïda, chef d'orchestre franco-marocain ALM : Qu'est-ce que cela vous fait de diriger l'OPM en concerts d'ouverture ? Mehdi Lougraïda : Je suis très fier de diriger l'orchestre. Cela fait longtemps que je voulais venir. Quand je me suis vu proposer les concerts, j'ai répondu par l'affirmative dans l'immédiat. Je connais bien l'OPM puisque j'ai déjà joué avec cet orchestre il y a trois ans. A leur tour, les solistes qui vont rejoindre l'OPM sont merveilleux et fabuleux. Aussi, le Maroc c'est mon pays. Je le connais très bien. Chaque année, j'y passais les deux mois de juillet et août. Mes parents m'emmenaient y passer l'été depuis ma naissance jusqu'à environ mes vingt ans. Je comprends l'arabe dialectal. Quand j'ai appris que j'allais diriger l'orchestre, j'étais très heureux. Vous avez dirigé de nombreux orchestres à l'étranger. Quelle est la différence entre ceux-ci et un autre marocain ? A vrai dire, il n'y a pas de différence. Les musiciens sont d'un très bon niveau. Nous arrivons à jouer le programme musical des concerts. La partition reste la même. Le travail aussi. Il est vrai qu'il y a un côté sentimental au Maroc qui est dix fois plus que diriger un autre orchestre. C'est sûr ! Les musiciens marocains savent très bien jouer. Quand je demande quelque chose, la réponse est immédiate. Je sais comment va réagir un musicien marocain et comment il va s'y prendre. C'est toute une sensibilité que seul un Marocain peut connaître (rires). Dans l'ensemble, l'OPM est très bon. Nous pouvons faire de belles choses. Déjà, nous avons commencé mardi dernier les répétitions qui se sont étalées sur toute la semaine. C'est excitant ! Les chefs d'orchestre sont rarissimes au Maroc. Pourquoi ? Déjà, il n'y a pas d'écoles de direction d'orchestre au Maroc tout simplement. Pour ma part, j'ai beaucoup discuté avec Samir Tanin, directeur du Conservatoire de musique à Rabat. Nous allons lancer l'année prochaine, éventuellement, une master class avec des stages de direction d'orchestre pour les jeunes musiciens, professeurs et tous ceux qui veulent s'initier à la direction d'orchestre ou s'y perfectionner. J'ai également proposé de constituer un orchestre de musiciens, d'étudiants ou de professionnels, pour qu'il dirige, selon un programme préconçu et après un travail laborieux, un concert final pour les étudiants en direction d'orchestre. Quant à moi, j'interviendrai simplement pour les guider dans l'apprentissage de ce métier. J'adore la pédagogie ! Des reproches sont parfois faits aux conservatoires marocains quant à la qualité de la formation qui y est dispensée. Qu'en pensez-vous ? Je ne connais pas du tout ! Je pense que la formation est de bonne qualité. Pour ma part, je vois beaucoup de Marocains qui ont fait carrière à l'international et qui reviennent au Maroc pour dispenser des cours et des master class. Je pense qu'il faut faire confiance aux professeurs marocains. Parlons un peu de votre parcours. Est-ce que vous vous voyiez déjà chef d'orchestre depuis le début de votre carrière ? Pas en tant que chef d'orchestre mais musicien puisque j'ai commencé une carrière de flûtiste. En parallèle, j'avais fait des études de direction d'orchestre. Celle-ci devenait plus importante que la flûte qui demande beaucoup de travail. Entre-temps, j'ai réussi des concours de direction d'orchestre. Après quoi, on m'a proposé plein d'orchestres. Depuis un an, je suis chef assistant à l'Ensemble Intercontemporain à la philharmonie de Paris. C'est vraiment ce que je veux faire. Quels sont vos autres projets avec l'OPM ? J'espère être encore invité et que mon travail plaise aux musiciens et à l'équipe administrative de l'orchestre. C'est une fierté de venir au Maroc faire mon art et y jouer. Un dernier mot ? Il y a les constructions des grands théâtres de Rabat et Casablanca qui vont bientôt être achevées. Je trouve cela génial et merveilleux. J'espère avoir l'occasion de venir y diriger. Ce serait réaliser un beau rêve !