Homme de droit brillant, avocat confirmé, Mohamed Bouzoubaâ, ministre USFP de la Justice, s'explique sur les enjeux de la Cour spéciale de justice. Aujourd'hui Le Maroc : Dans quelles circonstances, certains détenus dans le cadre des affaires du CIH et de la Banque populaire ont-ils bénéficié de la liberté provisoire ? Mohamed Bouzoubaâ : Dans le cadre de l'enquête complémentaire menée depuis quelques semaines par le juge d'instruction de la Cour spéciale de justice concernant ces deux dossiers, celui-ci est en train de faire un travail de fond. Objectif: apprécier les chefs d'accusation retenus contre les différents prévenus. Ceux contre lesquels ne pèsent pas des charges à caractère pénal et qui ont produit les garanties nécessaires ont bénéficié de la liberté provisoire. Le juge d'instruction est souverain. Mais à mon sens, il n'y a pas de raison qu'ils continuent à être maintenus sous mandat de dépôt… Et les autres ? C'est au juge d'instruction d'apprécier les délits et leur degré de gravité. Le processus continue. Ce qui est sûr c'est que la détention préventive, qui revêt un caractère exceptionnel, s'applique normalement aux prisonniers incapables de produire des garanties solides. Ne pensez-vous pas que les procédures de jugement de la Cour spéciale de justice sont un peu longues ? En principe, cette juridiction est tenue à statuer sur les dossiers qui lui sont soumis dans un délai qui ne doit pas dépasser six semaines. Ce qui n'est pas souvent le cas… Il y a des dossiers qui traînent depuis deux ans, sinon plus… Nous sommes en train de promouvoir une nouvelle philosophie judiciaire pour passer de la culture de l'accusation qui a dominé jusqu'ici à une culture qui permet aux justiciables de défendre leur dignité tout en préservant l'intérêt général. C'est cet équilibre qu'il s'agit d'installer. Faut-il, à votre avis, dissoudre la Cour spéciale de justice comme le réclame sans cesse nombre de juristes ? Il est vrai que la Cour spéciale de justice est actuellement l'objet d'un débat qui est sur la place publique. Faut-il dissoudre ce tribunal ou le garder? Nous sommes en train d'étudier la question pour arriver à une solution satisfaisante, qui respecte les droits des justiciables. Une chose est sûre : la révision constitutionnelle de 1996 a fait que cette juridiction a été dépassée dans sa forme actuelle. Et puis, la Constitution marocaine stipule que les gens sont égaux devant la loi.