La mobilisation contre la spoliation foncière se généralise Les notaires veulent que les pouvoirs publics leur donnent les moyens de lutter contre la spoliation foncière. Le conseil national de l'Ordre des notaires du Maroc milite actuellement pour que lui soit accordé le droit de consulter les données contenues dans les cartes d'identité électroniques. L'on se doute bien que cet accès est strictement encadré et d'ailleurs le code pénal dans son article 607-3 punit d'un à trois mois d'emprisonnement et de 2.000 à 10.000 DH d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement le fait d'accéder, frauduleusement, dans tout ou partie d'un système de traitement automatisé de données (catégorie dans laquelle se classe le dispositif permettant de gérer les cartes d'identité électroniques). Mais la loi 35-06 instituant ces cartes prévoit bien une ouverture, et c'est de celle-ci dont souhaiteraient justement profiter les notaires. Dans son article 5 ce cadre habilite en effet à accéder aux données les organismes désignés par voie réglementaire (en plus évidemment des personnels concernés de la sûreté nationale, les fonctionnaires et agents des administrations publiques). L'idée en clair est donc «d'adopter un décret qui permettrait aux notaires d'accéder aux informations encodées dans les cartes électroniques, pour s'assurer de l'identité des personnes», explicite-t-on auprès du conseil national de l'Ordre des notaires du Maroc. La requête des professionnels exclut les données cryptées qui ne doivent rester accessibles qu'aux agents de la sûreté nationale, convient-on. Les praticiens assurent que ce n'est qu'en ayant accès à ce type d'informations qu'ils seront véritablement en mesure de se prémunir contre les utilisateurs de fausses cartes d'identité. Cette manœuvre constitue l'un des schémas d'arnaque les plus utilisés dans le cadre de la spoliation immobilière. En effet, les auteurs de ce type de méfaits usurpent l'identité des propriétaires de biens qu'ils souhaitent détourner en falsifiant leur carte d'identité ce qui leur permet de pouvoir vendre leurs biens, selon les pratiques rapportées par les victimes de spoliation immobilière. Un centre d'archivage numérique des actes notariés dans quelques mois Les notaires n'ayant pas de moyens de contrôler l'authenticité des documents qui leur sont présentés, et dans l'hypothèse où leur bonne foi est avérée, sont ainsi poussés à l'erreur. C'est ainsi que plusieurs contrats de vente comportant de fausses identités ont tout de même été inscrits auprès de la conservation foncière, détournant ainsi les biens de leurs vrais propriétaires, selon les cas recensés par les associations de victimes de spoliation immobilière. Ces manœuvres frauduleuses devraient en théorie être plus difficiles à accomplir si les notaires avaient au préalable la possibilité de consulter les informations encodées dans les cartes d'identité électroniques (prénom et nom, date et lieu de naissance...) qui sont à la base difficilement falsifiables. Pour compléter leur arsenal anti-spoliation, les professionnels planchent aussi actuellement sur un centre d'archivage numérique des actes notariés. Devant être opérationnel d'ici 6 mois ainsi que s'y est engagé l'Ordre national vis-à-vis du ministère de la justice, celui-ci rassemblera désormais sous forme dématérialisée tous les actes dressés par la profession. Et l'idée à terme est même d'y stocker, toujours au format numérique, toute la production documentaire historique des notaires. Là encore, cela facilitera aux professionnels leur travail de vérification avant de dresser des actes, explique-t-on auprès de l'Ordre. Les praticiens avancent en effet que ce nouvel outil leur permettra notamment de retracer tout l'historique d'opérations accomplies sur un bien afin de débusquer toute tentative de falsification. Les efforts des praticiens interviennent dans le sillage de la mobilisation générale contre la spoliation foncière décrétée il y a quelques semaines par le ministère de la justice suite à une lettre du Souverain appelant à redoubler d'efforts pour combattre ce fléau (voir encadré).