Devant le refus de son époux de lui donner de l'argent pour préparer le déjeuner et acheter du lait à leur unique enfant, Touria, 20 ans, a tué Mohamed, de quatre ans son aîné, à coups de couteau. Vendredi 10 décembre 2004. Il était un peu plus de 13h00. Le policier de permanence à la salle de trafic de la préfecture de police de Casablanca a reçu un appel téléphonique. “Un crime a été perpétré à la rue d'Azemmour, dans l'ancienne médina“, affirme l'interlocuteur. Le policier a alerté le chef de la brigade urbaine de la police judiciaire, lequel a donné ses instructions aux éléments de la section judiciaire qui assuraient la permanence de se dépêcher sur les lieux. En moins de six minutes, les limiers sont arrivés à la rue en question. Les badauds sont déjà attroupés devant la maison du drame. Que se passe-t-il ? Les policiers ont été informés qu'une jeune femme, Touria, âgée de vingt ans, a tué son époux et a refusé de sortir après avoir fermé la porte à l'aide d'un cadenas. Elle craignait d'être maltraitée ou tuée par sa belle-famille, dont les membres se tenaient devant la porte. Les éléments de la police judiciaire ont frappé à la porte. “Police !, ouvre la porte, ! ne crains rien, nous te protégerons “, la rassure le chef de la section judiciaire. Quelques secondes plus tard, elle a ouvert et s'est présentée aux policiers, les larmes aux yeux, son bébé entre les bras. Les policiers l'ont calmée et lui ont demandé de rentrer dans la chambre pour effectuer le constat des lieux. “Tu l'as frappé avec un couteau ?“, lui a demandé le chef de la section judiciaire. Elle a hoché la tête et lui a indiqué l'arme du crime. Le policier l'a saisie avant de conduire Touria au fourgon. Et avant de partir, les enquêteurs ont recueilli les témoignages de quelques voisins, dont le propriétaire de la maison. Ce dernier leur a expliqué que Touria et son époux se disputaient souvent pour n'importe quel prétexte. Il ne se passait pas deux jours au plus sans que tous leurs voisins n'assistent à l'une de leurs rixes. Seulement, ces derniers ne pensaient jamais que ce couple passerait à l'irréparable. Ils savaient tous que la relation entre les deux jeunes gens remonte à quatre ans, quand la jeune fille avait seize ans. À ce moment, Mohamed était âgé de vingt ans. Il était en chômage. Une raison pour laquelle, leurs parents ont refusé le mariage. Au fil du temps, Touria est tombée enceinte. Et les deux familles se sont retrouvées devant le fait accompli. Célébrant la nuit de noces, les deux amoureux se sont unis sous le toit d'une même chambre. Quelques mois plus tard, un enfant est venu égayer leur foyer. Mohamed cherchait toujours du travail. Mais en vain. Cependant, il n'est pas resté les mains croisées. Il se débrouillait pour gagner sa vie en se rendant notamment au port pour acheter du poisson et le revendre. L'enfant grandissait, les besoins s'accroissaient et la vie devenait de plus en plus dure. En conséquence, les scènes de ménage se multiplient entre Touria et son époux. Vendredi 10 décembre. Vers midi, Touria a demandé à son mari quelques dirhams pour préparer le déjeuner et pour acheter du lait à son enfant. “je n'ai rien dans les poches“, lui a-t-il répondu. Disait-il la vérité? Peu importe pour elle. Ce qu'il lui importait était que son enfant ait son lait. En entendant les reproches de son épouse qui l'accusait d'affamer son bébé, il l'a insultée. A son tour, Touria l'a injurié. Hors de lui, Mohamed a fini par la violenter. D'un coup à l'autre, elle s'est saisie d'un couteau et lui a asséné un premier coup à la poitrine et un deuxième au dos. En criant au secours, Mohamed s'est réfugié chez son voisin, le propriétaire de la maison. Celui-ci l'a conduit jusque chez sa mère qui demeure tout près de chez lui. Mohamed a été transporté ensuite vers les urgences de l'hôpital Moulay Youssef. Les responsables de cet établissement sanitaire l'ont conduit vers les urgences de l'hôpital Ibn Rochd. C'est là qu'il a rendu l'âme (Cf. notre édition n° 791, du lundi 13 décembre 2004). Arrêtée, Touria est traduite devant le juge d'instruction près la Cour d'appel de Casablanca poursuivie pour homicide volontaire.