Tchétchénie. Après avoir fait pression sur le Danemark pour qu'il annule la tenue du Congrès actuel sur la Tchétchénie, le président russe a fait savoir qu'il allait intensifier la guerre contre les «terroristes». A n'importe quel prix. La Russie prendra des «mesures adéquates» contre les terroristes «où qu'ils se trouvent», a déclaré lundi le chef d'Etat russe, confirmant ainsi un durcissement de sa politique vis-à-vis de la petite république indépendantiste tchétchène. Avant même que ses troupes spéciales Alfa ne mettent un terme, samedi dernier, à la prise d'otages dans le théâtre de Moscou par le commando séparatiste – qui réclamait la fin de la guerre - l'issue de cette crise ne laissait d'ailleurs que deux options : ou bien le Kremlin allait se décider à négocier avec Grozny, ou bien il allait radicaliser ses opérations dans le Caucase. Et, comme le laissait entendre l'assaut de samedi, le président russe a choisi la manière forte, conforté par le nouveau contexte international né des attentats du 11 septembre 2001 et la campagne anti-terrorisme qui les a suivis. «Le terrorisme international devient de plus en plus audacieux, plus cruel, ici et là dans le monde (il) menace d'employer des moyens comparables aux armes de destruction massive», a souligné le président devant les membres du gouvernement russe lundi. «Si quiconque tente d'utiliser de tels moyens contre notre pays, la Russie répondra par des mesures adéquates contre les terroristes et leurs soutiens idéologiques et financiers, où qu'ils se trouvent», a-t-il insisté. La première des mesures annoncées a déjà été précisée : Vladimir Poutine va élargir les pouvoirs de l'armée, et ordonner à l'Etat major russe de changer ses directives sur l'utilisation des forces militaires. Lesquelles ont déjà annoncé lundi avoir éliminé un important groupe de rebelles. «Jusqu'à 30» indépendantistes auraient été tués, selon l'agence Interfax, lors d'une «opération spéciale» qui s'est déroulée près du village de Tsentoroï, à l'est de Grozny. Une autre opération, menée avec la participation de l'aviation et de l'artillerie, était aussi en cours contre un groupe de rebelles bloqués dans la région d'Ourous-Martan, au sud-ouest de Grozny. Dans son discours, le chef d'Etat a par ailleurs réitéré lundi ses menaces à l'encontre de la Géorgie voisine de la Tchétchénie. Moscou avait déjà averti Tbilissi d'une possible intervention de ses troupes sur son sol, en septembre dernier, si la petite république continuait d'abriter les rebelles tchétchènes. Le président Chevarnadzé avait alors envoyé ses forces dans les gorges du Pankissi, au nord du pays, et avait assuré avoir chassé les séparatistes. Deux jours après la fin sanglante de la prise d'otages dans la capitale moscovite, la Russie fait pourtant face à certaines tensions dans ses relations avec ses partenaires. Dimanche, le ministère russe des Affaires étrangères a convoqué l'ambassadeur de France à Moscou, Claude Blanchemaison, pour se plaindre d'un rassemblement pro-tchétchène tenu à Paris samedi. Les Russes ont également dit au diplomate que Moscou était vivement préoccupé par le fait que le Danemark, qui assume la présidence tournante de l'Union européenne, n'avait pas dénoncé le congrès mondial des Tchétchènes qui se tient ces lundi et mardi à Copenhague. Moscou a même menacé d'une annulation de la venue de Poutine au sommet UE-Russie, prévu le 11 novembre au Danemark, si ce congrès n'était pas interdit. En réponse, l'Union européenne a décidé lundi de transférer la rencontre avec M. Poutine à Bruxelles. Une décision diplomate qui révèle surtout les crispations de l'UE vis-à-vis du conflit russo-tchétchène et de l'orientation «anti-terroriste» que le Kremlin souhaite lui donner depuis un an. En donnant la parole aux séparatistes engagés dans une seconde guerre depuis 1999, l'Europe, muette tout comme les Etats-Unis sur la méthode utilisée par Poutine samedi, entendait adresser un message à son voisin russe. Le président tchétchène Aslan Maskhadov s'est d'ailleurs déclaré «prêt à s'asseoir sans conditions préalables à la table de négociations avec les dirigeants russes», selon son émissaire présent lundi à Copenhague. «Il appartient à la direction russe d'engager avec nous des négociations, car il n'existe pas de solution militaire à ce conflit», a ajouté M. Zakaïev lors du Congrès tchétchène. Le président Poutine peut-il accepter l'idée d'un dialogue ? Sur les 117 otages tués pendant l'assaut, 115 ont succombé au mystérieux gaz utilisé par les forces russes. Un peu plus de 400 autres sont toujours hospitalisés, certains toujours en soins intensifs…