L'histoire de l'escroquerie perpétrée par la société émiratie Al Najat, avec la caution agissante de l'Anapec et la couverture du ministre de l'emploi en personne met également en évidence la validité et la rigueur de l'enquête étalée sur plus de six mois, réalisée par «Aujourd'hui Le Maroc». Lorsqu'en mars dernier des journalistes de notre rédaction ont eu vent de l'affaire, au même titre que les autres médias nationaux, ce fut à l'occasion de certains écrits de presse mentionnant une faramineuse offre d'emplois émanant d'une société du golfe qui cherchait à recruter 20 000, puis 22.000, et enfin 30 000 Marocains pour des emplois sur des bateaux de croisière. Naturellement, la rédaction de notre quotidien s'est intéressée à la question et a cherché à en savoir plus. Dès les premières prises de contact avec des candidats à ce programme, avec les sociétés privées d'intermédiation pour l'emploi : Initiative Group, RMO, Egida et Général Intérim, notamment, ainsi qu'avec les responsables de l'Anapec et de la clinique casablancaise Dar Salam, nous avons émis un certain nombre de réserves, d'interrogations et de doutes sur le bien-fondé de cette initiative. Nos premiers écrits sur la question remontent au mois d'avril sous forme d'articles ponctuels. Puis nous avons approfondi l'enquête dans différentes directions et nous nous sommes faits plus explicites dans notre suspicion et nos doutes. Dans notre numéro 125, daté du 25 avril, nous avons consacré le principal titre de «Une» à cette affaire sous le titre : «Vrais emplois ou grosse arnaque», sujet que nous avons décliné sur trois pleines pages, avec pas moins de huit articles traitant des différents aspects de cette opération d'envergure. Dans ce numéro, nous avons clairement mis en cause l'opacité des procédures de sélection, le flou et la rareté de l'information y afférant, l'étrangeté du monopole accordée à la clinique Dar Salam, ainsi que les risques pris par les pouvoirs publics, via l'Anapec et le département de l'emploi en couvrant l'opération. À la mi-mai, les responsables de l'Anapec, en compagnie du directeur de la clinique Dar Salam, du représentant d'Al Najat et de responsables des sociétés privées de recrutement ont tenu une conférence de presse à Casablanca au cours de laquelle ils ont défendu le sérieux de l'opération. La quasi-totalité des médias qui ont couvert la conférence ont abondé dans le sens des promoteurs de l'opération et n'ont émis aucune réserve sur son, bien-fondé. Le lundi 20 mai, nous sommes revenus en détails sur cette conférence de presse en consacrant une nouvelle couverture à l'affaire des 30 000 emplois virtuels. Nous y avons souligné les multiples zones d'ombre qui entouraient l'opération et relaté en détails le précédent kenyan où la même société émiratie avait déjà frappé et provoqué une grave crise gouvernementale et sociale. Le 22 mai, sur une pleine page de notre confrère «L'Opinion», le D.G. de l'Anapec a accordé une interview au journal dans laquelle il a tenu des propos tellement risibles et trompeurs que leur relecture, avec tout ce que tout le monde sait actuellement sur l'affaire, lui vaudra beaucoup plus que les quolibets et le ridicule ! Deux jours plus tard, dans notre numéro daté du 24 au 26 mai, nous avons de nouveau consacré notre Une et plusieurs pages de couverture à ce scandale. Nous y avons mobilisé des expertises et des commentaires de spécialistes du droit pour réfuter les arguments et les déclarations de Rached. Nous avons, dans ce numéro, révélé que le nombre des inscrits avoisinait les 80 000, sachant que le ministre Abbès El Fassi avait déclaré le 3 mai précédent, devant la commission de l'agriculture de la chambre des Conseillers, que le nombre des postulants avait déjà atteint les 45 000. Ensuite, dans notre numéro daté du 14 au 16 juin, nous allons de nouveau revenir en «Une» sur plusieurs pages de couverture sur cette affaire. Nous nous sommes fait l'écho des inquiétudes et de l'impatience des milliers de candidats dans diverses régions du Royaume et nous avons longuement détaillé l'arnaque perpétrée par Al Najat en Syrie et qui ressemblait en tous points à ce qui se passait au Maroc. À Damas, le scandale avait entraîné une grave crise au sein du gouvernement et provoqué le limogeage de la ministre en charge du département de l'emploi. Chez nous, au moment même où le doute commençait à s'installer sérieusement un peu partout, Abbès El fassi est monté au créneau à la télévision pour apporter sa caution solennelle à l'opération et nous prendre à partie en des termes très désobligeants. Nous fumes très étonnés de demeurer quasiment seuls parmi nos confrères à suivre cette affaire. C'est pour cela que nous avons été fortement réconfortés lorsque des con,frères d'autres supports tels «La Vérité», «Al Haraka» ou encore «Al Joumhour» avaient joint leur voix à la nôtre et aidé à la manifestation de la vérité. Il est vrai que juste avant les élections, nous avons pris la décision en conférence de rédaction de ne pas traiter de cette question qui mettait directement en cause un leader politique en campagne afin qu'on ne se méprenne pas sur nos intentions et qu'on n'y voie pas une quelconque intention maligne à l'endroit de qui que ce soit. Mais, dès le lendemain des élections, nous sommes revenus sur l'affaire. Nos confrères aussi se sont presque tous mis à écrire la-dessus comme s'ils venaient de découvrir l'opération. Certains se sont tout simplement arrogé le mérite de la primeur sur le sujet, ou essaient de dénigrer le travail accompli par notre rédaction, en toute indépendance et selon les critères de professionnalisme et de rigueur qui nous animent.