Les milieux d'affaires suivent avec grand intérêt l'instruction des dossiers des deux banques nationales, BCP et CIH, par la Cour spéciale de justice. Des voix s'élèvent pour mettre en garde contre les amalgames et les généralisations abusives susceptibles de nuire à une activité économique déjà très atone. Mais la demande en justice est également très forte. Le pénitencier de Salé ne ressemble à aucun autre centre de détention du pays. Ne serait-ce que par les personnes qui en occupent actuellement les cellules. De prison exemplaire, il devient le lieu d'incarcération des grands pontes de la finance du pays. Des responsables de l'association des minotiers, en passant par ceux de la Caisse Nationale du Crédit Agricole, ceux de la Banque Centrale Populaire et depuis lundi dernier, cette armada de hauts cadres a été rejoint par le staff non négligeable du Crédit Immobilier et Hôtelier (CIH), le pénitencier a mérité son statut de «prison VIP». Les trente-trois personnes convoquées par la Brigade Nationale de la Police Judiciaire (BNPJ), sont parvenues aux locaux à bord de quatre Renault Trafic aux couleurs de la sécurité nationale. Seize d'entre eux, après auditions avec le juge d'instruction auprès de la Cour Spéciale de Justice (CSJ), ont intégré les quartiers du pénitencier de Salé, en détention provisoire jusqu'au terme de l'enquête, tandis que les 17 autres ont été libérés. Parmi, les personnes relâchées, sept d'entre elles sont en exercice au sein du CIH. En revanche, au niveau des personnes retenues, huit d'entre elles font parties du personnel de l'établissement. Initialement, la convocation a porté sur trente-quatre personnes, mais pour des raisons de santé My Zine Zahidi, successeur de l'ancien Président Directeur Général du CIH, Othmane Slimani, n'a pas répondu à l'appel. Selon des sources dignes de foi, M. Zahidi aurait certainement écopé d'une détention préventive à l'instar de ses anciens collègues. En effet, il serait tombé principalement sous le chef d'inculpation d'abus de biens sociaux. En témoignent, les résultats de l'enquête réalisée par la BNPJ, qui responsabilise l'ex-PDG du CIH, principalement dans l'affaire de « la villa Nathalie ». Depuis sa prise de fonction en 1994, il a emménagé à la villa, et une somme de 12 millions de DH, déboursée sur les fonds du CIH, a été destinée aux opérations de réaménagement et de rénovation de la résidence. Le rapport de la BNPJ souligne généralement sa responsabilité dans la gestion de l'établissement. Sur ce volet, l'arrestation de Othmane Slimani trouve sa justification. En dehors des dérapages en matière de gestion dans son ensemble, il est notamment pris à partie dans les décisions relatives aux acquisitions immobilières réalisées par le CIH. C'est ainsi, que les inspecteurs relèvent l'absence d'études techniques préalables et la dépense de sommes exorbitantes pour l'achat de certains biens immobiliers. Ils l'accusent de dilapidation des deniers publics et de fraude fiscale. A partir de là, l'inculpation des membres de la commission d'acquisition s'explique. Aussi, ont été arrêtés, Abdellah Benkirane et l'ancien directeur général (DG), les anciens DG adjoints, Abdellah Hymer et Roukaia Jaïdi Zarari. De même, que Abdelkarim Laghrni qui selon le document a supervisé l'opération à toutes des étapes car il occupait le poste de directeur du pôle banque au sein de l'institution. Pour sa part, Mustapha Baha voit sa responsabilité enclenchée par rapport à l'affaire « Socopsun ». Le rapport souligne qu'il aurait donné son accord pour l'octroi de prêts au client à hauteur 69 millions de DH, sans avoir reçu de garanties suffisantes. Autre résident de la prison de Salé relativement à l'affaire « Mourad Sakan », le dénommé Abderrezak Oualillah. Par ailleurs dans le dossier « Kabila-Marina » dont la perte selon la commission d'enquête s'élève à 80 millions de DH, c'est une pléade de hauts cadres qui est mise en cause. Parmi les personnes arrêtées ce lundi, se trouvent Taïb Belkahia, en tant que chef de service juridique, puis Noureddine Berchid, chef de service du département de l'évaluation des projets touristiques et enfin Taoufik Jaïdi, appartenant au pôle banque du CIH. Quant à l'arrestation de Driss Sabini, elle se justifie dans sa responsabilisation dans l'affaire « clinique Hakim ». De même que s'expliquent les incarcérations Lahcen Boumédienne et Saïd Boufahim. Concernant, Belkacem Aouragh, ex-directeur régional de l'agence Rabat du CIH, il est cité comme responsable dans l'affaire « clinique Cadi ». L'enquête menée sur la « Société immobilière Arsat El Chaouia », met en avant la responsabilité de Ahmed Bassit, responsable de l'évaluation du projet, de même que celle de Kamal Agznay, directeur d'exploitation. Précisons que ces personnes sont mises en cause dans beaucoup d'autres affaires. Chacun est responsable par rapport à ses prérogatives.