Comment un père ose-t-il abuser sexuellement de sa fille ? C'est bien une réalité qui a eu lieu à Berrechid. Un père le faisait avec sa fille de 15 ans durant quatre ans. Un matin d'août 2002, qui n'est pas comme les autres au moins pour les habitants du Hay Hassani, à Berrechid. Khadija a quitté son domicile traînant sa sœur Fatima. La première a dix-neuf ans et la seconde en a quinze. Leur mère est sortie tôt de chez elle pour se rendre à son boulot. Elle travaille chez une famille contre une somme dérisoire pour aider son mari, Ahmed, veilleur de nuit. Les besoins de ses deux filles et la consistance de la vie l'obligent de rester en dehors de chez elle toute la journée, loin de ses deux filles. Son abnégation pour le bienêtre de ses deux «anges» l'incitait parfois à éprouver le calvaire dans les champs. Khadija a poursuivi son chemin. Sa sœur, Fatima, la suivait comme son ombre sans qu'elle sache où elle l'emmenait. Ce qui lui importait est de fuir l'enfer qui a calciné sa vie, qui l'a détruite, qui l'a rendue sans avenir, qui a brisé tous ses rêves. Elle est de ces rares filles qui espèrent ne jamais avoir eu de père, que ce dernier aurait dû mourir avant sa naissance. Quand elle est arrivée au seuil du commissariat de police, Khadija a ralenti ses pas comme si elle hésitait d'y accéder. Mais une force intérieure la poussait à agir pour mettre fin au calvaire que sa sœur éprouve depuis quatre ans. Un policier les a accueillies plus ou moins chaleureusement comme si elles étaient ses filles. Khadija n'a pas trop attendu pour lui demander à voir le chef. En effet, quelques minutes plus tard elle était devant le responsable, laissant sa sœur à la porte du bureau pour lui éviter d'écouter la conversation. Seulement, le chef a appelé Fatima. Les yeux baissés, elle avance calmement et à pas lents. Le chef lui a demandé de s'asseoir. Fatima s'est assise sur une chaise, ne pouvant plus regarder ni sa sœur, ni le chef de la brigade policière. Ce dernier lui a demandé de s'approcher. «Il ne faut pas avoir peur, nous allons te soutenir pour ne pas rester entre les mains de ton père…On va t'aider à sortir de cet enfer…Mais à condition que tu nous aides toi aussi…Sinon on ne peut rien faire…» lui intime-t-il. Fatima a levé ses yeux pour regarder sa sœur. Cette dernière lui a lancé un sourire pour l'encourager à parler. Le chef a appelé un inspecteur, l'a chargé de consigner ses déclarations dans un procès-verbal. «J'avais onze ans quand mon père m'a prise pour la première fois entre ses mains et a commencé à m'embrasser à la bouche d'une façon étrange…» a-t-elle affirmé les larmes aux yeux. Elle ne pouvait plus les retenir bien que sa sœur essayait de la tranquilliser. C'est en 1998 que son père l'a déshabillée pour la première fois et l'a mise sur son lit pour abuser d'elle sans vergogne. Ils étaient seuls. Ni sa mère, ni sa sœur n'étaient là. Elle a sangloté follement. Seulement son père n'entendait que ses impulsions sexuelles maladives. «Si tu dis quelque chose à ta mère ou à ta sœur je vais te tuer…» la menaçait-il. Fatima gardait le mutisme, tout en se laissant aller aux désirs de son père. Deux ans plus tard, elle ne pouvait plus garder le mutisme, enterrer son secret à l'intérieur de son cœur qui se déchirait d'un jour à l'autre. Elle l'a dévoilé à sa mère et à sa sœur. Quand on a confronté le père de cette vérité blessante, il les a menacées de les mettre à la rue ou, pire, de les tuer. Malheureusement elles ont choisi de rester bouche cousue. «Mais jusqu'à quand?…» s'est interrogée Khadija quatre ans plus tard. Et elle a décidé un jour d'été de l'année 2002 de se rendre à la police sans aviser sa mère. Le père a été arrêté et conduit devant la chambre criminelle près la cour d'appel de Settat. Oserait-il regarder sa fille et avouer devant la cour: «Oui, j'ai abusé sexuellement de ma fille durant quatre ans…» ?