Avec son diplôme universitaire, N.S est restée plusieurs années sans emploi. Une voisine l'a conseillée de recourir à un f'kih pour chasser le mauvais sort. Lors d'une séance d'“exorcisme“, ce dernier l'a droguée pour abuser d'elle comme il le fait souvent avec ses clientes. Elle s'appelle N.S. Son niveau d'instruction est universitaire. Elle est l'une de ces licenciés en chômage qui cherchent depuis des années un emploi. Mais en vain, malgré sa participation à plusieurs concours permettant de décrocher un emploi. Elle ignore les raisons pour lesquelles elle échouait au point qu'elle a perdu tout espoir. La solution ? Rester chez elle à attendre. Attendre quoi ? Elle n'en sait rien. Mais elle n'a pas le choix. “Au contraire, lui dit une voisine, tu as le choix d'aller chez un f'kih“. Pourquoi faire? Sa voisine lui a expliqué que “Ch'rif“ est un brave homme qui a une grande connaissance dans la résolution des problèmes d'emploi et d'amour. Elle lui a affirmé que plusieurs filles qu'elle connaissait avaient passé quelques séances chez lui et qu'elles sont arrivées à leurs objectifs grâce à ses pouvoirs. Est-il vrai qu'une célibataire qui rêve de se marier trouve un mari grâce à un f'kih ? Est-il concevable qu'un chômeur trouve un emploi à travers un charlatan? Non certainement. Et il est plus invraisemblable qu'une fille, qui a décroché un diplôme universitaire, y croit. Toutefois, N.S se laisse convaincre qu'un licencié peut recourir aux charlatans pour assurer son avenir. Est-ce l'effet de la déception ? En effet, le sentiment du désespoir et de déception rend parfois le désespéré comme un noyé qui s'accroche à n'importe quoi pour se sauver. N.S a accompagné sa voisine à Hay Hassani (Casablanca). C'est dans une ruelle de ce quartier où Ch'rif dispose d'une habitation aménagée pour l'accueil des clientes. Il s'agit de A.Y, âgé de vingt-huit ans, célibataire, issu de Taroudant. La première fois, en fin du mois de juillet dernier, N.S est entrée en compagnie de sa voisine dans une salle d'attente. Il y avait plusieurs autres clientes qui attendaient leur tour. Quand le tour de l'une d'elles arrive, elle va dans la chambre où se trouve Ch'rif. Elle s'isole avec lui, loin des regards des autres clientes. Et le tour de N.S est arrivé. Elle s'est assise devant lui après sa permission. Ch'rif l'a scrutée avant de lui mettre sa main sur son front et balbutier des mots incompréhensibles. En prenant un stylo à bille, il a noté son nom et celui de sa mère dans un papier. Après quoi, il a remis une fois encore sa main sur son front et lui a expliqué qu'elle était possédée par des “Jnounes“. “Ce sont eux qui vous empêchent de trouver un emploi“, lui a-t-il expliqué. Elle l'a cru, notamment quand il lui a affirmé qu'il était capable de l'exorciser. Une séance de quatre à dix minutes et le Ch'rif a fini par lui remettre une amulette et de l'encens. “Retourne chez moi la semaine prochaine pour une deuxième et dernière séance “, lui demande-t-il. N.S est sortie de chez lui pleine de joie. Elle a raconté à sa voisine que “Ch'rif“ lui a trouvé le remède, qu'il va l'exorciser pour chasser de son corps les “Jnounes“ qui l'empêchent de travailler. Enfin son mauvais sort prendra fin. Et son rêve de trouver un emploi sera enfin réalisé. Sa mère lui a versé une autre somme d'argent pour la remettre au Ch'rif lors de la deuxième séance. Fin juillet 2004. N.S attend chez Ch'rif. Lorsque son tour est arrivé, Ch'rif lui a demandé d'attendre jusqu'à la fin. Elle ne peut le contrarier. C'est le f'kih qui décide. Elle a attendu une heure avant qu'elle ne soit sollicitée de rentrer à sa chambre. Il lui a demandé de lever son tricot. Elle a obtempéré sans savoir pourquoi. Aussitôt, il a commencé à lui écrire avec un liquide jaune quelques talismans sur son dos, puis sur ses seins. Après quoi, il lui a donné un autre liquide pour le boire. Un moment plus tard, N.S est dans un état second. Bref, elle a perdu conscience. Et le f'kih s'est transformé en un monstre et lui a enlevé le pantalon pour passer à l'action. Quand elle s'est réveillée d'un sommeil profond, elle a été surprise de voir son pantalon et son maillot enlevés et les taches de sang qui les maculaient. Qu'est-ce qu'elle lui est arrivé ? Elle ne sait rien. Elle a fixé Ch'rif qui lui a lancé un sourire avant de tenter de la consoler. “Je vais t'épouser Inchallah“, lui lance-t-il sans vergogne. Encore sous le choc, elle a commencé à crier, à lui demander ce qu'il lui avait fait, les raisons pour lesquelles il l'a violée. Hors d'elle, elle s'est adressée directement au commissariat de la police. Accompagnant N.S, les éléments de la troisième section judiciaire de la police urbaine de Hay Hassani-Aïn Chock ont appréhendé “Ch'rif“ et l'ont conduit au commissariat. Ch'rif n'a pas seulement avoué avoir violé N.S après l'avoir droguée, mais il a précisé avoir également fait l'amour avec plusieurs clientes. “Avec leur consentement“, a-t-il affirmé avant d'être déféré, le 3 août, devant la Cour d'appel de Casablanca. Cependant, aucune de ses clientes n'a osé se présenter devant la justice pour se plaindre. Elles ont toutes gardé le silence.