L'Ordre national des architectes proteste contre le lancement d'un concours relatif à la gestion d'un établissement privé d'architecture à Casablanca. Il reproche au ministère de l'Habitat d'avoir laissé peu de temps aux participants pour répondre au cahier des charges. Le nom de l'équipe gagnante est déjà proclamé. L'Ordre national des architectes dénonce la procédure suivie pour la création de l'Ecole d'architecture de Casablanca. Dans un communiqué, il déplore le «caractère d'urgence» qui a accompagné le lancement d'un appel à manifestation d'intérêt pour la gestion de l'établissement. Le ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme a initié une nouvelle politique, en vue de multiplier les partenariats entre l'Etat et le privé. A cet égard, il a décidé de transformer l'Ecole des adjoints techniques, située à Sidi Bernoussi à Casablanca, en Ecole d'architecture. La gestion de cet établissement sera confiée à un groupement d'architectes. L'appel a été ainsi lancé pour la présentation des dossiers. Il a été accompagné de vives protestations. «Ce concours est contesté en raison de la rapidité de l'appel. Les délais ne laissaient pas beaucoup de temps aux architectes pour répondre au cahier des charges», estime Azzedine Nekmouch, président de l'Ordre régional des architectes de Casablanca qui a participé au concours. Un autre architecte n'hésite pas à parler de «délit d'initié», jetant ainsi le doute sur le groupement qui a remporté le marché. «C'est faux !», affirme Najib Laârichi, secrétaire général au ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme et président de la commission qui a départagé les candidats. Et d'ajouter : «Nous avons reçu sept dossiers dont cinq sont conformes au cahier des charges. On ne pouvait pas recevoir autant de dossiers si le délai ne le permettait pas». Pourtant, il est vrai que la durée laissée aux candidats pour la préparation de leurs dossiers était courte. L'appel à manifestation d'intérêt a été lancé le 22 juin et la date limite de la remise des dossiers était fixée au 15 juillet. En 25 jours, il est difficile de se conformer au cahier des charges d'un établissement qui exige une formation privée supérieure à celle de l'Ecole nationale d'architecture (ENA) et des associations avec des instituts à l'étranger. Cette difficulté n'a pas empêché sept équipes, formées d'architectes rompus aux concours de présenter leurs dossiers. Parmi les participants, on trouve Rachid Andaloussi, Wahid Mountassir, Toufik El Oufir, Aziz Lazrek, Aimé Kakon et les responsables d'Archimédia : Fouad Akalay et Selma Zerhouni. Certaines équipes ont dû se mettre au travail dès l'annonce officielle de la création d'un établissement supérieur privé d'architecture. Cette annonce a été faite par le Premier ministre, lors de la cérémonie d'ouverture de l'université de printemps (21 et 22 mai 2004). En dépit du délai court, il est très difficile de reprocher au ministère de l'Habitat le manque de transparence dans cette opération. La commission, chargée d'étudier les dossiers, se compose d'un notaire membre de l'Ordre national et du président de l'Ordre national des architectes, Omar Ferkhani, qui aurait refusé de prendre part aux délibérations, selon M. Laârichi. «Je n'ai jamais été invité à cette commission», affirme à ALM M. Ferkhani, avant de prévenir de l'imminence de la mort de la batterie de son téléphone portale. Et effectivement, dans la seconde qui suivait il n'était plus joignable.Par ailleurs, l'équipe adjudicataire est connue. Il s'agit d'un groupement formé d'Abdelmoumen Abdejlil, Abdelhafid El Aouad, Aziz Lazrek, Saâd Benkirane et Youssef Touimi Benjelloun. Elle va assurer la gestion de l'Ecole supérieure privée d'architecture de Casablanca. Elle aura la responsabilité d'aboutir cette nouvelle philosophie de partenariat entre le privé et l'Etat. Car les lauréats de cette école auront le même statut que ceux de l'ENA. Mieux : ils recevront leurs diplômes de l'ENA. Mais contrairement aux étudiants de l'ENA, ceux de l'école privée payeront chaque mois une somme conséquente aux gestionnaires de l'établissement. Et cette manne financière peut aussi expliquer les passions que déchaîne ce concours.