Ahmed Raissouni est l'homme par qui le scandale arrive. Cet idéologue, docteur en théologie, bénéficie d'un grand prestige parmi les militants de base du PJD. Portrait. Peu importe son parcours, l'important c'est ce qu'il représente. Ahmed Raissouni est devenu une figure éminente de l'islamisme au Maroc quand il a pris la direction du Mouvement Unité et Réforme (MUR) en 1996. Depuis cette date-là, emblématique de la fusion entre Rabitate al mostaqbal al islami et le MUR, il n'a cessé de soigner son image d'idéologue. Son crédit est devenu grand quand il a trouvé un espace pour exprimer sa vision du monde : le journal «Attajdid». Le premier numéro de cet hebdomadaire, transformé en quotidien en 2002, est sorti le 27 janvier 1999. L'homme fort du journal islamiste du Maroc – le directeur de cette publication – est Ahmed Raissouni. Coiffé du titre de docteur, M. Raissouni jouit d'un grand prestige parmi les islamistes radicaux. Et même au-delà. Son érudition en fiqh lui ouvrait régulièrement les portes des universités marocaines où il tenait séminaires et conférences. Avec son visage de poupin et son collier de barbe, l'homme n'a rien d'un fou furieux ou d'un illuminé. Il s'exprime avec méthode et pondération. Ces apparences sont toutefois bien trompeuses : Ahmed Raissouni tient des propos incendiaires. Ses articles reflètent un projet obscurantiste pour la société marocaine. Il y a tout clarifié : sa vision moyenâgeuse de la femme, son opposition à la musique, la suspicion où il tient les festivals.Avec l'accroissement de son crédit parmi ses partisans, M. Raissouni est devenu l'idéologue du PJD. Celui qui dicte la marche à suivre. Celui qui ne compose pas avec les jeux politiques et les ambitions personnelles, mais use d'un franc-parler qui galvanise les militants de base. Il a commis un faux-pas quand il a donné sa vision de l'institution d'Amir Al Mouminine. Ce qui lui a valu d'être publiquement traité d'«imbécile» par le fondateur du PJD, Abdelkrim Al Khatib. M. Raissoni a répliqué en démissionnant du MUR dont il assurait la présidence. Nombreux sont les observateurs qui ont cru que la carrière politique de l'idéologue était brisée. Mais c'était mal connaître les ressources de M. Roissouni. Lors du dernier congrès du PJD (10 avril 2004), il y a eu deux élections. L'une ostensible qui a porté Saâd Eddine Al Othmani à la tête du parti et l'autre souterraine qui a fait un triomphe à M. Raissouni. En effet, ce dernier occupe une place privilégiée dans l'organigramme du PJD. Il vient en tête de la liste des 150 membres du Conseil national, élus par 2 000 congressistes. Ce qui veut dire qu'il a récolté le plus de voix parmi la base du PJD ! Fort de cette légitimité, l'homme est revenu à la charge avec une vision archaïque, inadaptée à la vie d'aujourd'hui. Il vient de jeter son fiel sur les festivals. Et n'hésite plus à insulter ses adversaires. Probablement, il ne s'arrêtera pas là.