La question de la lutte contre l'immigration clandestine portée par l'Espagne en tête de liste des préoccupations du sommet européens de Séville, ne fait pas l'unanimité. Les réserves se multiplent à la veille de la rencontre des quinze. Le tout nouveau gouvernement français n'a pas ramé dans le sens du chef du gouvernement espagnol José Maria Aznar au sujet des moyens de lutte contre l'immigration clandestine en Europe. La France s'est prononcée, jeudi, contre toute idée de sanctions économiques contre les pays d'origine ou de transit de l'immigration clandestine et a annoncé qu'elle plaidera pour une approche équilibrée de la question au sommet européen des 21 et 22 juin à Séville. La France opte plutôt pour une approche fondée sur la coopération, l'esprit de partenariat, l'incitation et l'assistance technique, a dit la porte-parole de la présidence de la république française, Catherine Colonna. « Nous pensons qu'il faut inciter et accompagner plutôt que punir, si on veut être efficaces. Car aggraver la situation économique du pays sanctionné risquerait fort, en réalité, d'accroître les flux migratoires et non de les faire diminuer », a-t-elle expliqué. Les Français se sont cependant inscrits dans le sillage tracé par la présidence espagnole de l'union européenne en saluant l'initiative de placer la question de l'immigration à la tête de l'ordre du jour du sommet de Séville. Ils ont également approuvé les propositions espagnoles d'une gestion intégrée des frontières, de la lutte contre l'immigration clandestine, d'une harmonisation des législations en matière du droit d'asile, et d'une coopération avec les pays d'origine ou de transit. Pendant ce temps, une grève générale décrétée par les centrales syndicales a paralysé jeudi l'Espagne. La large compagne menée par le gouvernement Aznar pour dénoncer la concomitance de la grève avec la tenue du sommet de Séville, n'a pas fait reculer les grévistes, qui entendent protester contre la nouvelle loi de régulation du marché de l'emploi et la révision des conditions d'octroi des indemnités de chômage. Le président de la commission européenne Romano Prodi. A pour sa part estimé dans une lettre adressée à José Maria Aznar que la campagne contre l'immigration clandestine dans laquelle se sont engagés les Quinze ne doit pas être mise en oeuvre au détriment des étrangers en situation régulière. «Nous concentrer sur l'immigration clandestine ne doit pas nous amener à négliger d'autres aspects, tout aussi importants, de la question, en particulier l'intégration harmonieuse de notre population immigrée existante», a-t-il écrit. Des propos qui trouvent un écho dans ceux de Ruud Lubbers, Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés, qui estime que le seul renforcement des contrôles aux frontières de l'Union serait une erreur dommageable pour les Quinze eux-mêmes. « Il est beaucoup trop question de bouclage des frontières, ce qui ne sera pas efficace, et de sanctions à l'égard des pays qui s'opposent au retour de leurs ressortissants », a poursuivi l'ancien chef du gouvernement néerlandais. « Si c'est là tout ce qu'ils proposent, ils vont se tirer dans le pied », a-t-il prédi dans une interview à l'agence Reuters.