Interview. Le peintre Mohamed Nabili explique son intérêt pour les signes et sa passion pour la sable. Aujourd'hui Le Maroc : Votre intérêt pour le signe est resté intact en dépit des années. Mohamed Nabili : Mes tableaux reposent sur une recherche philosophique. Je m'inscris en faux contre l'image de l'artiste comme étant une personne qui vit en dehors des contingences de la vie réelle, qui s'élève au-dessus de tout, etc. Je considère que l'art est une science, une philosophie, une réflexion. L'artiste n'est pas seulement un passeur ou un faiseur d'images, mais une personne qui mène une recherche cohérente. En tant que Marocain, je me suis beaucoup intéressé au signe. J'ai mené pendant des années une recherche sur le signe berbère, sur le tatouage. En plus, ma quête insatiable du signe m'a poussé à le chercher chez d'autres civilisations comme chez les Indiens ou les Aztèques. J'ai essayé ensuite de comparer, voire de malaxer les signes en provenance de ces cultures avec ceux qui me sont familiers. Je peux dire dans ce sens-là que je suis parti de mes racines pour aller vers l'universel. Comment êtes-vous venu à l'intégration du sable dans vos tableaux ? Je tiens ma passion pour la terre de ma grand-mère qui m'a élevé. Elle avait l'habitude de visiter les mausolées des saints. Et elle recueillait après chaque visite une poignée de terre pour garder le barouk. Elle cachait cette terre dans une boîte. Enfant, j'ai été interloqué par cette boîte. Je pensais qu'elle contenait des choses précieuses, des bombons. Je l'ai donc ouverte et j'ai découvert que la terre peut être gardée précieusement aussi bien que n'importe quel autre trésor. L'impact de cette découverte est sans doute très important. En plus, je suis un grand voyageur. S'il y a une chose qui me touche profondément dans les lieux que je visite, c'est bien la terre et le sable. Et puis, moi je reste près de la terre : je fais mon œuvre en toute humilité. Il n'y aurait pas une influence de peintres qui ont incorporé le sable dans leurs tableaux, André Masson par exemple ? Non ! Je connais très bien André Masson, mais je pense qu'il n'a pas travaillé de la même manière que moi. Il y a beaucoup d'artistes qui ont travaillé avec le sable, mais chacun l'a fait d'une façon personnelle.