Une rencontre luso-marocaine autour de la photographie permet de se convaincre de son impact. La photographie est une forme éminemment contemporaine. L'intérêt de nos artistes pour la photographie est un bon signe. En atteste l'exposition récente des œuvres de 13 photographes marocains au centre culturel de l'ambassade du Portugal à Rabat. Ce qu'on reconnaît immédiatement dans les photographies des Marocains, c'est qu'ils s'éloignent de l'anecdote pour réserver une importante part à la plasticité dans leur travail. Ainsi les photographies de Zouhir Ibn El Farouk qui ressemblent à des toiles abstraites. Cet artiste a dû agrandir un détail pour permettre à des formes invisibles à l'œil nu de naître à la vie plastique. D'autres artistes s'ouvrent à des recherches sur le flou, la multiplication du motif et les miroitements. La photo de Sami Loukili ressemble à une lumière dans le noir. Deux mains floues et un visage contorsionné jaillissent sur un fond complètement noirci. Mohamed Mali s'intéresse pour sa part aux contrastes entre l'ombre et la lumière. Il capte la lumière de la lune qui pénètre à travers les vitres d'une fenêtre le soir. La recherche de la plasticité dans la photo est une préoccupation également de Saïd Aoubraim. Aucun élément du monde extérieur n'est reconnaissable dans ses photos qui ressemblent à des peintures. Ce souci est partagé par Fouzia Alami, Jaâfar Akil, Hassan Nadim et Miloud Skira. Les photographes qui se préoccupent de présenter la réalité sont en revanche peu nombreux. Fouad Brigui a photographié une espèce de charrette en déshérence. Elle est juste là, témoin de quelque chose qui a été. Pareil pour Thami Benkirane qui s'intéresse au zellige des mausolées et Abderrahman Loukili qui fixe la vie des petites gens. La majorité des photos sont en couleur. Ce qui rompt avec la tendance actuelle qui favorise le noir et blanc. L'une des exceptions à cette façon de photographier sans couleurs est un beau portrait de Nour Eddine El Ghoumari. Il a photographié le visage d'une vieille femme. Ce visage est marqué par l'âge, ridé partout. Le regard de la femme est impénétrable. On peut regarder pendant des heures cette photo sans en épuiser le mystère.