Le projet immobilier du groupe Chaâbi en plein centre de Dakar est tombé à l'eau. D'une enveloppe de 200 milliards de FCFA (soit près de 3,2 milliards de Dhs), ce projet, selon ses promoteurs, a rencontré de multiples obstacles qui ont empêché le démarrage des travaux. C'est la première fois qu'une entreprise marocaine est en bute à des difficultés dans ce pays ami dont le président, Abdoulaye Wade, a, à maintes reprises, appelé le secteur privé marocain, avec les accents de la sincérité, à venir investir au Sénégal. Après un blocage qui a duré plusieurs mois, le contact semble être renoué entre le groupe Chaâbi et les autorités sénégalaises pour relancer (pour ne pas dire entamer) les travaux d'un vaste projet de logement, 10.000 au total pour un montant de 3,2 milliards de DH. Et pour cause, le vice-président du groupe, Faouzi Chaâbi, affirme que "les deux parties ont convenu de la signature d'une nouvelle convention, revue et corrigée, pour débloquer la situation". Toutefois, les constructions n'auront pas lieu sur la passerelle controversée de Pyrotechnie, dans la capitale Dakar, mais sur deux autres terrains que le groupe Chaâbi avait acquis au moment de son installation au Sénégal. En fait, rien n'a été conclu, mais les négociations entre le groupe marocain et les pouvoirs publics sénégalais semblent bien avancées. Malgré les péripéties du terrain de Pyrotechnie, le groupe Chaâbi tient fermement à investir au Sénégal. Il l'a fait savoir à tous ses interlocuteurs sénégalais, et à leur tête le président Abdoulay Wade, qui s'est entretenu à deux reprises avec Faouzi Chaâbi. Le président Wade a lui-même insisté auprès du groupe Chaâbi pour que le projet de logement soit réalisé dans les plus brefs délais. Selon les accords de principe entre le gouvernement sénégalais et le groupe Chaâbi, il est question d'indemniser ce dernier. Et pour cause, le groupe Chaâbi a déjà injecté des sommes astronomiques dans le premier projet de construction de logements qui est carrément tombé à l'eau. Même si le vice-président du groupe refuse d'avancer le montant exact des dépenses engagées au Sénégal, il est tout à fait aisé d'imaginer les pertes sèches que le groupe a dû subir. Faouzi Chaâbi rappelle, à ce sujet, le cas des employés marocains expatriés installés avec leurs enfants, à Dakar. Les arrêts des chantiers ont été perçus comme une véritable catastrophe pour ces familles. Sans compter les investissements en matériel de bâtiment et travaux public que le groupe s'est trouvé contraint de brader avant de quitter le Sénégal. Rappelons que le groupe marocain avait commencé à construire sur le terrain Pyrotechnie son projet de logement. Une caserne militaire occupait environ les deux tiers du terrain. Le gouvernement sénégalais n'a pas tenu sa promesse de vider les lieux dans un délai maximum de trois semaines. Malgré cela, le groupe Chaâbi a entamé les constructions, sur une superficie d'un hectare seulement. Le reste du terrain était, lui-aussi, occupé par des pépiniéristes et par un Cheikh de la confrérie des Tidjanes, la plus importante du Sénégal avec celles des Mourides. En fait, force est de constater qu'hormis ces tracas d'ordre juridique, figurent également des considérations purement politiques. En effet, le président Wade vient de limoger, le 22 avril dernier, son Premier ministre, Idrissa Seck. Ce dernier, pour des raisons purement politiques, avait la fâcheuse tendance à bloquer tous les projets parrainés par le président Wade. Le projet Chaâbi en fait partie. Après des mois de désaccord au sommet de l'Exécutif sénégalais, le président Wade a fini par s'en séparer et choisit, pour le remplacer, un fidèle "disciple", l'ancien ministre de l'Intérieur, Macky Sall. Ce n'est pas un hasard que le contact entre le gouvernement sénégalais et le groupe Chaâbi a été renoué. Officiellement, l'Etat sénégalais n'a pas réagi. Décidément, le groupe Chaâbi n'a pas de chance en Afrique. Le Sénégal est le deuxième pays dans lequel il essaye de s'implanter. Dans les années 1990, le groupe a construit une usine de production de PVC en polyéthylène. Cette usine, qui a été pratiquement construite sous la guerre, a nécessité un investissement de l'ordre de 62 millions de DH. Aujourd'hui, l'usine est délaissée. "Nous avons fait le choix de l'Afrique, conscients des risques que nous prenons parfois,mais avant tout conscients des vastes opportunités qu'offrent ces marchés", souligne Faouzi Chaâbi.