Le chef du gouvernement espagnol, José Luis Zapatero, est connu par son tempérament calme et la constance de ses positions politiques. Lors de la crise de l'îlot Leïla, il a tenu des positions contraires à l'arrogance de son prédécesseur. Portrait de celui sur qui de grands espoirs sont fondés pour ouvrir une nouvelle page dans les relations maroco-espagnoles. Sa première visite à l'étranger, comme chef du gouvernement espagnol, le conduira au Maroc. José Luis Rodriguez Zapatero marque d'emblée sa différence avec le désintérêt, voire la haine que nourrissait son prédécesseur à l'encontre du Royaume du Maroc. Certes en effectuant sa première visite au Maroc, M. Zapatero renoue avec une tradition, observée par d'autres premiers ministres espagnols, mais la conjoncture dans laquelle intervient cette visite est exceptionnelle. M. Zapatero est l'homme de tous les espoirs pour mettre un terme à la série de crises provoqués par José Maria Aznar. Pour de nombreux observateurs, l'actuel Premier ministre espagnol est l'anti-Aznar. Les mensonges de ce dernier, au sujet de l'enquête sur les attentats de Madrid, ont projeté M. Zapatero à la tête du gouvernement espagnol. Avant le 11 mars, personne ne pariait sur la victoire du parti de José Luis Zapatero. Le vainqueur des législatives en Espagne était même quasiment inconnu avant son élection à la tête du parti socialiste (PSOE) en juillet 2000. Pourtant, M. Zapatero n'est pas ce qu'on appelle un blanc-bec en politique. Son engagement est peu banal. Rodriguez Zapatero le doit à la lecture des dernières volontés de son grand-père, républicain exécuté par un peloton franquiste durant la Guerre d'Espagne. A 16 ans, Zapatero adhère au PSOE. Il en gravit rapidement les échelons, après la victoire de Felipe Gonzalez en 1982. A tel point qu'il est devenu, en 1986, le plus jeune parlementaire espagnol à l'âge de 26 ans. Loin du cliché de l'Espagnol machiste, Jose Luis Rodriguez Zapatero n'abonde pas dans le sens des fanfaronnades dont sont coutumiers les Espagnols. Dans un pays fier de sa cuisine jusqu'à l'obsession, cet homme âgé de 44 ans, marié et père de deux enfants, avoue ne pas apprécier la gastronomie et ne jamais boire d'alcool. Il aime en revanche pêcher en silence dans les rivières de sa province natale du Leon, dans le nord-ouest de l'Espagne. Les détracteurs de Rodriguez Zapatero ont dénoncé son manque de relief – son style terne, disent-ils. Ils lui reprochent son manque d'ascendant et ses réactions calmes. Il a été critiqué à cet égard jusque dans ses propres rangs pour son manque d'agressivité à l'égard du Parti populaire au pouvoir. Ses collaborateurs disent ne l'avoir jamais vu en colère. Lui-même a confié récemment à la télévision que s'il croisait le chef de l'ETA dans une rue, il baisserait les yeux. Sérieux, réservé, voire pudique, Zapatero dissimule ses sentiments. Nombre de socialistes qui ont le sang chaud le trouvent trop “nordique“. D'autres disent qu'il manque de “relief“. Il n'a marqué aucune arrogance après son investiture à la tête du gouvernement espagnol. Il a tendu une main franche à José Maria Aznar. Le côté gentleman de l'intéressé, ainsi que sa politesse qui peut s'apparenter à une faiblesse lui ont valu alors le surnom de “Bambi“. Rodriguez Zapatero donne parfois l'impression d'évoluer dans un univers dont Disney serait le gentil démiurge. Avec lui, les loups ne mangent pas les agneaux. Ils pactisent. Mais l'homme n'est pas aussi naïf qu'il aime le paraître. Et pour preuve, M. Zapatero s'est démarqué de l'ancien gouvernement d'Aznar en prenant des positions radicalement opposées à celles du PP. Il s'est particulièrement illustré lors de la crise de l'îlot Leïla. Au plus fort du conflit, M. Zapatero s'était dissocié de la politique arrogamment offensive d'Aznar à l'encontre du Maroc. Il s'était rendu à notre pays pour montrer son désaccord avec la campagne agressive dont faisait l'objet le Maroc. Il avait été reçu à l'époque par SM le Roi Mohammed VI. Autre sujet de désaccord qui a permis au nouveau Premier espagnol de prendre ses marques : sa dénonciation de la gestion de la marée noire après le naufrage du pétrolier Prestige au large de la Galice et surtout son apposition à la guerre en Irak. C'est sur ce thème que le “socialiste tranquille“ s'est le plus illustré par sa ténacité. Il s'est révélé à ce propos un homme de parole. La promesse de retirer les troupes espagnoles de l'Irak, il l'a respectée. Elle a même été accélérée, puisque M. Zapatero a décidé de rapatrier, au grand dam de George Bush, dès les prochaines semaines le contingent de 1.400 soldats envoyé en Irak par José Maria Aznar. En visitant le Maroc, l'homme fait part de la même logique à respecter une parole donnée. Tout le monde attend de sa visite qu'elle impulse une nouvelle dynamique aux relations entre le Maroc et l'Espagne.