Au Maroc ou ailleurs, la conjoncture reste la même, égarant ainsi cet outil de lutte contre la pauvreté de sa mission de base : l'inclusion sociale. Après le retrait des bailleurs de fonds, le secteur s'est vu noyé dans une triple tâche alliant rentabilité financière, respect environnemental et devoir social. Cette situation impose en urgence la mise en place d'un système de gestion de performance sociale en vue d'ancrer à nouveau la microfinance dans son propre contexte. Le but étant de fournir des indicateurs confirmant la viabilité du secteur. «Le secteur de la microfinance au Maroc est une émanation de la société civile. Nous ciblons une population qui autrefois était exclue du système financier classique», explique Mohamed Mazouri, délégué général de la Fédération nationale des associations de microcrédit (FNAM) lors d'une table ronde co-organisée avec le Centre Mohammed VI de soutien à la microfinance solidaire (CMS) autour de la thématique : «La responsabilité sociale et la protection des clients ». Lors de son intervention, M. El Mazouri a mis le point sur le principe de la protection des clients. Il s'agit en effet d' «un engagement ferme de microcrédit qui s'inscrit dans un processus institutionnalisé de mise en œuvre de sa mission sociale, et ce à travers : la responsabilité envers le personnel, la responsabilité envers la communauté et l'environnement et la conformité aux principes de protection de clients». Six composantes ont été évoquées dans ce sens visant ainsi à fournir des produits adaptés aux bénéficiaires des microcrédits, d'en assurer une distribution appropriée, de prévenir du surendettement, de renforcer les bonnes pratiques de transparence ainsi que de mettre en place des tarification responsables. La confidentialité des données et le traitement équitable et respectueux des clients sont également de mise afin d'atteindre une bonne performance sociale. La proximité et la sensibilisation ont longtemps été le cheval de bataille des opérateurs nationaux de la microfinance. La démarche adoptée par le CMS confirme cet engagement. «Le centre a consolidé son intervention sur le terrain par des actions de formation et d'accompagnement en faveur des clients et acteurs du secteur», explique Youssef Errami, directeur exécutif du CMS. Depuis la création du centre (2008) à fin juin 2015, les équipes du CMS ont organisé plus de 5.000 rencontres régionales et 7.000 formations au profit des micro-entrepreneurs. Pour la même période, le cumul des bénéficiaires des formations a atteint les 29.662 personnes, un effectif composé de 54% de micro-entrepreneurs et 46% du personnel des associations de microcrédits. Le secteur de la microfinance au Maroc a connu depuis 2012 une nouvelle configuration. Ainsi, un nouvel élan est donné au secteur, lequel est marqué par une panoplie d'études mise en marche ou qui sera incessamment lancée en vue d'identifier les besoins incessants du secteur. Une mission à laquelle s'attellent les opérateurs du secteur en coordination avec le ministère de l'économie et des finances et Bank Al Maghrib, mobilisant ainsi une enveloppe de près de 5 millions d'euros. Expérience marocaine : Une référence africaine «Le Maroc est sur la bonne voie». C'est ce qu'a affirmé Aida Gueye, consultante à SPTF-Smart. Mme Gueye a salué l'engagement de Bank Al-Maghrib dans ce sens qui «a tenu compte de l'importance de mettre en place une centrale de risque et a instauré, par ailleurs, une réglementation axée sur la transparence et la confidentialité des données». Selon Mme Gueye, ces composantes sont jusque-là des points faibles pour l'Afrique de l'ouest. Régies par la BCAO, les institutions des pays de la région ont suspendu toutes leurs initiatives internes dans l'attente de mettre en place une centrale de risque. Les caractéristiques de la microfinance au Maroc Depuis son lancement au Maroc, la microfinance a servi plus de 5 millions de bénéficiaires pour un encours de 50 milliards de dirhams. Le secteur a créé plus d'un million d'emplois. De même, le taux de satisfaction de la clientèle de la microfinance dépasse de loin celui des autres institutions financières. Les activités financées par le microcrédit concernent en grande partie le commerce ( 58%), suivi de l'artisanat (21%), les services 15% et l'agriculture 6%. L'approche du genre est très présente dans le secteur puisque la part des femmes en nombre de clients depuis la création de la microfinance au Maroc est de 55%. La proportion des clients dans l'urbain est de 35,20 contre 19,80% en milieu rural. Notons que 150 unités mobiles sont déployées sur le terrain, sillonnant les souks de plus de 500 communes rurales.