ALM : Quelle lecture faites-vous du bras de fer entre le PAM et le PJD ces dernières semaines ? Ahmed Bouz : D'une manière générale, la concurrence et la tension qui peuvent naître dans le discours d'un parti politique contre un autre s'inscrivent dans le cours normal de l'atmosphère accompagnant les préparatifs pour les élections. La tension entre le PJD et le PAM est donc tout à fait normale puisqu'elle s'inscrit dans le cadre des échauffements, si je puis dire, des deux formations pour les prochaines échéances électorales prévues en septembre. Cela dit, la reprise des hostilités entre les dirigeants des deux partis dans ce timing est un peu étrange parce qu'elle intervient juste après des déclarations lancées ici et là par les uns et les autres sur la possibilité d'une alliance pour l'avenir. Il est cependant difficile d'expliquer ce revirement de la part des deux formations qui ont chacune ses propres calculs et lectures de la scène politique et des enjeux pour les prochaines échéances. Peut-on dire que les prochaines élections vont principalement se jouer entre ces deux partis ? Il faut tout d'abord établir une distinction entre les prochaines élections communales prévues en septembre prochain et les Législatives de 2016. Il ne faut pas oublier que les échéances locales sont généralement moins politisées. Des considérations familiales, les réseaux et lobbies locaux l'emportent souvent face aux choix politiques et idéologiques. D'ailleurs, le PJD et le PAM ont scellé des alliances dans certaines villes après les élections de 2009, notamment à Casablanca, où ils appartiennent toujours à la même majorité. Les résultats des prochaines élections communales peuvent toutefois avoir une forte valeur symbolique. Car en cas de victoire du PJD, le parti la considérerait comme un signe de sa popularité intacte auprès des électeurs en dépit de sa participation au gouvernement. Si le PAM l'emporte, ce dernier se positionnera alors comme une alternative sérieuse et crédible au parti de la lampe. Quelles sont les chances d'une alliance entre les deux ? Ce scénario n'est pas sûr à 100% mais il reste plausible tout de même. Une alliance PAM-PJD est possible malgré tout pour plusieurs raisons. Il ne faut pas oublier que le PJD dirige le gouvernement aujourd'hui avec le RNI alors qu'ils étaient en confrontation en 2011. De même, le PJD s'attaque le plus souvent à un courant bien particulier au sein du PAM et non pas tout le parti. Pour preuve, Benkirane a insisté à plusieurs occasions sur ses relations amicales avec Bakkoury, l'actuel SG du parti, et son prédécesseur dans ce poste, Biadillah. Enfin, le PAM sait qu'il sera plus efficace au sein de la future majorité même si le PJD y est présent.