Cet ouvrage collectif publié cette semaine est en fait une série de réflexions marocaines après les événements des 7 et 11 janvier 2015 à Paris. «Ce qui nous somme, ici, n'est pas ce que nous sommes». Il faut ainsi comprendre : «ce qui nous met en demeure» ! «Ce qui nous somme», ce sont des raisons, des convictions, des visions, aussi différentes les unes des autres que le sont les auteurs qui ont écrit, chacun, comme on pense : seul, librement, tels André Azoulay, Abdesselam Aboudrar, Bouthaïna Azami, Abdellah Baïda, Tahar Ben Jelloun, Ali Benmakhlouf, Lamia Berrada, Driss C. Jaydane, Driss El Yazami, Melanie Frerichs-Cigli, Ahmed Ghayet, Nouzha Guessous, Adil Jazouli, Driss Ksikes, Rachid Khales, Asma Lamrabet, Valérie Morales-Attias, Bahaa Trabelsi…./… Comme dans bien des cas, le Maroc est le seul pays musulman où une telle publication a été initiée – grâce aux Editions La Croisée des Chemins – tout comme lors de l'attentat de Paris, le Maroc avait clairement pris position, condamnant avec fermeté cet acte barbare, présentant les condoléances de notre Pays à la France sans pour cela prendre part à la marche organisée, ne cautionnant pas les caricatures représentant le Prophète (PSL). D'un bout à l'autre la position du Maroc, son attitude ont été cohérentes et exemplaires. D'ailleurs sur le sol marocain même, des rassemblements dénonçant cet attentat ont été organisés unissant Marocains et Français et montrant là aussi ce que signifie «l'exception marocaine» dont il faut bien reconnaître qu'elle n'est pas un vain mot ! Ce livre «Ce qui nous somme» vient à point nommé, de par la diversité de ses auteurs : Marocains musulmans et juifs, Franco- Marocains, Français… de par la diversité des opinions et des positions qu'il renferme, de par les divergences même qui apparaissent entre les différents participants, cet ouvrage donne une image juste de notre société, des courants de pensée qui la traversent, de la pluralité qui est la nôtre ! Ce livre - j'en suis persuadé– est un élément important constitutif et représentatif de notre capacité à «vivre-ensemble». Capables d'exprimer une pluralité d'avis dans la pluralité de nos identités tout en nous inscrivant dans une même communauté de vie. Cela n'est pas donné à tout le monde et dans nombre de pays le «vivre-ensemble» est mis à mal : l'attentat de «Charlie Hebdo» a ainsi révélé au grand jour les lignes de fracture qui rongent la société française, pourtant le pire n'est jamais sûr et la France peut se saisir de ce drame pour œuvrer en profondeur contre la relégation territoriale et sociale, terreau du rejet de l'Autre, de la peur d'autrui, de la recherche du bouc émissaire qui enfantent des phénomènes tels que l'islamophobie, ici apparue au grand jour, mais souterraine depuis longtemps car mal ou pas soignée… Notre pays le Maroc quant à lui, même si protégé de par son héritage civilisationnel, culturel, historique, doit être vigilant, les démons de la xénophobie, du racisme, de la violence, du radicalisme… guettent notre jeunesse, la pédagogie d'un tel livre doit aussi se pratiquer, concrètement, sur le terrain, à l'école, dans les médias… pour immuniser notre société.