L'ouverture programmée de l'économie marocaine a le mérite de susciter une dynamique de mise à niveau globale aussi bien au niveau de l'Administration et des entreprises publiques qu'au niveau de tous les pans du secteur privé. Une analyse de la BMCE Capital en évalue l'impact. La quantification des impacts du libre-échange s'avère être un exercice extrêmement délicat étant donné que les modèles du commerce international ne peuvent prendre en considération les transformations du tissu productif, les changements de comportement des opérateurs économiques ou encore les effets exogènes générés par l'évolution de l'environnement international. Cependant, le travail fait par les équipes de la BMCE Capital donne une première analyse. Ce travail permet de faire ressortir les grandes lignes des conséquences de l'ouverture de l'économie marocaine. Sur le plan macroéconomique, l'effet positif sur la croissance demeure conditionné, à moyen et long termes, par la polarisation de capitaux étrangers importants et par la réussite de la mise à niveau de l'économie productive, précisément le tissu industriel. Selon les analystes de la BMCE Capital, ce potentiel serait probablement soutenu par le développement des échanges agricoles escompté par l'entrée en application de l'accord de libre-échange avec les Etats-Unis d'Amérique. Les effets compensatoires du déséquilibre des finances publiques exigent, pour leur part, que la croissance économique soit accompagnée d'un élargissement de l'assiette imposable, d'une modernisation de l'Administration des Impôts et de l'assainissement des dépenses budgétaires. Enfin, estiment les analystes, l'impact favorable du libre-échange sur le solde commercial reste conditionné par le renforcement des structures productives de l'économie marocaine orientées vers l'export. Quant aux opérateurs locaux, ceux-ci seraient confrontés à une forte concurrence de la part des pays d'Asie et ceux de l'Europe centrale et orientale, lesquels disposent de nombreux avantages comparatifs. Cette ouverture menace plus encore les secteurs dont la part des importations demeure limitée, le taux de protection tarifaire est élevé et le degré de compétitivité est faible. La spécialisation actuelle du Maroc risque de le desservir dans la compétition internationale à laquelle il aura à se mesurer. L'analyse de l'environnement concurrentiel dans lequel évoluent les opérateurs nationaux a permis de déceler les " créneaux d'activité " sur lesquels le Maroc est le plus susceptible de développer des avantages comparatifs : chimie et parachimie, conserves de fruits et de légumes, industries alimentaires diverses, produits de la pêche, textiles et bonneterie, habillement, cuir et chaussure, matériel électrique et électronique, matériel de transport, tourisme et services informatiques. La mise à niveau du tissu industriel s'avère dès lors nécessaire compte tenu des nouvelles donnes imposées par le libre-échange dans la perspective de renforcer la compétitivité de l'économie marocaine face à ses concurrentes européenne et américaine. Globalement, estime la BMCE Capital, bien que présentant plusieurs menaces pour l'économie marocaine, l'ouverture programmée de cette dernière a le mérite de susciter une dynamique de mise à niveau globale aussi bien au niveau de l'Administration et des entreprises publiques qu'au niveau de tous les pans du secteur privé. Les différents accords ne devraient cependant pas avoir la même portée ni les mêmes conséquences en raison de la différence de leurs contenus, de la nature des liens politiques avec les pays contractants et de l'importance des flux d'échange. Pour les conventions liant le Maroc aux pays arabes et africains, l'impact devrait être relativement limité, du fait de la faiblesse des échanges commerciaux et du manque de compétitivité globale de la plupart des entreprises des pays des deux régions. Pour sa part, le traité d'association avec l'Union européenne semble être en défaveur de la partie marocaine, et ce sur plusieurs points. En premier lieu, le volet agricole, point fort du Maroc, a été entièrement écarté lors des négociations. Ensuite, le démantèlement douanier pratiqué sur les produits industriels est plus à l'avantage des Européens qui se voient ouvrir, au plus tard à la fin de 2012 pour les secteurs les plus sensibles, les portes du marché marocain. À défaut de drainer un niveau élevé d'investissements productifs, plus du tiers des entreprises industrielles nationales se trouvent sérieusement menacées de disparition si elles ne procèdent pas à leurs mises à niveau globales. Certaines branches ayant fait l'objet d'une déprotection totale ont déjà fait les frais de l'entrée en vigueur de cet accord : électroménagers, ampoules électriques, sanitaires, etc. En revanche, les termes du protocole de libre -échange avec les États-Unis d'Amérique apparaissent avantageux pour l'ensemble de l'économie marocaine. Même le volet agricole a été négocié en faveur du Maroc. Plus généralement, ayant un accès quasi-illimité au marché américain, le Royaume chérifien a réussi à extirper de longs délais de grâce avant la levée des droits tarifaires sur les marchandises U.S. Toutefois, à l'évidence, les transactions commerciales entre les deux pays sont aujourd'hui faibles et les effets positifs de ce nouveau pacte ne devraient être ressentis qu'à moyen et long termes. Actuellement en manque de spécialisation, le Maroc tente de réaliser une pénétration graduelle dans les secteurs progressifs. Pour ce faire, il s'appuie sur ses atouts : main-d'œuvre bon marché, proximité de l'Europe, etc. Il est également conscient des lacunes à combler essentiellement au niveau de la formation, de la modernisation de son Administration et de sa Justice ainsi qu'au niveau du coût élevé des intrants énergétiques locaux. La capacité du Maroc à attirer les investissements étrangers dans ces nouveaux secteurs sera, à cet égard, certainement décisive.