ALM : Etes-vous pour ou contre l'abolition de la peine de mort ? Mohamed Othmani : Avant d'être député, je suis un militant associatif actif depuis les années 80. J'ai viré par la suite vers l'action syndicale puis politique. Donc j'ai toujours été en contact direct avec les citoyens de diverses couches. Et tout au long de mon parcours, je n'ai jamais rencontré un citoyen marocain, qu'importe son niveau social et intellectuel, qui soit pour l'abolition de la peine de mort. Il s'agit là d'une tendance populaire. Les gens vont même plus loin, en disant que l'arrêt de l'application de la peine de mort a eu pour conséquence l'augmentation du taux de criminalité au Maroc, en particulier les homicides. Je pense que l'abolition de la peine capitale incitera encore plus au crime. Quelle est la position du PJD concernant cette question ? A vrai dire je ne connais pas la position officielle du parti sur la question. Ceci est ma propre opinion et je le redis, je suis formellement contre l'abolition de la peine de mort et je pense qu'il faut que le Maroc remette en vigueur l'application de la peine de mort interrompue depuis 1993. Quels sont vos arguments ? La peine de mort a une portée dissuasive. C'est l'esprit même de la loi : sanctionner les individus qui dévient des principes de la société. Si la vie est la chose la plus précieuse que possède un homme, faut-il pour autant qu'on bafoue celle de la victime d'un meurtre aux dépens du droit à la vie d'un meurtrier ? Il me semble ainsi que l'abolition de la peine de mort viole le principe même de justice. C'est une incitation pour que les criminels prospèrent. L'appel à l'abolition de la peine de mort est un appel à l'impunité. Votre position s'appuie-t-elle sur une référence religieuse ? Je ne suis pas théologien. Mais d'après ma propre compréhension du texte coranique, les sanctions du talion « Qisas » dans la charia en général ont pour but de préserver la vie et la sécurité au sein de l'ensemble de la société. Et ce conformément à sourate Baqara, verset 79 selon laquelle : «C'est dans le talion que vous aurez la préservation de la vie, ô vous doués d'intelligence.» Mais si on récompense les criminels pour leur tuerie en leur laissant la vie, la société ne connaitra jamais la sécurité et la paix. Mais nous ne sommes pas pour autant à l'abri des erreurs judiciaires. Qu'en dites-vous ? Le « hudud » ( la sanction) dans l'islam n'est pas appliqué s'il y a le moindre petit doute sur la culpabilité d'une personne. Ainsi la peine de mort, et c'est connu, ne peut être appliquée qu'après épuisement de tous les recours, et une fois qu'aucune zone d'ombre ne subsiste. Et pour conclure, je dirais que ce débat pour l'abolition de la peine de mort est un débat artificiel. On fait diversion pour ne pas s'intéresser aux vrais soucis des marocains. Parce que ce n'est pas cette question qui pose problème dans notre société. Il serait plus judicieux de se pencher sur les vrais problèmes du pays : le développement, comment dynamiser notre économie afin que les jeunes chômeurs trouvent un travail, se réalisent et vivent décemment.