L'Agence judiciaire du Royaume (AJR) vient de rendre public son rapport 2011. Il en ressort que le nombre de dossiers introduits en justice en 2011 contre l'Etat et ses institutions (ministères, entreprises publiques...) a atteint 11.364 dossiers. «Sur les 11.364 nouvelles affaires reçues par l'AJR en 2011, près de 78% concernent l'Etat (ministères). Le reste des dossiers provient respectivement des établissements et entreprises publics avec 15% et des collectivités territoriales avec 7%», lit-on dans le rapport de l'AJR. Cette dernière nous apprend que les affaires relatives à l'expropriation et à la voie de fait arrivent en tête, suivies des affaires fiscales, puis des litiges concernant les accidents du travail, et enfin des litiges émanant de la responsabilité contractuelle et délictuelle de l'Etat. Ces litiges totalisent à eux seuls près de la moitié des nouvelles affaires reçues en 2011. S'agissant des affaires traitées effectivement par l'agence en 2011, leur nombre a atteint 18.240 affaires contre 16.441 en 2010. L'analyse des affaires traitées par type et par segment montre que certains départements génèrent un volume important de contentieux en raison de la taille de leur effectif et de la nature de leur activité. C'est le cas notamment des ministères des finances, de l'intérieur, de l'éducation nationale, de l'équipement et transport, de la gendarmerie royale et des eaux et forêts. A lui seul, le ministère des finances accapare plus de 40% des contentieux concernant l'administration publique. Il est suivi du ministère de l'intérieur avec plus de 16%. il faut préciser que plus que la moitié (54%) des affaires défendues par l'agence ont été gagnées alors que 46% ont obtenu des jugements défavorables. Néanmoins, ces indicateurs restent plus ou moins relatifs dans la mesure où ils cachent des disparités selon les catégories du contentieux. Dans ce sens, il est quasiment impossible de gagner une affaire de voie de fait dans la mesure où dans ce genre d'affaires la responsabilité de l'Etat est incontestablement engagée. En revanche, il existe des catégories de contentieux que l'AJR remporte quasi systématiquement tels que l'évacuation des logements administratifs. D'un point de vue plus global, les responsables de l'agence affirment que l'ensemble des types de contentieux traités ont stagné, voire même baissé en 2011. C'est le cas notamment des affaires concernant l'expropriation pour cause d'utilité publique et l'atteinte à la propriété privée ainsi que les accidents causés par les véhicules de l'Etat. Au total, la baisse a atteint 17,39%, soit 2.392 dossiers de moins par rapport à l'exercice 2010. Pour la direction de l'AJR, cette baisse s'explique en grande partie par les actions de sensibilisation à la prévention du risque juridique fourni par l'Agence au profit de l'ensemble de ses partenaires. Car en plus de sa mission principale qui est la défense judiciaire de l'Etat et de ses administrations, l'AJR tente de régler certains litiges par voie amiable. D'ailleurs, l'agence dispose d'une «division des études et des procédures amiables» qui se charge du règlement par voie amiable de certains dossiers litigieux. Prévention du risque juridique L'activité de prévention du risque juridique menée par l'AJR se décline en un ensemble d'actions de sensibilisation, de formation, de communication et de veille juridique. Sur le plan de la sensibilisation, l'agence organise et participe à des conférences portant sur différentes thématiques juridiques. Ces rencontres constituent des occasions pour débattre et défendre le point de vue de l'administration concernant un problème bien déterminé. Par ailleurs et vu l'expérience accumulée par l'agence en matière de traitement du contentieux, elle reçoit régulièrement des demandes d'avis et des consultations juridiques émanant de ses partenaires. L'AJR reçoit également des projets et propositions de lois pour y mettre son avis. La procédure de traitement des études consiste à faire un recensement et une analyse de la documentation en relation avec le sujet, notamment les textes juridiques, la jurisprudence et la doctrine afin d'orienter l'administration. L'étude des propositions des lois et des textes juridiques consiste à veiller au respect des règles d'élaboration des textes normatifs liés essentiellement au respect des normes de fond et de forme. A ce titre, plus d'une vingtaine d'études écrites ont été réalisées au titre de l'année 2011. Solutions alternatives Il semble que l'Etat se dirige plus vers le développement de moyens alternatifs pour régler l'ensemble des affaires du contentieux en raison de ses coûts multiples souvent évitables, en l'occurrence le coût direct occasionné par le traitement des dossiers de contentieux, le coût de l'exécution des décisions de justice matérialisé par le paiement des sommes correspondant à la condamnation et le coût lié au fonctionnement de la justice. Il faut préciser que l'article 4 du Dahir du 2 mars 1953 confère à l'AJR la possibilité de transiger avec les tiers pour régler un litige à l'amiable lorsque la responsabilité de l'Etat s'avère engagée, et ce après avis conforme du comité du contentieux. Ce comité est présidé par le ministre de l'économie et des finances ou son représentant (directeur des assurances et de la prévoyance sociale) et comprend outre l'AJR, les représentants de la direction du Budget, de la Trésorerie générale Royaume et du Secrétariat générale du Gouvernement, et des représentants des administrations concernées par les litiges. Plan d'action stratégique Le plan d'action stratégique (PAS) de l'Agence Judiciaire du Royaume découle des orientations générales du ministère de l'économie et des finances. Parmi celles qui concernent l'AJR, il figure en premier lieu la réduction du contentieux de l'Etat et le renforcement des actions concernant la récupération des débours de l'Etat afin d'assurer plus d'efficacité et d'efficience dans la gestion des deniers publics. Ainsi, dans le cadre du plan d'action stratégique de la direction, plusieurs actions de modernisation ont été engagées. Elles s'inscrivent toutes dans une logique de développement des prestations, selon une démarche constructive et pragmatique, portant principalement sur notamment la révision du cadre juridique de l'Agence judiciaire du Royaume, la restructuration interne des activités et leur décentralisation, le renforcement des effectifs et amélioration de leurs compétences professionnelles ainsi que la consolidation des activités de prévention et d'ouverture de l'institution sur son environnement.