Depuis le début de semaine jusqu'à jeudi prochain, la veille du référendum sur la nouvelle Constitution, les 13.000 salariés de Maroc Telecom se mettent en grève, en réaction à la «situation de cafouillage» qui règne au sein de la maison, déclare à Al Bayane, Khalil Ben Sami, secrétaire général du syndicat Maroc Telecom, affilié à la CDT, et principal négociateur au nom du Comité de coordination qui regroupe les représentants des syndicats FDT, UNTM, UMT et CDT. Ce débrayage, annoncé depuis plusieurs semaines déjà et reporté à plusieurs reprises, a pris le management de l'opérateur historique à revers. Jeudi dernier, la direction générale de l'opérateur historique, voulant probablement en découdre définitivement, a proposé une augmentation généralisée des salaires de l'ordre de 1.000 DH. Une proposition balayée d'un revers de la main par la coordination syndicale. Cette dernière, pour des raisons plutôt «électoralistes que syndicales», -selon la formule d'un représentant de la direction de la communication au sein de Maroc Telecom- est traversée par plusieurs courants et refuse de répondre favorablement à l'appel au dialogue lancé par la Direction générale. Maroc Telecom serait-il alors dans l'impasse ? Apparemment oui ! Le dialogue entre les deux parties risque, comme on l'a vu pas si loin chez sa consœur Barid Al Maghrib, de prendre des tournures conflictuelles, en raison notamment de la divergence de fond et la contestation des solutions proposées par le top management. Les syndicats estiment fort insuffisante l'augmentation des salaires de 1.000 DH et exigent une participation significative aux bénéfices et une réduction sensible des écarts de salaires. Bref, les représentants syndicaux, qui semblent accrochés aux acquis que leur confère l'article 6 du statut ONPT, veulent une «amélioration des revenus des salariés, via l'avancement systématique et le changement de catégorie par l'ancienneté», nous précise M. Ben Sami. Pour sa part, la direction générale de l'opérateur historique, privilégiant le dialogue, s'interroge : «pourquoi les syndicats refusent de venir à la table des négociations ?» Ce mouvement de débrayage, dans le contexte d'aujourd'hui, est mal venu, d'autant plus que son impact, en ce moment de pic de l'activité (période estivale) risque de se ressentir au niveau des comptes de la compagnie. Tous les salariés du Groupe Maroc Telecom bénéficient d'une prime d'objectifs, payée en février –qui peut aller jusqu'à trois mois de salaires, en fonction des notations- en plus du 13ème mois, explique l'attaché de presse du Groupe IAM. Dialogue de sourds ou myopie partagée ? Au fond, la confusion est totale et la négociation pour l'élaboration et la conclusion d'une nouvelle convention est, sans nul doute, une urgence. Les syndicats, regroupés au sein de la coordination, virevoltent non pas exclusivement pour défendre les intérêts de leurs adhérents, mais surtout pour être dans l'air du temps, celui du mimétisme. Ce débrayage se justifie, si l'on en croit la direction générale, par des luttes d'influence et de grabuge entre différents syndicats au sein du Groupe. C'est dire que la réforme, dont il est question, risque de mettre du temps. Non, rétorque Ben Sami : «nous avons mis en place une charte syndicale pour mener une éventuelle négociation collective». Reste à savoir si le top management du Groupe IAM est disposé à mener une «réelle réforme». Le Groupe, qui réalise pas moins de 10 milliards DH de bénéfices annuellement, grâce au labeur et à la sueur de ses salariés, fait de son mieux pour préserver son image de marque d'entreprises performante. Or, au plan social, Maroc Telecom, aux yeux de M. Ben Sami, demeure l'une des entreprises marocaines où règnent encore «l'iniquité sociale et la situation de rente salariale». Ce qui la rend, d'après les syndicats, «moins légitime et fort contestable» en ces temps de printemps arabe et de réforme au royaume.