Parmi les méditations philosophiques les plus fécondes ayant été dédiées à la question de la foi, celle qu'avait profondément pensée le philosophe Danois Soren Kierkegaard afin de déterminer la quintessence du paradigme religieux, demeure d'une actualité brulante. Kierkegaard avait fait du sacrifice d'Abraham le paradigme et le cœur même de l'attitude religieuse qui épouse la croyance et abolit la violence, en effet, c'est par la foi qu'on ressemble à Abraham et non par le meurtre. Dans son célèbre essai intitulé «Crainte et Tremblement», le philosophe s'interroge sur le rapport de l'amour et de la foi en admettant que si l'amour trouve ses prêtres chez les poètes et que l'on entend parfois une voix qui sait le chanter, la foi par contre n'a pas de chantre et nul ne peut prétendre parler exclusivement à la louange de cette passion. Le philosophe conclut par soutenir que la félicité que procure la croyance en l'infini aussi bien que le bonheur terrestre n'ont qu'un seul ressort qui se rapporte à la foi comme étant accomplissement de l'être. Comme bien avons-nous besoin aujourd'hui de méditer sur cette pensée ayant mis à l'œuvre conjointement les lumières de la raison et la ferveur du cœur ? A l'heure où les crimes les plus odieux se commettent au nom de la foi et au moment où l'esprit de la tolérance devient la cible même de toutes les formes de la croyance aveugle, il serait utile de rappeler que l'un des premiers commandements divins, celui qui proscrit le meurtre, figure en premier lieu. Avons-nous besoin de rappeler aussi que les trois religions monothéistes ont mis la vie humaine au cœur du sacré que nul ne peut y porter atteinte sans qu'il se mette au ban de l'humanité et ne peut même pas accéder au rang de l'animalité qui ignore la haine aveugle et la monstruosité gratuite. Rappelons à cet égard que la frontière infranchissable entre la civilisation et la barbarie porte la marque de la violence et se dessine par le tracé noir de l'intolérance. Et pourtant, depuis la nuit des temps jusqu'à nos jours, le combat de l'homme contre les forces occultes qui se nourrissent des instincts les plus primaires a triomphé faisant reculer au cours de l'histoire le spectre de l'ignorance et les affres de la violence. C'est ce combat auquel le Maroc est confronté aujourd'hui et qui devrait être mené sous l'égide des nobles valeurs qui visent le Bien et le Beau, s'épanouissent dans le cadre de la liberté et se nourrissent des principes de la raison éclairée et de l'amour de cette terre accueillante et généreuse. Quels que soient les commanditaires du crime abject qui, désespérément, ont voulu assombrir le beau visage de la cité ocre et millénaire, leur acte portera honteusement le signe de la lâcheté et leurs mains criminelles porteront pour toujours le sang sacré des victimes innocentes comme étant la terrible preuve de leur crime immonde devant la justice céleste et celle des hommes. En souvenir de toutes celles et tous ceux qui ont payé de leur vie face à la terreur aveugle et en mémoire de l'enfance qui n'a pas été épargnée par la haine, la puissance de la vie devrait s'affirmer davantage afin de parsemer le sentiment de la joie vitale lequel quelle que soit la gravité du drame, il défie la mort et célèbre le magnifique astre de la vie. Il se pourrait que ce n'est qu'un hasard que le cite qui fut lâchement frappé porte le nom de l'Argana, mais cette appellation porte le sot de cet arbre mythique qu'est l'arganier symbole de don mais aussi d'extrême résistance à tous les dangers. Ainsi le Maroc, pays de générosité légendaire qui a su faire face le long de l'histoire à toutes les adversités avec fierté et dignité.