Pour 2011, le budget de la caisse de compensation est de 32 milliards de dirhams. Une partie de ce montant est utilisée pour subventionner les 10,3 millions de quintaux de farine « nationale » de blé tendre sachant que le prix réel du blé tendre importé est de 485 DH le quintal alors que le prix du blé tendre national coûte 300 DH. Depuis 2006, l'achat des 12 millions de quintaux de blé tendre destinés à la fabrication de la farine nationale se fait au moyen d'appels d'offres lancés de temps à autre par l'ONICL (Office National Interprofessionnel des Céréales et Légumineuses). Ceci a mis les Coopératives Agricoles Marocaines (CAM) en compétition avec d'autres organismes stockeurs pour approvisionner les minoteries. A l'annonce de ce nouveau système en Mai 2006, les CAM avaient tiré la sonnette d'alarme que personne n'entendait. A cette époque, la fédération nationale du secteur agricole (FNSA-UMT) ainsi que l'Union Nationale des CAM montaient au créneau et le problème a été débattu au sein du parlement et de la deuxième chambre. Après le sit-in organisé par la FNSA-UMT, le Ministère de l'Agriculture accordait aux CAM 23% des quantités de céréales demandées par les minoteries à travers les appels d'offres. Mais cette solution n'a pas duré longtemps puisqu'elle a été supprimée dès le deuxième appel d'offres. Et depuis, le système des appels d'offre est annuellement amendé en introduisant à chaque fois de nouvelles règles qui fragilisent davantage les CAM. Selon Hassan Kadiri, Secrétaire Général du Syndicat National du Personnel des CAM (UMT), le système des appels d'offres instauré par l'ONICL depuis 2006 désavantage les CAM et risque de les conduire à la faillite et au licenciement du personnel estimé à 1200 familles. Les minotiers préfèrent un blé tendre importé à 485 DH/quintal En 2011, c'est le coup de grâce. Cette fois, c'est le blé tendre importé dopé par les subventions de l'Etat qui rentre en compétition et écrase le blé tendre national. Lors des appels d'offres, les prix offerts par les CAM pour le blé tendre national sont aux alentours de 300 DH/quintal (280 DH/ql + 20 DH/ql comme montant des charges supportés par l'état). Par contre, ceux du blé tendre importé sont aux alentours de 485 DH/quintal (250 DH/ql + montant des charges supportés par l'état c'est-à-dire 150 DH/ql comme droit de douanes supprimés + 85 DH/ql comme prime de restitution). Si on intègre toutes les composantes du coût, il apparaît clairement que l'offre la plus avantageuse pour l'Etat est de loin l'offre relative au blé tendre national. Le blé tendre national coûterait donc à l'Etat 300 DH/ql, alors que le blé tendre importé coûte actuellement 485 DH/ql, sans oublier la composante devise. La farine nationale n'a rien de nationale Il est inconcevable de voir les minoteries produire la farine « nationale » du blé tendre à partir du blé importé. Ceci pose un problème de commercialisation de blé tendre national et par voie de conséquence une contrainte au développement de la filière céréalière au Maroc, notamment au projet d'agrégation initié par les CAM. Par ailleurs, l'article 23 de la loi 12/94 stipule que l'administration fixe pour chaque campagne les conditions d'achat, de vente et d'utilisation du blé tendre destiné à la fabrication de la farine subventionnée par l'Etat. Or, l'objectif de cet article est d'utiliser le blé tendre national en priorité afin d'assurer le développement de cette filière.