Le penseur et épistémologue marocain M. Mohamed Ouakidi a souligné, mardi, l'importance de la prise en considération des données ethnologiques et anthropologiques pour comprendre la pensée du philosophe et chercheur franco-algérien feu Mohamed Arkoun, et ce à travers les points d'éclairage que peuvent apporter son origine et son lieu de naissance, en région kabyle, pour l'analyse de ses écrits. Intervenant lors de la journée d'études organisée, mardi à Rabat, par la commission nationale marocaine pour l'éducation, les sciences et la culture autour du thème central: «Mohamed Arkoun et la stratégie critique de lecture du patrimoine», le chercheur a estimé que «le lieu de naissance qui renvoie à l'origine est un élément constant non susceptible de changement», ajoutant que ce monde est marqué par la culture amazighe orale qui s'est enracinée dans l'esprit du penseur Mohamed Arkoun et dans son «subconscient», contribuant à façonner sa pensée et ses positions sur les questions des sociétés musulmanes. Traitant de cette problématique dans un exposé intitulé «Mohamed Arkoun entre deux questions, deux cultures», M. Mohamed Ouakidi a insisté sur l'analyse du concept de «l'être connaisseur» cher à Arkoun, partant de l'acception globale de l'analyse dans ses dimensions psychique, sociale et historique, ce qui permet de saisir la pensée générale du penseur Mohamed Arkoun dans le cadre de l'interaction sociale et des progrès de la connaissance. Le penseur et épistémologue marocain a, également, affirmé que le penseur Mohamed Arkoun était un vecteur de la pensée musulmane d'une part, et de la pensée occidentale d'autre part, ne pouvant sacrifier aucun des deux affluents de sa pensée». Mohamed Arkoun «savait qu'il appartenait aux deux cultures musulmane et occidentale sans pour autant perdre la prise de conscience critique de toutes les composantes des deux cultures. Aussi, sa critique visait les deux cultures. M. Mohamed Ouakidi a observé que la pensée de Mohamed Arkoun subissait aussi l'influence des langues arabe et française, mais aussi d'autres langues telles l'anglais et l'allemand. Il avait aussi cultivé le discours du savant qui se plaçait aux confins du terrain politique, mais tout en se refusant aux conditions de sa pratique, préférant la recherche scientifique et les préoccupations académiques. Le penseur et épistémologue marocain a affirmé que l'effort intellectuel de Mohamed Arkoun s'est focalisé sur la pensée musulmane au Moyen âge et la pensée musulmane contemporaine. Pour sa part, le professeur Abdelmajid khaliki a présenté un exposé intitulé «les sciences islamiques appliquées, les missions de l'esprit d'exploration de Mohamed Arkoun», soulignant que la définition des sciences islamiques appliquées, selon Mohamed Arkoun, est basée sur «des contenus scientifiques multidisciplinaires, différents des sciences islamiques classiques puisqu'elles adoptent une méthodologie fondée sur l'analyse anthropologique, l'étude comparée des religions, l'anthropologie sociale, historique ...etc...». Le professeur Abdelmajid khaliki a précisé que la méthodologie des sciences islamiques appliquées est basée, selon Mohamed Arkoun, sur l'analyse critique et l'expérimentation pour sonder le patrimoine et le mettre en rapport avec la modernité. De son côté, le professeur Mohamed Al Andaloussi a fait un exposé intitulé «les principes théoriques et les mécanismes méthodiques servant à la lecture du texte coranique par Mohamed Arkoun», estimant que «la lecture critique de Mohamed Arkoun du texte coranique est fondée sur les principes du séquençage des acquis consacrés dans les commentaires traditionnels dogmatiques. Mohamed Arkoun a mis l'accent sur la dimension symbolique et métaphorique de la langue du Coran mise en phase avec le discours humain, a-t-il poursuivi, évoquant l'aspect transcendantal dans la langue du Coran mais aussi sa dimension contextuelle, perçue d'ailleurs dans les trois livres révélés: la Bible, l'Evangile et le Coran. Mohamed Arkoun avait recours à plusieurs mécanismes méthodologiques, notamment l'analyse linguistique, sémiotique, la critique historique, l'approche anthropologique, mais il a mis en avant la méthodologie linguistique-sémiotique parce qu'elle a contribué à passer au crible le discours sémiotique auquel les commentaires traditionnels ont soumis les versets coraniques, a estimé le professeur Mohamed Al Andaloussi. La journée d'étude a été organisée, en collaboration avec la Faculté des lettres et des sciences humaines de l'université Mohammed V û Agdal de Rabat, en partenariat avec le bureau de l'organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) à Rabat, à l'occasion de la journée mondiale de la philosophie avec la participation d'une pléiade d'universitaires et de chercheurs.