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Le Maroc des régions : chaouia - ouardigha : Settat : chef lieu
Publié dans Albayane le 05 - 09 - 2010

Le mois sacré du Ramadan est toujours l'occasion pour toutes les publications, indépendamment de leur périodicité, de se mettre au goût de cette période propice au recueillement et à la spiritualité. La lecture est généralement l'activité la plus prisée.
Dans ce sens, nous avons choisi de faire un voyage à travers l'histoire des régions du Royaume en dressant le profil à travers le temps d'un certain nombre de villes marocaines. L'histoire du Maroc qui remonte à plus de douze siècles se révèle être l'une des plus riches et des plus fécondes que l'humanité ait connues. Nous commencerons durant ce mois sacré par le circuit des villes impériales en évoquant certaines de leurs particularités historiques, architecturales et urbanistiques. Il en sera ainsi des principales étapes qui ont marqué l'itinéraire à travers le temps des villes des seize régions du royaume.
La Province de Settat faisait, jadis, partie du grand territoire compris entre l'Oued Bou Regreg et l'Oum Rbiä et dénommée Tamesna ou « Terre plate ». Léon l'Africain en parlait comme la fleur de cette région d'Afrique du Nord.
L'histoire atteste de la présence, dans cette région, de l'élément arabe à la fin du Xllème siècle avec l'arrivée des tribus des Bani Hilal et des Bani Soulaïm. Ce sont les Almohades qui les firent venir de Tunisie pendant la Conquête d'Espagne.
D'autres populations arabes et amazighes (Zénètes, surtout) furent installées par les Mérinides (entre le Xlllème et le XIVème siècle) entraînant de profondes mutations ethniques. Le Tamesna changea d'appellation pour devenir la Chaouïa (du nom de chaoui, littéralement éleveur de chate, c'est à dire moutons).
Selon Ibn Khaldoun, les Chaouis étaient des nomades semi-sédentaires à économie diversifiée. Ils ont joué un rôle d'intermédiaire entre les nomades bédouins chameliers et les citadins. Ce n'est qu'avec l'avènement de Moulay Ismaïl que la région allait connaître la stabilité nécessaire à la sédentarisation.
En choisissant de construire la Kasbah sur le site vallonné de Settat, Moulay Ismaïl allait déclencher le processus d'urbanisation de ce site. L'édification de la Kasbah a apporté ordre et sécurité aussi bien aux voyageurs qu'aux habitants et favorisé les implantations humaines de ses abords. Plus encore, en y installant le premier Caïd de cette région qui dépendait auparavant de Caïd Doukkali et Rahmani, Moulay Ismaïl va officialiser Settat comme chef lieu de cette région.
Vu sa situation stratégique, en tant que passage incontournable entre le Sud et le Nord, et grâce à la richesse des sols de son arrière pays, la ville de Settat a constitué durant les 18 et 19ème siècles un important centre de négoce des produits agricoles attirant des populations entreprenantes comme les autres Marocains de confession juive qui y ont construit au 19ème siècle leur propre quartier, le Mellah, aux abords de la Kasbah.
Ce développement a été perturbé au début du siècle par la colonisation, à laquelle s'opposèrent farouchement les tribus de la Chaouïa ralliées au Sultan Moulay Hafid.
Sous le protectorat français, la ville de Settat a connu un développement urbain sans précédent et renoué ainsi avec son passé commercial. Cette prospérité a duré jusqu'au début des années cinquante où, sous l'effet du développement de Casablanca, des voies de communication et des moyens de transports, Settat est entrée dans une période de semi-léthargie. En vue de faire face à cette situation, les pouvoirs publics ont alors décidé de la création de la Province de Settat en 1967.
Les habitants de Settat, les Berghwatas, étaient issus de la puissante confédération des Masmouda qui, d'après André Adam, constituait le fond le plus ancien et le plus nombreux des populations de Tamasna. Ces populations étaient manifestement fortement sédentarisées. Léon l'Africain et Ibn Khaldoun ont tous les deux évoqué 40 villes et 180 villages que comptait cette région.
Les principales tribus qui composent actuellement la population de la Province de Settat sont : Ouled saïd ; M'zamza ; M'dakra ; Ouled Hriz ; M'zab ; Ouled Sidi Ben Daoud ; Ouled Bouziri ; Ouled Ziane ; Bni Meskine.
Sites archéologiques
Bassins des Oulad Abdoun et des Gantour à Khouribga
La zone de Khouribga, située à 120 Km au sud-est de Casablanca, fait partie bassin des Oulad Abdoun qui est le plus ancien des gisements exploités de phosphates au Maroc. Les gisements du Maroc (Bassins des Oulad Abdoun et des Gantour), outre leur grand intérêt économique, recèlent l'une des plus riches faunes de vertébrés fossiles connues à la fin du Crétacé et au début du Tertiaire (environ 46 à 70 millions d'années).
L'abondance et la diversité exceptionnelles des vertébrés dans ces sites en font une des références majeures sur l'histoire de la biodiversité au cours de cette période.
Les fossiles des phosphates racontent une histoire longue de 25 millions d'années, mais parlent aussi de l'une des plus grandes crises biologiques qui a marqué l'histoire de la vie sur Terre, la crise Crétacé-Tertiaire qui a vu, entre autre, la disparition des dinosaures et des grands reptiles marins et l'explosion évolutive des mammifères et des oiseaux.
Les recherches de terrain menées dans le cadre d'une première convention franco-marocaine ont abouti à la mise à jour d'un nouveau matériel fossile très important et inédit (nouvelles espèces).
Des découvertes fondamentales ont été faites pour divers groupes, mammifères, oiseaux, ptérosaures, dinosaures, et reptiles marins, pour les plus spectaculaires.
Le nouveau matériel fossile mis au jour a non seulement un grand intérêt scientifique, mais également un intérêt grand public avec la découverte de spécimens spectaculaires de reptiles géants, et notamment de crocodiles et de mosasaures, dont certains dépassent 10 mètres de long.
Le Musée « Mine verte », qui s'inscrit dans le cadre de l'encouragement du tourisme scientifique, a pour but de retracer l'histoire de l'exploitation du phosphate au niveau de la région, l'histoire de l'évolution de la ville de Khouribga, ainsi que 30 millions d'années d'histoire paléontologique dans les bassins des phosphates.
Le Musée tend également à présenter les progrès de l'exploitation des phosphates dans un contexte de développement durable. Il se compose d'une galerie souterraine, ainsi que d'une tranchée témoin pour la visualisation de la stratigraphie du bassin minier et des divers stades de l'exploitation du phosphate.
Grotte de Kehf-el-Baroud à Benslimane
Benslimane dispose d'importants vestiges archéologiques. En effet, la grotte de Kehf-el-Baroud se situe à quelques dix kilomètres au Nord-est de la ville de Ben Slimane (province de Ben Slimane, commune de Ziaïda). Elle tire son nom du massif récifal qu'elle perce. Celui-ci émerge des formations paléozoïques schisteuses à relief amolli. L'Oued Cherrat, que la grotte domine, suit son cours entre le massif de Kehf-el Baroud et celui qui fait face, appelé Sokhrat Echelh.
Le site est constitué de deux salles qui communiquent entre elles par une petite galerie. La première, dont l'accès s'ouvre largement en surplomb sur l'Oued Cherrat vers l'Est, mesure 26 m de long sur 7 m de large à l'entrée. La deuxième salle, appelée Aven Bleton, possède un sol en pente montant jusqu'à l'entrée actuelle qui donne directement sur le haut du massif. De la première salle son accès est possible par d'énormes blocs et du sédiment qui renferme des vestiges archéologiques déposés de façon perturbée.
Dans l'attente des résultats de l'étude géologique en cours, Abdeslam Mikdad, Institut National des Sciences de l'Archéologie et du Patrimoine, suggère que le remplissage de l'Aven est la conséquence d'un lessivage causé par des fortes précipitations qui ont entrainé dans leur cour les témoins d'une occupation humaine du haut du massif.
Ce dernier garde encore des traces qui appuient cette hypothèse.
Grâce à l'intervention d'un groupe de chercheurs marocains de l'Institut National des Sciences de l'Archéologie et du Patrimoine, la sauvegarde du site a été assurée donnant suite à des campagnes de fouilles systématiques.
La Kasbah de Boulaouane
La Kasbah a été construite par Moulay Ismaïl vers 1710 pour avoir une vue dominante sur toute la région. La Kasbah est stratégique par son emplacement sur ce point équidistant des principales tribus des plaines du centre.
A présent, la forteresse est en ruine. L'enseigne, gravée en 1710, évoque le nom du glorieux bâtisseur et cite, en dessous, un certain Belkhayat qui fut, semble-t-il, un Pacha, représentant du monarque et gestionnaire de la forteresse. En bas, à gauche, une mosquée affiche l'esquisse d'une restauration inachevée. Seuls le minaret a échappé à cette altération. Tout près, repose, dans un petit mausolée, un personnage vénéré dont on ignore le rang et l'identité. A droite, on peut admirer les vestiges d'une architecture très raffinée.
La Kasbah de Boulaouane, l'une des plus prestigieuses des soixante seize forteresses ismailiennes, a contribué à l'instauration de la sérénité dans un pays jadis déchiré par les dissidences et les rebellions. Grâce à cet édifice, une femme pouvait, en ces temps, voyager seule d'Oujda jusqu'à Oued Noun.
Historique
Le territoire des Chaouïa - appelé jadis le Tamesna - était peuplé par des tribus de haute lignée, promptes à défendre les valeurs de la nation. Le nom de Chaouïa signifie pâtre de moutons. Les Chaouïa ne sont pas des nomades, au sens africain du terme, mais sont plutôt des transhumants. Ils vivaient sous la tente, celle des Zenatas et des Arabes, tissée de laine noire ou brune, en longues bandes cousues ensemble, appelée lflij.
Les Chaouïa de Tamesna seraient originaires des Monts Aurès. Le premier à avoir employé le terme de Chaouïa fut Luis del Mármol au XVIème siècle. Il l'applique aux Zenata et aux Haouara rétablis par les Mérinides dans la province de Tamesna, d'où les Almoravides les avaient chassés, en récompense des services qu'ils avaient rendus à la nouvelle dynastie. A titre de rappel, la tribu des Zenata établie sur la Chaouïa est une fraction de la grande tribu berbère des Zenata qui pénétrèrent sans doute au Maroc avec les Almoravides. Les Zenata étaient déjà installés dans le pays. Le géographe Charif Idrissi en parle dans son itinéraire de Marrakech à Salé. Ils furent refoulés par les Oulad Ziyan qui les poussèrent jusqu'en bord de mer.
Après le débarquement des troupes françaises à Casablanca, en 1907, ils furent les premiers à se soumettre. Sur le territoire des Zenata, se trouvent deux kasbah historiques : celle de Mansouria décrite par Léon l'Africain et Marmol au 14ème siècle et celle de Fédala. L'avènement des Mérinides fera de la Tamesna un lieu de pâturage. Ils confièrent, en effet, de nombreux troupeaux à des tribus arabes ramenées de Tunisie et des Aurès (en Algérie) pour peupler ce pays et servir dans les guerres en Espagne.Les Arabes introduits au Tamesna appartenaient aux groupes des Jochem et des Attbaj. Ce sont les Asem, les Moukaddem, Kholt, Sofiane et les Beni Jaber. Dans la bataille de Rio Salado du 30 Août 1340 (région de Tarifa en Espagne), qui s'est soldée par la victoire des rois chrétiens, le Sultan Mérinide Abou Hassan Ali vit tomber autour de lui ses meilleurs guerriers et un de ses fils être fait prisonnier. Au cours de cette bataille, périrent aussi tous les gens nobles et distingués d'Anfa.
A partir de cette date, s'est formée une flotte de corsaires basés à Anfa, soutenus par les Mérinides qui firent probablement appel au concours de navigateurs aguerris pour former les gens d'Anfa et de la Chaouïa. Parmi eux se trouvait le tunisien, Sidi Allal el Kerouani, navigateur émérite, qui subjugua les gens de la mer par ses vastes connaissances. Les fils d'Ibn El Khatib, périrent lors de la catastrophe de Rio Salado, aux cotés des Chaouïa. Ibn El Khatib entretenait de bons rapports avec les gens d'Anfa. Rodrigo de Zayas le décrit ainsi : Le vizir Lisan al-Din Ibn-al-Khatib fut l'un des plus grands auteurs littéraires de la civilisation hispano-musulmane, et sans doute le dernier de cette envergure, naquit à Loja, près de Grenade, le 14 novembre 1313 et mourut à Fès en 1374. Il fut connu sous le sobriquet de Dhu al-Wizaratayn» (détenteur des deux vizirats, c'est à dire la plume et l'épée). Lors de la reconstruction de la ville d'Anfa par le Sultan Sidi Mohammed Ben Abdellah au milieu du 18ème siècle, les Chaouia formaient les groupes suivants : le groupe des Chehaouna qui se compose des Médiouna, Ouled Ziyyan, Ziyayda et Benniyoura ; le groupe des Ouled Bou Rezg (Bourezguiyyine) qui se compose des Oulad Said, Lemzamza, Ouled El Bouzir, Ouled Sidi Ben Daoud ; le groupe des Ouled Bou Aateyya, dont faisait partie les Ouled Hariz, les M'dakra et Ouled Ali ; le groupe des M'Zab, avec les Ouled M'rah, Laàchach et Mlal ; les Zenata. La technique de combat adoptée par les tribus de la Chaouia est une technique de cavaliers par excellence. Elle est très connue dans l'Espagne du XIVème siècle. Les soldats marocains du corps d'armée de Grenade adoptaient la « Torna Fuye », qui serait la traduction littérale du mot arabe « al kar wa lfar », pour amorcer les engagements militaires. Cette technique dite aussi « Zenatia » consiste à envoyer un léger corps de cavaliers qui s'approchent des rangs ennemis à toute vitesse, tout en tournant avec dextérité sur leurs montures, tirant sur des cibles de commandement pour susciter la réaction de l'adversaire. Leur unique moyen d'action est le feu et leur principale qualité est la mobilité.


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