Nabil El Bousaadi Le moins que l'on puisse après le résultat obtenu par le parti « Alternative pour l'Allemagne » (AfD), extrême-droite, à l'issu des deux élections régionales qui se sont déroulées, ce dimanche 1er Septembre 2024, dans l'est de l'Allemagne, c'est que la situation est inédite voire même historique. C'est, en effet, la première fois, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, que l'AfD a obtenu la première place en Thuringe en recueillant 33% des suffrages exprimés et qu'en Saxe, en obtenant un peu plus de 31,4% des voix, cette formation politique n'a été devancée que d'une très courte tête, par les Chrétiens-démocrates de la CDU qui en ont recueilli 31,7%. Avec ces résultats, la Saxe et la Thuringe confirment donc leur statut de bastions électoraux de l'AfD, dans un contexte politique particulièrement tendu, puisque ces élections ont eu lieu une semaine à peine après le triple meurtre au couteau, à Solingen, qui avait été imputé à un Syrien et qui avait bouleversé le pays tout en relançant le débat sur l'immigration. Mais en estimant que bien qu'elle pourfende la politique d'accueil des réfugiés et qu'elle a été mise en cause pour ses liens avec le Kremlin, l'AfD a, désormais, obtenu un « mandat clair pour gouverner », Tino Chrupalla, qui co-dirige le parti au niveau national, s'est, immédiatement, dit « prêt à parler avec tous les partis » pour trouver une majorité absolue. Aussi, ces résultats sont-ils une réelle catastrophe pour le gouvernement tripartite du chancelier social-démocrate Olaf Scholz du moment que la coalition SPD, Verts et FDP cumule, désormais, à peine un peu plus de 10% des voix. En outre, après l'avoir mise dans l'incapacité de juguler la hausse des prix et de freiner l'immigration illégale et l'insécurité, ses « contradictions internes » ont profité à l'Alliance « Sahra Wagenknecht », extrême-gauche, un mouvement fondé au début de cette année par une ancienne dirigeante du parti de gauche « Die Linke », qui, tout en étant progressiste sur les questions sociales et conservatrice sur les sujets sociétaux, réclame, à l'instar de l'AfD, un arrêt des livraisons d'armes à l'Ukraine et un rapprochement avec la Russie. Autant dire qu'après son échec aux élections européennes, la coalition d'Olaf Scholz a essuyé un cuisant revers car après que l'extrême-droite allemande soit devenue le premier parti en Thuringe et qu'elle talonne, désormais, les conservateurs en Saxe, « Sahra Wagenknecht », le parti d'extrême-gauche pro-russe et anti-immigrés a fait une percée spectaculaire. Ainsi, bien que la Saxe et la Thuringe n'abritent que 6 millions d'habitants, soit 7% de la population allemande, il n'y a pas lieu de relativiser l'importance des résultats de ce dimanche ; d'une part, parce que l'extrême-droite est, également, en plein essor dans l'ouest de l'Allemagne et, d'autre part, parce que les fédérations de l'AfD en Saxe et en Thuringe figurent parmi les plus radicales du pays. A signaler, également, que, bien que Björn Höcke, l'homme fort qui dirige l'AfD en Thuringe ait été condamné, à deux reprises pour avoir lancé, en public, le slogan des SA hitlériennes et que son parti est, désormais, « sous surveillance » de l'Office fédéral de protection de la Constitution qui est le service chargé du renseignement, l'extrême-droite est quad même parvenue à conquérir un tiers des électeurs. Sachant, enfin, que bien qu'elle constitue une première en Allemagne, la victoire de l'AfD ne signifie, en aucun cas, qu'elle va prendre les rênes de la Thuringe du moment que, pour l'heure, toutes les autres formations constituant l'échiquier politique allemand refusent toute alliance avec elle, attendons pour voir...