Nabil El Bousaadi Bien que du temps de l'ancienne Union Soviétique, Washington et Moscou avaient signé, en 1987, un Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) – donc, d'une portée allant de 500 à 5 500 km – et qu'elles avaient fini par le rompre, en 2019, après s'être accusées, mutuellement, de ne pas en respecter les dispositions, la Russie s'était unilatéralement engagée à ne pas relancer la production de ce type de missiles tant que les Etats-Unis n'en déploieront pas à l'étranger. Mais en voyant que Washington et Berlin ont fait part, ces dernières semaines, de leur intention de « débuter des déploiements épisodiques de capacités de feu à longue portée, en 2026 » et évoqué l'utilisation des missiles SM-6 et Tomahawk, donc de déployer des missiles sur le sol européen, la Russie en a profité pour se libérer du moratoire qu'elle s'était elle-même fixé à propos du «déploiement de capacités de frappe à moyenne et courte portée». Aussi, dans un discours qu'il prononcé la semaine dernière, à l'occasion de la parade navale annuelle de la flotte russe à Saint-Pétersbourg, à laquelle ont également participé cette année des navires chinois, indien et algérien, le président russe, déplorant que « d'importants sites russes de l'administration de l'Etat et de l'armée vont se trouver à portée de ces missiles » qui, s'ils venaient « à l'avenir, à être équipés d'ogives nucléaires », ne mettront pas plus de dix minutes pour atteindre le territoire russe, a annoncé que la Russie va développer la production d'un «certain nombre de systèmes de ce type». En rappelant, par ailleurs, que le Kremlin, qui avait déjà averti que les capitales européennes deviendraient des cibles légitimes pour la Russie en cas de déploiement de missiles américains sur le vieux continent, avait ordonné, en mai dernier, à l'armée de se préparer à «l'utilisation d'armes nucléaires non-stratégiques» – moins dangereuses mais très dévastatrices – le Président Poutine a déploré «une situation (qui) rappelle les événements de la Guerre froide liés au déploiement des missiles américains de moyenne portée Pershing en Europe». En effet, pendant la crise dite des « Euromissiles » à laquelle avait donné lieu le déploiement, en 1977, en URSS, de missiles SS-20 menaçant directement l'Europe occidentale, l'OTAN avait riposté, en 1979, en installant des missiles Pershing II en Allemagne de l'Ouest. Mais l'assassinat, mercredi dernier, par Israël, du leader du Hamas, Ismaïl Haniyeh, sur le sol iranien et celui du chef Militaire du Hezbollah libanais, Fouad Choukr, dans une attaque lancée le lendemain près de Beyrouth, sont des évènements qui vont, incontestablement, raviver les tensions au Proche-Orient entre, d'un côté, Israël et, de l'autre, l'Iran ainsi que la multitude de groupes qu'il soutient au Liban, en Syrie, en Irak et au Yémen et ce, d'autant plus que Téhéran a « conseillé » au Hezbollah de frapper Israël «en profondeur » et de «ne pas se limiter aux cibles militaires». A cela, le leader du mouvement chiite libanais, Hassan Nassrallah, a répondu que la bataille est, désormais, «ouverte sur tous les fronts» et que son mouvement a «dépassé le front de soutien». Aussi, pour protéger ses troupes stationnées dans la région et son allié israélien face aux menaces que font, désormais, peser sur lui l'Iran et les groupes qui lui sont inféodés, Washington a annoncé, dans un communiqué du Pentagone que son ministre de la Défense, Lloyd Austin, «a ordonné une modification du dispositif militaire américain destiné à améliorer la protection des forces armées des Etats-Unis, doper le soutien à la défense d'Israël et faire en sorte que les Etats-Unis soient préparés à diverses éventualités». Mais, si, pour l'heure, la Russie, qui a menacé de relancer la production d'armes nucléaires, ne s'est pas encore prononcée, il n'est pas dit qu'elle ne va pas chercher à faire contrepoids aux Etats-Unis en s'invitant, dans les prochains jours, voire même les prochaines heures, dans cette guerre qui pointe le bout de son nez dans la région mais attendons pour voir...