Nabil El Bousaadi Créée en 2002, la Cour Pénale Internationale est une instance juridique internationale qui s'est donné pour mission de juger les personnes physiques – non pas les Etats – accusées de génocide, de crime contre l'humanité, de crime d'agression et/ou de crime de guerre en tant qu'actes réprimés par le droit international. C'est dans ce cadre que, ce dimanche, le procureur de la CPI, Karim Khan, a demandé l'émission de deux mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu et son ministre de la Défense Yoav Gallant pour « crimes de guerre » et « crimes contre l'humanité » mais, également, contre trois dirigeants du mouvement de la résistance palestinienne, Hamas ; à savoir, Ismaïl Haniyeh, le chef du bureau politique du mouvement, Yahya Sinwar, son leader politique dans la bande de Gaza, et Mohammed Deif, un dirigeant de sa branche armée. Mais, si par le lancement de mandats d'arrêt à la fois contre les dirigeants de l'Etat hébreu et contre les combattants du Hamas, le procureur de la CPI voudrait rappeler que « toutes les vies se valent », cette équivalence a provoqué un profond rejet en Israël alors que les Palestiniens y ont vu, en revanche, une reconnaissance des souffrances des populations civiles de Gaza. Aussi, en déplorant que le procureur de la CPI ait mis « sur un même pied d'égalité, la victime et le bourreau », le Hamas a exigé le retrait des allégations contre ses dirigeants et regretté que les mandats d'arrêt contre les dirigeants israéliens soient arrivés avec 7 mois de retard et après que « l'occupation israélienne ait commis des milliers de crimes ». Il n'en fallait pas plus pour que la sphère diplomatique soit ébranlée et qu'il y ait une avalanche de « critiques » ; les premières émanant, bien entendu, des dirigeants de l'Etat hébreu qui ont exprimé leur stupeur face à ce « déshonneur politique » dont se serait rendue coupable la CPI mais aussi du président américain, Joe Biden, qui a qualifié de « scandaleuse » la décision prise par l'instance juridique internationale précitée. Dans le vieux continent, le gouvernement italien de Giorgia Meloni a jugé « inacceptable » de mettre le Hamas et l'Etat hébreu sur un même pied d'égalité dès lors que le premier est un mouvement qui résiste contre l'usurpation de son territoire et le second un occupant, alors que l'Allemagne a estimé, de son côté, que cette demande donne une « fausse impression d'équivalence » entre Israël et le Hamas et que la France, qui avait condamné « les massacres anti-sémites perpétrés par le Hamas » le 7 Octobre dernier, a publié un communiqué émanant de son ministère des Affaires étrangères dans lequel elle apporte son « soutien » à la CPI pour « son indépendance et la lutte contre l'impunité dans toutes les situations ». Après avoir, également, souligné, dans ce communiqué, qu'une « solution politique durable » reste la « seule » voie pour « rétablir un horizon de paix », le ministère français des Affaires étrangères a rappelé que « la France alerte, depuis de nombreux mois, sur l'impératif de respect strict du droit international humanitaire et notamment sur le caractère inacceptable des pertes civiles dans la bande de Gaza et d'un accès humanitaire insuffisant ». En considérant que, par le lancement d'un mandat d'arrêt contre le Premier ministre israélien, la CPI entend donner un signal très fort car, en ce moment où le soutien apporté à Israël dans le conflit qui l'oppose au Hamas se délite au fil des heures, çà sera la première fois qu'un dirigeant soutenu, à bout de bras, par les démocraties « occidentales », va se retrouver soumis à cette procédure puisque les personnes précédemment visées par les juges de la CPI étaient, dans leur grande majorité, membres de juntes militaires ou de régimes autoritaires dénoncés ouvertement par les Nations-Unies ou par Washington et ses valets, comme ce fut le cas du président russe Vladimir Poutine qui n'a dû son salut qu'au fait qu'en n'étant pas membre de la CPI dont elle ne reconnaît pas la compétence, la Russie avait estimé que le mandat d'arrêt qu'elle avait émis contre son président n'avait aucune valeur juridique. Espérons, enfin, que cette procédure ira jusqu'à son terme en obligeant les occupants sionistes à répondre – pour une fois – de leurs actes dont l'horreur est sans égal et attendons pour voir…