Nabil El Bousaadi Si la République islamique iranienne a repris le dialogue avec les Etats-Unis, s'est rapproché des pays de la Ligue Arabe et de l'Arabie Saoudite après une rupture qui aura duré sept années, a fait une entrée fracassante au sein des BRICS et, dans la même journée du 22 septembre, a rétabli ses relations diplomatiques avec Djibouti et les Maldives en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, le moins que l'on puisse dire c'est que le régime des Mollahs serait subitement redevenu fréquentable nonobstant les multiples rapports élaborés aussi bien par différentes ONG que par le Haut-Commissariat des Nations-Unies aux droits de l'Homme l'accusant de graves violations des droits humains et une année perturbée aussi bien par les manifestations liées à la mort de la jeune Mahsa Amini que par de grandes difficultés économiques. Mais, dans tout cela, les deux questions qui retiennent l'attention des observateurs sont celles afférentes au rapprochement entre Téhéran et Washington et à la reprise des relations entre l'Iran et l'Arabie Saoudite. S'agissant du rapprochement irano-américain, l'accord signé entre les deux pays a permis à Téhéran de récupérer des fonds iraniens gelés d'un montant global de six milliards de dollars en contrepartie de la libération de cinq ressortissants américains détenus en Iran. Mais, bien que la chaîne américaine CNN, ait salué cet évènement qui représente, à ses yeux, « une avancée significative dans les relations diplomatiques après des années de négociations indirectes et compliquées entre Washington et Téhéran », un haut fonctionnaire de l'administration Biden, ayant requis l'anonymat, a tenu à préciser que celui-ci ne préjuge, en rien, d'un dialogue nouveau entre les deux pays car il n'a pas « modifié » leurs appréhensions quant à la question du « nucléaire iranien » puisque les deux parties campent toujours sur leurs positions. C'est à ce titre, d'ailleurs, que le président américain, Joe Biden, a tenu à rappeler, le 19 septembre, devant l'Assemblée générale de l'ONU, que son pays reste « inébranlable dans son engagement pour que l'Iran ne se dote jamais de l'arme nucléaire ». Autre point important et non des moindres ; l'argent débloqué au profit de l'Iran, ne constituerait, en aucun cas, un « chèque en blanc » offert à ce pays du moment que son utilisation se fera sous la « stricte surveillance » des Etats-Unis et « à des fins humanitaires » même si le régime iranien, qui est d'un autre avis, ne s'est pas empêché d'affirmer qu'il dispose de « la possibilité d'user autrement de cette enveloppe et pas seulement pour acheter des médicaments et de la nourriture ». Pour ce qui est de la reprise des relations entre Riyadh et Téhéran, il faut rappeler que c'est l'attaque, en Janvier 2016, par des manifestants iraniens, de l'ambassade saoudienne à Téhéran, perpétrée en représailles à l'exécution, par les autorités saoudiennes, d'un haut dignitaire chiite, qui avait poussé Riyad à rompre ses liens avec Téhéran et amené d'autres pays de la Ligue Arabe à se solidariser avec l'Arabie Saoudite en gelant leurs relations avec le régime des Mollahs. Mais, pour David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l'Iris (Institut de Relations Internationales et Stratégiques) et rédacteur en chef de la revue « Orients Stratégiques », la reprise des relations entre l'Iran et les pays de la Ligue Arabe trouverait sa raison d'être dans « les préoccupations du pouvoir iranien qui s'est trouvé dans une situation interne d'explosion potentielle ». Aussi, est-ce Téhéran qui, en étant « fragilisée, en interne, après les manifestations » consécutives à la mort de la jeune Mahsa Amini et asphyxiée par les « sanctions occidentales » s'est trouvée contrainte de « lâcher du lest » en signant avec son « rival stratégique » un accord qui lui permettrait de ne point rester « déstabilisée à l'intérieur » et « isolée à l'extérieur ». Sachant, enfin, que Washington a « rehaussé le curseur » de sa présence militaire dans la région et que les sanctions américaines contre la République islamique iranienne sont toujours en vigueur, tout indique que l'entrée de l'Iran dans les BRICS, ne va pas apporter au régime de Téhéran les bénéfices escomptés mais attendons pour voir...