Nouveau plaidoyer du PPS pour une réforme globale du code de la famille Poursuivant son plaidoyer pour une réforme globale du code de la famille et sa mise à niveau, le Parti du Progrès et du Socialisme a organisé, lundi 26 juin en son siège national à Rabat, une conférence sous le thème : «La situation de la femme entre la garde conditionnée et la tutelle légale absente». Même malade, un père divorcé n'est jamais obligé de produire un certificat d'aptitude physique et mentale !!!! La rencontre a été marquée par le témoignage d'une mère divorcée, à travers lequel elle a relaté les péripéties de son calvaire de 23 ans avec ses enfants dont un à besoins spécifiques. Et c'est précisément le handicap mental de ce dernier enfant, qui avait été utilisé par ce père négligeant et irresponsable, qui l'a rejeté, pour demander ce divorce. Depuis lors, ce père, qui avait recouru à toutes les subterfuges et manœuvres pour ne pas payer la pension alimentaire, n'a jamais rendu visite à ses enfants pendant toute cette longue période de 23 ans, a affirmé cette mère, devenue experte en la matière pour avoir passé une grande partie de sa vie dans les bureaux des avocats et les salles du tribunal. Mais ce qui lui tenait surtout à cœur c'est que le tribunal a refusé à maintes reprises de lui attribuer le droit de tutelle, elle qui s'acquitte convenablement depuis son divorce de toutes ses obligations dans le cadre de la garde des enfants. Elle trouve aussi anormal et injuste que le tribunal lui demande un certificat d'aptitude physique et mentale avant d'examiner sa demande de lui confier ce droit de tutelle et ne l'a jamais demandé à ce mari divorcé démissionnaire, qui souffre de plus d'une maladie chronique et qui déteste sa progéniture pour l'avoir ignorée depuis le divorce. Malgré cela, il est toujours considéré comme étant l'unique tuteur de ses enfants, a-t-elle déploré. Said Akdad : Le PPS, parti de gauche, à l'avant-garde du débat autour de la réforme du code de la famille Ouvrant cette rencontre, dont il assurait la modération, Said Akdad, membre du Bureau Politique du parti a indiqué que le PPS en tant que parti de gauche, qui lutte depuis sa création pour l'égalité homme-femme et la protection des droits de l'enfant poursuit son plaidoyer pour une réforme du code de la famille, à travers cette table ronde consacrée à la question de la tutelle légale et de la garde des enfants. C'est une nouvelle contribution du Parti du Livre au débat en cours autour de cette réforme globale du code de la famille pour sa mise à niveau et en harmonie avec les dispositions de la Constitution avancée de 2011 et des conventions internationales ratifiées par le Maroc, a-t-il affirmé. Pour ce faire, a-t-il rappelé, le parti a déjà organisé, à l'initiative de la présidence de la commission de l'égalité et des droits des femmes une série de rencontres autour des problématiques du Taâsib, du mariage des mineures et de l'héritage. Soumaya Hijji : La violence à l'égard de la femme vise à la priver de son droit au remariage à la suite d'un divorce Prenant la parole, la défenseure des droits humains Soumaya Mouncif Hijji, membre du bureau politique du PPS et présidente de la commission de l'égalité et des droits des femmes a indiqué que cette rencontre porte sur la question de la tutelle légale et de la garde des enfants à la suite notamment d'un divorce. Elle est organisée dans le cadre des efforts du parti visant à l'élaboration d'un mémorandum qu'il compte présenter pour contribuer à la réforme souhaitée du code de la famille, dont la dernière révision remonte à 2004. Les deux questions de la tutelle et de la garde des enfants sont dialectiquement liées, a-t-elle estimé. Selon l'article 164 du code de la famille marocain, a-t-elle indiqué, la garde est attribuée en premier à la mère et puis au père en cas de divorce, contrairement au droit de tutelle. En cas de divorce ou de décès du père, la garde revient à la mère, stipule l'article 171 du code de la famille. Elle a fait savoir que la mère divorcée risque toutefois de perdre ce droit de garde dans le cas où elle se remarie dans le but d'exercer son droit naturel d'avoir une vie sentimentale et stable. Et ce contrairement au père divorcé, qui n'est nullement inquiété même en cas d'un nouveau mariage, a-t-elle dit, estimant qu'il s'agit en fait d'une autre forme de violence à l'égard de la femme pour la priver de son droit naturel de se remarier, de refonder une famille et d'avoir une nouvelle vie sentimentale et stable. Elle a fait savoir aussi qu'il est injuste que la mère, qui se remarie, ne perd pas ce droit de garde, si l'enfant dont elle a la charge souffre d'un quelconque handicap mental ou physique. Dans ce cas, l'enfant à besoins spécifiques reste à la charge de sa mère, jusqu'à la fin de sa vie. « Si l'enfant est âgé de moins de 7 ans ou s'il est handicapé », sa garde est confiée à sa mère. La mère qui se remarie est déchue du droit de garde, dès lors que l'enfant a atteint l'âge de sept ans (article 175). La mère qui n'est pas de religion musulmane sera également déchue de la garde de son enfant. Pour ne pas perdre son droit de garde des enfants, la femme divorcée est obligée dans la plupart des cas d'avoir, à ses risques et périls, des relations sexuelles consenties entre adultes ou de contourner la loi. Pour ce qui est de la tutelle, elle est exercée par le représentant légal (ou le tuteur) jusqu'à la majorité légale de l'enfant c'est-à-dire jusqu'à ses 18 ans. Selon l'article 233 du Code de la famille, le représentant légal est chargé de veiller sur l'enfant et sur les biens de l'enfant. Elle a rappelé dans ce cadre que le père est de droit le tuteur légal de ses enfants, tant qu'il n'a pas été déchu de cette tutelle par un jugement. En cas d'empêchement du père pour cause de décès, d'absence ou déchéance de la capacité, il appartient à la mère de veiller sur les intérêts urgents de ses enfants. Elle est tenue pour ce faire de produire la preuve de sa capacité de jouer pleinement ce rôle, a-t-elle dit, soulignant que la femme subit en fait dans ce cadre un traitement discriminatoire qui ne sied pas à la charge de la garde des enfants qui lui est attribuée de droit. Pour rendre justice aux enfants, la tutelle doit revenir à égalité aux deux parents, a-t-elle plaidé. Me Leila Amili : La solution réside dans une réforme radicale et globale du code de la famille Pour la présidente de l'association « Mains libres », Me Leila Amili, la solution de la question de la garde des enfants et de la tutelle et du mariage des mineures entres autres réside dans la réforme radicale et globale du code de la famille, dont les dispositions ne sont plus conformes à celles de la Constitution de 2011 et des conventions internationales ratifiées par le Maroc. Elle a estimé nécessaire de tenir compte dans le cadre de cette révision des propositions des défenseurs des droits humains de la femme pour rendre justice notamment à la femme divorcée, qui subit toutes sortes de violences de la part de la société et de la complexité des lois (Taâsib, héritage, remariage). Elle a fait savoir aussi qu'une nouvelle pratique non moins préjudiciable à l'encontre de la femme a vu le jour pour contourner la loi et lui permettre de ne pas être déchu de son droit de garde en contractant un mariage en cachette qu'elle ne rend public qu'après 364 jours. Elle juge aussi cruel que l'enfant soufrant d'un quelconque handicap reste toujours à la charge de sa mère, contrairement aux autres enfants sains. Elle a indiqué de même qu'il est aujourd'hui indispensable de réaliser une réforme globale de ce code et d'agir sur tous les plans pour changer les mentalités et améliorer le niveau d'éducation des populations, en particulier dans les zones reculées où l'ignorance, le manque d'infrastructures culturelles et éducatives et l'absence de toute éducation sexuelle constituent des obstacles insurmontables qui entravent toutes les réformes attendues. Jamal Maâtouq : Ce n'est pas la loi qui pose problème.... Quant au Pr Mohamed Jamal Maâtouq, universitaire et expert juridique, il a estimé d'entrée que l'égalité homme- femme est une valeur importée d'Occident et que la faute est dans « l'Homme » marocain, non pas au sens de mâle, mais « l'Homme » qui honore la femme. Pour lui, l'égalité homme-femme est irréalisable entre deux êtres humains dotés d'atouts naturels différents et inégaux. Après avoir reproché aux organisateurs leur manque de ponctualité, il a accusé tous les jeunes marocains d'avoir perdu leur caractère « d'Homme » protecteur qui honore la femme et d'être devenus des Ouliyates (femmes qui comptent sur les autres pour survire). Il a reproché aussi aux participants à cette conférence d'avoir occulté le poids de la religion, estimant que le Maroc n'a nullement besoin de ces valeurs importées d'Occident pour donner à l'égalité homme-femme toute sa signification. Et pour noyer encore plus le poisson dans l'eau, il a invité les chercheurs et les participants à ce débat autour de l'égalité homme-femme à approfondir la réflexion autour des véritables significations (Makassid Ach-chriaâ). Il a appelé dans le même ordre d'idées à lutter contre l'ignorance et l'analphabétisme, la pauvreté, la précarité et la marginalisation dans les zones rurales et urbaines et à créer les conditions propices à une société égalitaire, qui honore ses femmes, a-t-il estimé, oubliant qu'il s'agit aussi de valeurs importées d'Occident. Selon lui, ce n'est pas la loi qui empêche la femme d'exercer le droit de tutelle sur ses enfants. C'est le juge, qui manque d'audace dans le cadre de son interprétation et de son application de cette loi, qui en est responsable. Ce n'est pas le juge ou le chauffeur qu'il faut changer, mais c'est le code ou le car qu'il faut réparer ou changer..... Ce qui a évidemment suscité une vive réaction de l'assistance. On lui a reproché notamment de défendre le statu quo sous le faux prétexte de défendre le pays contre les valeurs occidentales importées et de faire porter le chapeau au juge dans le cas de l'attribution du droit de la garde et de celui de la tutelle à l'un des deux parents divorcés. Le juge, tenu d'appliquer la loi, ressemble dans le cas d'espèce à un chauffeur, qui ne doit pas être tenu pour responsable de l'injustice faite à la femme au détriment de l'intérêt des enfants. Ce n'est pas le juge ou le chauffeur qu'il faut changer, mais c'est le code ou le car qu'il faut réparer ou changer, dans le cas d'espèce.