Il était certain que le lancement, par la Cour Pénale Internationale (CPI), d'un mandat d'arrêt contre le président russe Vladimir Poutine allait susciter bien des remous et bien des interrogations dans les chancelleries du monde entier tant il est clair que la mesure, initiée en coulisses par Washington et certains de ses fidèles alliés, est dépourvue de toute objectivité et de toute impartialité et fait fi de l'immunité dont doivent bénéficier les chefs d'Etat au regard du droit international. Aussi, en condamnant « les décisions illégales » de la CPI visant à « arrêter » Vladimir Poutine et « la commissaire aux droits des enfants », la Russie a répliqué, trois jours après l'émission de ce mandat, en ouvrant une enquête pénale contre le procureur de la CPI, Karim Khan, et trois juges relevant de ladite Cour au motif qu'ils ont indûment « engagé des poursuites pénales à l'encontre d'une personne notoirement innocente, combinée à l'accusation illégale d'avoir commis un crime grave ou particulièrement grave » et même « préparé une attaque envers un représentant d'un Etat étranger ». Allié de Moscou, Pékin ne pouvait pas laisser passer cette occasion sans saisir la balle au bond. La réaction chinoise qui ne s'est pas fait attendre est survenue quelques heures à peine avant le début de la visite d'Etat du président Xi Jinping en Russie, la première en près de quatre ans, si bien que, dans sa réponse aux journalistes qui lui demandaient si le président chinois allait maintenir le déplacement prévu à Moscou en dépit du mandat d'arrêt lancé, par la CPI, contre son homologue russe, Wang Wenbin, le porte-parole de la diplomatie chinoise a confirmé que la rencontre entre les deux présidents aura lieu comme prévu et déclaré que « la Cour pénale internationale doit adopter une position objective et impartiale, respecter l'immunité de juridiction des chefs d'Etat en vertu du droit international (et) éviter la politisation et la politique du deux poids, deux mesures ». En ajoutant, par ailleurs, qu'à l'occasion de cette visite « d'amitié, de coopération et de paix », « les deux parties [...] vont pratiquer un véritable multilatéralisme, promouvoir la démocratie dans les relations internationales, construire un monde multipolaire, améliorer la gouvernance mondiale et contribuer au développement et au progrès du monde », Wang Wenbin a rappelé que Pékin, qui n'a jamais condamné publiquement l'offensive russe contre Kiev mais qui a toujours critiqué Washington pour ses livraisons d'armes à l'Ukraine et l'Otan pour n'avoir pas pris en compte les préoccupations russes en matière de sécurité, maintient « sa position objective et juste sur la crise ukrainienne », entend jouer « un rôle constructif dans la promotion de pourparlers de paix » et en appelle, enfin, au dialogue et au respect de l'intégrité territoriale de tous les Etats ; ce qui, bien entendu, n'exclue pas l'Ukraine. En rappelant, enfin, que, tout comme Moscou, Pékin qui n'a pas signé le « Statut de Rome », ne reconnaît pas la Cour Pénale Internationale, Wang Wenbin a tenu à préciser que « la Chine estime que le dialogue et la négociation sont les voies de sortie fondamentale de la crise ukrainienne et que la communauté internationale doit jouer un rôle constructif pour la résolution pacifique de cette crise (...) et œuvrer davantage pour faciliter les pourparlers de paix ». La Cour Pénale Internationale va-t-elle revoir sa copie et faire preuve de plus d'objectivité et d'impartialité ? Rien n'est moins sûr mais attendons pour voir... Nabil EL BOUSAADI