La Mostra s'apprête à dévoiler son film évènement, « Blonde », un biopic spectaculaire sur Marilyn Monroe que seuls les festivaliers pourront savourer sur grand écran à Venise, le reste des spectateurs devant se contenter d'une sortie directement sur Netflix. La plateforme de vidéo en ligne a fait savamment monter les attentes autour de ce projet, lancé avant que la compagnie n'essuie ses premières pertes d'abonnés, sous la pression de la concurrence. D'autres ambitieux films d'auteur Netflix ont été présentés dans la compétition vénitienne, avec des fortunes diverses: Alejandro González Iñárritu a perdu ses spectateurs dans les méandres de son « Bardo », Noah Baumbach n'a pas retrouvé le charme de ses films précédents avec « White Noise », tandis que Romain Gavras a impressionné avec « Athena ». Mais « Blonde », autobiographie fictive en 02H45 du mythe Marilyn Monroe constitue le vrai test pour la plateforme. Et pour la Mostra, qui contrairement à Cannes, ouvre grand ses portes à des films qui ne sortiront pas dans les salles traditionnelles. C'est l'actrice cubaine Ana de Armas, repérée notamment en James Bond girl dans « Mourir peut attendre », qui a été choisie pour retracer la vie et la fin tragique d'une star broyée par la machine hollywoodienne. « Blonde » promet une relecture féministe et romancée du parcours de Norma Jeane Mortenson, le vrai nom de Marilyn, morte en 1962 à l'âge de 36 ans après être devenue une icône de la culture populaire. Son destin a déjà inspiré une pléthore de créateurs, d'Andy Warhol et ses portraits au film « My week with Marilyn » avec Michelle Williams, il y a dix ans, en passant par des écrivains comme Norman Mailer. « Blonde », lui, promet de jeter une lumière crue sur le système patriarcal d'Hollywood, sans prétendre éclaircir le mystère qui continue d'entourer sa mort. Il est fondé sur le roman-fleuve de l'Américaine Joyce Carol Oates, biographie fictive mais documentée de la star, parue en 2000. A travers la trajectoire cauchemardesque de Marilyn, abusée par les hommes et l'industrie et qui chercha toute sa vie un impossible amour, elle dresse un portrait au vitriol de l'Amérique des années 1950/60. Reconstituer, parfois à l'aide de photos d'archive, des séquences légendaires du 7e art, comme l'interprétation par Marilyn de « Diamond's are a Girl Best Friend », chanté dans la comédie « Les Hommes préfèrent les blondes », n'est pas le moindre des défis auquel se mesure ce biopic. Au-delà du glamour, le réalisateur de « L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford » (2007) avec Brad Pitt, dont c'est le premier film de fiction depuis une décennie, promet de plonger les spectateurs dans la psyché de Marilyn, depuis son enfance cabossée. Le film, dont l'interdiction aux moins de 17 ans aux Etats-Unis a été qualifiée de « connerie monumentale » par le réalisateur, explore sa tumultueuse vie sentimentale, enchaînement de déceptions pour une artiste érigée par l'industrie et la presse en sex-symbol. « Blonde » est « une critique des vaches sacrées américaines », a promis le réalisateur, dans une interview au magazine professionnel Screen Daily. Il n'aurait pu voir le jour sans le mouvement de dénonciation des abus sexuels dans le monde du cinéma, « car personne auparavant ne s'intéressait à ce genre de trucs: ce que c'est d'être une fille privée d'amour, ou ce que c'est que de passer au travers du hachoir à chair fraîche de Hollywood ». Bobby Cannavale et Adrien Brody interprètent respectivement deux anciens maris de Marilyn Monroe, la star du base-ball Joe DiMaggio et le dramaturge Arthur Miller. La bande originale du film est confiée aux rockeurs Warren Ellis et Nick Cave, des proches du réalisateur auxquels il a déjà consacré des documentaires. Le film sera mis en ligne pour les 220 millions d'abonnés Netflix le 28 septembre.