La sauvegarde du patrimoine amazighe oral Par El Mostafa Ayach – MAP Le Doyen de l'Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCAM), Ahmed Boukous, a assuré que la sauvegarde sous une forme écrite du patrimoine amazighe oral représente un chantier stratégique pour son institut et une des priorités majeures inscrites dans son agenda annuel. Le travail de collecte et d'archivage de ce patrimoine oral a déjà débuté au Centre des études littéraires, des expressions artistiques et de la production audiovisuelle et ce, depuis 2003, a indiqué M. Boukous dans un entretien accordé à la MAP. Ledit centre, a-t-il ajouté, s'est fixé un nombre d'objectifs visant principalement à conserver diverses expressions orales du patrimoine amazighe menacées d'extinction en raison notamment des mutations socio-culturelles survenues dans la société marocaine à cause de l'exode, la scolarisation et la globalisation galopante, outre la disparition des artistes et des gardiens de ce patrimoine oral. Dans ce travail de compilation et de conservation de longue haleine, le doyen de l'IRCAM a indiqué que les chercheurs et académiciens dans les domaines de la littérature, la pédagogie et la linguistique ainsi que les professionnels dans les domaines de l'enseignement et des médias ont à leur disposition un nombre important de textes et de contes amazighes pouvant être utiles dans le travail de recherche des uns et dans l'enrichissement des manuels scolaires et des programmes radio-télévisés des autres. M. Boukous a également évoqué la mise en place d'une base de données en littérature amazighe accessible au grand public sur le portail de l'IRCAM ainsi que l'édition en plusieurs volumes d'une Anthologie de la littérature amazighe. Le Centre des études littéraires, des expressions artistiques et de la production audiovisuelle a pris contact avec les chercheurs pionniers en matière de conservation du patrimoine oral et ce, en vue de couvrir toutes les régions dans le Royaume, a-t-il fait savoir, relevant que l'une des difficultés rencontrées réside dans »le peu d'enthousiasme » des chercheurs et collaborateurs sollicités, réticents à faire un travail de terrain car la conservation du patrimoine amazighe oral nécessite de rencontrer des personnes un peu partout dans le pays et d'enregistrer leurs récits avant de procéder en dernier lieu à leur conservation sous une forme écrite. À cela, M. Boukous a déploré le décès de nombreuses personnes, des gardiens de la mémoire amazighe, qui vivaient dans des régions reculées et non couvertes par ce travail de terrain, les effets fâcheux de l'exode sur la conservation du patrimoine oral ou encore la difficulté pour les chercheurs de contextualiser parfois sur les plans historique et socio-culturel certaines productions orales, surtout en ce qui concerne la poésie amazighe antique. Il a en outre relevé que les difficultés rencontrées n'ont pas pour autant entravé la réalisation des objectifs fixés, soulignant dans ce sens que l'IRCAM a reçu depuis 2003 à fin 2020 un total de documents se chiffrant à 68.486 pages dont 63.606 poèmes, 4.880 textes en prose, rassemblés par des chercheurs contractuels dans le Sud, le Centre et le Nord du Royaume. Et M. Boukous de préciser que des poèmes de l'époque de la résistance lors du protectorat ainsi que de la poésie féministe et soufie figurent parmi les textes oraux découverts et conservés sous forme écrite, faisant état de la prééminence de la poésie sur la prose dans ce travail de compilation et d'enregistrement du patrimoine amazighe oral. Mettant en avant l'importance de ce travail de conservation du patrimoine amazighe oral, une des grandes réalisations de l'IRCAM, le doyen de l'Institut Royal de la Culture Amazighe a plaidé pour davantage d'efforts afin d'associer le plus grand nombre de collaborateurs et de chercheurs à ce vaste chantier.