Dans un système politique opaque aux institutions démocratiques factices Le Hirak algérien, qui fête ses deux années, exprime avec ténacité l'exaspération d'une population qui étouffe dans un système politique opaque aux institutions démocratiques factices, dont les militaires continuent de tirer les ficelles, affirme mardi le journal Le Monde. « Deux années après son déclenchement, le 22 février 2019, le Hirak, mouvement de protestation spontané et pacifique contre les dirigeants et le système politiques algériens, a un premier mérite : il reste vivant. En témoigne la mobilisation, lundi, malgré la répression et le Covid, de milliers de manifestants aux cris de « Les généraux à la poubelle » ou « Le peuple réclame l'indépendance », dans plusieurs villes du pays. Mais surtout, le Hirak exprime avec ténacité l'exaspération d'une population qui étouffe dans un système politique opaque aux institutions démocratiques factices, dont les militaires continuent de tirer les ficelles », écrit le journal français dans un éditorial sous le titre « Algérie : sortir de l'impasse après deux années de révolte ». Pourtant, observe Le Monde, « après un an de manifestations tous les vendredis et une autre année de protestations sporadiques, Covid oblige, force est de constater que le bilan est mitigé ». « Certes, les Algériens ont obtenu le départ du président Bouteflika après vingt ans de règne. Certes, ils ont ridiculisé, en s'abstenant massivement, la prétention de son successeur, Abdelmadjid Tebboune, candidat des militaires élu lors d'une présidentielle truquée, à se relégitimer grâce au référendum constitutionnel du 1er novembre 2020. Certes, les protestataires viennent d'obtenir, jeudi 18 février, la libération d'une quarantaine de militants emprisonnés (...) et la promesse, par M. Tebboune, de nouvelles élections « détachées de l'argent et de la corruption » et débouchant sur de « nouvelles institutions ». Mais les vains engagements du même type maintes fois brandis dans le passé, la succession de phases de répression et d'apaisement, que le pays a enchaînées depuis la fin de la décennie sanglante des années 1990, ont amené le pays bien au-delà de la lassitude, à une colère sourde qu'exacerbe l'inertie du régime », affirme le journal. Selon Le Monde, « le Hirak, mouvement « dégagiste » qui réclame un changement de régime mais n'a ni programme clair ni leadership, n'a pas réussi à contraindre à la négociation le petit groupe d'hommes issus de l'appareil sécuritaire et de l'armée qui tient les rênes du pays. Souvent dénoncée, l'impasse paraît totale ». Or, estime-t-il, « les dirigeants algériens ne peuvent plus éternellement jouer la montre. La crise sanitaire et la chute brutale des prix des hydrocarbures sapent le principal fondement du régime : sa capacité à acheter la paix sociale grâce à la rente pétrolière qui fournit 60 % des recettes de l'Etat. Les investissements publics, principal moteur de la croissance, faiblissent. L'inflation enfle et le taux de chômage officiel a atteint 15 %, sans parler de l'impact de la crise sur l'emploi informel, vital pour beaucoup ». « Cette fois, des réformes cosmétiques ne suffiront pas », affirme le Monde, soulignant que « l'urgence est à l'ouverture d'un véritable dialogue entre le pouvoir et les oppositions, incluant des représentants du Hirak et de la société civile ». « A l'approche du soixantième anniversaire de son indépendance, le 5 juillet 2022, on voit mal comment l'Algérie, pays potentiellement riche, pourrait faire l'économie d'une remise à plat de ses institutions et d'une conférence nationale », estime Le Monde. « Plus tardera l'engagement sincère d'un tel processus vers un Etat de droit digne de ce nom, vers un véritable contrôle parlementaire et une justice indépendante, plus s'aggraveront les tensions et plus le prix à payer pour le peuple algérien risque d'être lourd », souligne le journal.