A un mois de l'entrée en fonction de Joe Biden, Moscou s'en est pris mercredi à la future administration américaine qualifiée de « russophobe », après des propos combatifs du locataire à venir de la Maison Blanche. « Nous n'attendons rien de bon » du futur président américain, a lâché dans un entretien à l'agence de presse Interfax le vice-ministre russe des Affaires étrangères chargé notamment des relations avec les Etats-Unis, Sergueï Riabkov. Sans élaborer, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a lui aussi indiqué ne voir « rien de positif » se profiler. « Ce serait étrange d'attendre du bien de gens qui, pour beaucoup d'entre eux, ont fait leur carrière sur la russophobie, en déversant du fiel sur mon pays », a jugé M. Riabkov. Quelques heures plutôt, le président élu Joe Biden avait promis de répondre à la gigantesque cyberattaque attribuée à la Russie qui a visé son pays. « Quand j'aurai été informé de l'étendue des dégâts et de l'identité des responsables, ils peuvent être sûrs que nous répondrons », a-t-il menacé mardi. Il a aussi reproché à Donald Trump de minimiser le rôle supposé de la Russie, alors que des membres de son administration dénonçaient la responsabilité de Moscou dans les attaques ayant visé des services fédéraux aux Etats-Unis. Washington a adopté de multiples trains de sanctions contre la Russie, notamment du fait de piratages informatiques et d'accusations d'ingérence dans la présidentielle de 2016. Le camp démocrate de Joe Biden estime que Moscou a tout fait pour faire élire M. Trump et accusé son entourage de collusion avec les Russes. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a ainsi commenté mercredi de récentes mesures américaines visant des entreprises russes mais aussi chinoises comme une nouvelle illustration « de la politique hostile des Etats-Unis », promettant « une réplique ». Ces derniers échanges d'amabilités interviennent alors que diplomates russes et américains ont moult dossiers à régler dès la prise de fonction de M. Biden, le 20 janvier. En haut de la liste, le renouvellement ou non du traité de désarmement New Start qui expire en février, dernier grand accord bilatéral régissant une partie des arsenaux nucléaires des deux adversaires géopolitiques. Autre sujet, le sauvetage de l'accord sur le nucléaire iranien. Les signataires comptent sur Joe Biden pour revenir à ce texte comme il l'a promis, après tous les efforts de l'administration Trump pour y mettre fin. Et il s'agit de faire vite, à l'heure ou Téhéran s'éloigne de plus en plus de ses engagements. Pour M. Riabkov, la Russie doit avoir un « dialogue sélectif » avec les Etats-Unis, en ciblant uniquement les « sujets qui nous intéressent ». Et l'Iran et New Start font partie des priorités affichées des Russes. Pour le reste, le diplomate a jugé nécessaire une politique « d'endiguement total des Etats-Unis » et exclu que la Russie initie le contact « avec l'équipe de transition de Biden ». Le président Vladimir Poutine avait déjà laissé entendre que le changement de locataire de la Maison Blanche ne laissait pas présager de détente. Il a été l'un des rares dirigeants au monde à avoir attendu le vote du collège électoral américain du 14 décembre pour féliciter le président élu, soit six semaines après le scrutin, arguant du refus de Donald Trump de reconnaître sa défaite. Si la semaine passée, lors de sa grande conférence de presse annuelle, M. Poutine a dit espérer pouvoir résoudre avec la nouvelle administration « au moins une partie des problèmes » entre les deux pays, il a rapidement repris sa rhétorique habituelle. Il a ainsi vilipendé ses rivaux occidentaux, Américains en tête, fustigeant leur « agressivité » à l'égard d'une Russie « câline » en comparaison. « Qui est +doux et câlin+ et qui est agressif? » a-t-il martelé, reprenant les mots d'une question d'un journaliste, « par rapport à vous (les Occidentaux, NDLR), oui, nous sommes +doux et câlins+ ».