Record inégalé et situation inédite; en l'espace d'une semaine, les péruviens ont connu 3 présidents En effet, après la destitution, le 9 novembre dernier, du président Martin Vizcarra, à la tête du Pérou depuis la démission en 2018 de son prédécesseur Pedro Pablo Kuczynski mais évincé après une procédure expéditive qui témoigne de la fragilité des institutions péruviennes – en fait, une seconde procédure de destitution fondée sur des accusations de corruption qu'il réfute de manière catégorique – c'est Manuel Merino, le président de l'Assemblée, qui l'avait remplacé dès le lendemain. Mais ce dernier n'a pas fait long feu puisqu'il a été poussé vers la sortie sous la pression de la rue et de la classe politique après que la manifestation de samedi violemment réprimée par la police se soit soldée par la mort de deux jeunes protestataires et de plus d'une centaine de blessés. Raison pour laquelle, ce lundi, la justice péruvienne a ouvert une enquête préliminaire visant le président démissionnaire Manuel Merino, le numéro deux de son très éphémère gouvernement et son ministre de l'intérieur et portant aussi bien sur la mort des deux manifestants tombés le samedi précédent sous les balles tirés par la police que sur les « blessures graves » dont fuirent victimes plusieurs dizaines de manifestants. «Une dictature a quitté le palais. Merino s'est écarté, il brisait notre démocratie» avait, immédiatement, déclaré à la presse l'ancien président Martin Vizcarra pour lequel la démission de Manuel Merino est un premier pas vers le rétablissement des institutions démocratiques. Il a aussi saisi cette occasion pour demander à la Cour Constitutionnelle de bien vouloir se prononcer, le plus rapidement possible, sur sa destitution en prononçant la légalité ou l'illégalité de l'éviction dont il avait fait les frais le 9 novembre dernier. Après le départ de Manuel Merino, c'est le député centriste Francisco Sagasti, 76 ans, un ingénieur issu du parti centriste Morado et qui avait déjà travaillé pour la Banque mondiale qui, le 16 novembre, a été élu à la tête du Parlement avec 97 voix sur 130 alors même qu'il était le seul candidat en lice et qui, de ce fait, a, automatiquement, endossé le costume de président de la république conformément aux stipulations constitutionnelles. Pour rappel, si la Constitution péruvienne stipule qu'en cas de destitution du président, c'est le vice-président qui endosse automatiquement cette charge, le Pérou n'a plus de vice-président depuis la précédente crise politique survenue il y a une année. Aussi, cette fonction incombe, désormais, au président du Parlement. Si l'élection de Francisco Sagasti a été saluée par des centaines de manifestants massés aux abords du Parlement et par d'incessants coups de klaxons, Jose Carlos Ugaz, l'ancien président de Transparency International y voit «le scénario idéal» pour surmonter la crise politique du moment que ce dernier qui fut «l'un de ceux qui n'avaient pas voté contre la destitution de Martin Viscarra» dispose d'un mandat présidentiel qui, en courant jusqu'au 28 Juillet 2021, date à laquelle devait s'achever celui de Martin Vizcarra, lui confère le temps nécessaire pour mettre fin à la grave crise politique qui secoue le pays. Y parviendra-t-il ? Attendons pour voir...