Onze mois après avoir porté, à la tête de leur pays, la candidate libérale anti-corruption Zuzanna Caputova et écarté, du même coup, le candidat du gouvernement et vice-président de la Commission Européenne Marcos Sefcovic, les slovaques ont évincé, lors des législatives de ce samedi 29 Février, le parti SMER, social-démocrate, au pouvoir depuis 12 ans en n'attribuant au premier ministre sortant, Peter Pellegrini, que 18,2% des voix et en ouvrant, ainsi, la voie de la primature à Igor Matovic après avoir accordé 25% des suffrages à OLaNO (Mouvement des gens ordinaires et des personnalités indépendantes), parti de centre-droit ayant fait de l'éradication de la corruption et de la lutte contre la mafia le fer de lance de sa politique. Ancien patron de presse soucieux de réformer la classe politique, Igor Matovic, chrétien-conservateur, âgé de 46 ans, est une personnalité très controversée. C'est un agitateur qui «sait se faire remarquer» et un «adepte des coups médiatiques un peu spectaculaires» dira de lui Lukas Macek, directeur de Sciences-Po Dijon et expert de la politique en Europe de l'Est, qui rappellera que lors, d'une interview donné récemment par le président de l'Assemblée slovaque «visiblement ivre», Igor Matovic s'était placé derrière lui en brandissant une pancarte sur laquelle on pouvait lire «Il est bourré». Pour le professeur Macek, Igor Matovic «ne fait pas dans la modestie (…) Il n'a jamais caché sa volonté de devenir premier ministre. Il dit et c'est assez typique du personnage : «Je vais constituer le meilleur gouvernement de l'histoire de la Slovaquie». Mais si les élections législatives de ce samedi ont connu une participation fort appréciable dans la mesure où 65% des électeurs inscrits ont pris la direction des bureaux de vote, force est de reconnaître que l'ombre de l'assassinat, il y a deux ans, du journaliste d'investigation anti-corruption Jan Kuciak et de sa fiancée Martina Kusnirova, planait sur ce scrutin. Cette opération criminelle intervenue alors que le journaliste enquêtait sur des affaires de corruption au sein du gouvernement, aurait été commanditée par un homme d'affaires véreux ayant ses entrées au plus haut niveau de l'Etat et lié à cette mafia slovaque qui disposerait d'une grande influence sur la justice du pays si l'on se réfère à des écoutes publiées sur les réseaux sociaux. Ainsi, le candidat Matovic qui avait promis, durant sa campagne électorale, que s'il venait à disposer d'une majorité constitutionnelle, il nettoierait le pays et purgerait l'institution judiciaire slovaque de la corruption incarnée, à ses yeux, par le parti au pouvoir, semble avoir été écouté et eu pleinement bénéficié de la vague de protestations de la population slovaque après ce double meurtre. Enfin, après avoir transmis ses «félicitations au vainqueur» et reconnu, dans une conférence de presse, que le «bon marketing» d'Igor Matovic lui a permis d'arriver au pouvoir, le premier ministre sortant, Peter Pellerini, a, tout de même, tenu à préciser que «ce n'est pas assez pour gouverner» ouvrant, par-là, la voie à une éventuelle cohabitation. «Pas question. On ne négocie pas avec la mafia» a, immédiatement, répondu Igor Matovic. Alors, attendons pour voir…