Il est toujours heureux d'aller à la rencontre de l'écriture lorsqu'elle nous faire le voyage vers les hauteurs, ce qui fait partie de cette transcendance tant recherchée. Les hauteurs, au propre comme au figuré. Le sens propre est offert pour l'appréciation par l'organisation d'une rencontre autour de l'œuvre de Loubaba Laalej, artiste peintre et poétesse dans l'enceinte de la ville d'Imouzzer. Et ce grâce à l'association Imouzzer Kandar porte de l'Atlas et le forum international des arts plastiques. Avec du peu ils ont fait beaucoup, les membres de ces deux instances, professeurs et chercheurs. Et tout cela afin de servir l'autre sens, le figuré. C'est aux cimes atlasiques et grâce à la célébration de la création. À travers un livre et une auteure. Cette dame dont l'auteur de ces lignes a eu l'honneur de saluer la verve créatrice dans le domaine des arts plastiques dans un autre lieu mythique de notre Maroc, Essaouira, via une exposition qui portait l'écriture oh combien suggestive de «Emergences fantastiques». Et émergence, il en est question ici, mais autrement que par l'art de peindre, à travers la publication de son recueil de poèmes, «Fragments», que l'auteure qualifie de méditations. Des méditations où le temps et l'espace deviennent un, dans l'étendue d'une phrase/rime, d'un poème érigé à la hauteur d'un texte entier, d'un ensemble, d'un tout qui se contient dans la partie. Et ce n'est pas chose offerte au détours d'une réflexion, mais d'une méditation qui engrange l'âme dans les cimes de la spiritualité tout en demeurant les pieds collés au réel, c'est-à-dire à l'existence. Et lorsqu'on pense à ce dernier mot, on pense à la relation de l'homme à lui-même, à l'autre et son monde quand il est confronté à l'ultime, à la finalité, à l'effarement devant le plein et le néant, source d'émotions singulières et fortes d'impact sur le vécu dont ne demeure que la trace écrite, gage de témoignage au vif comme de l'éternité. Tout au long de ces poèmes qui ne sont pas des instantanés, comme pourrait le suggérer le titre «fragments», mais des empreintes de passage, comme dans la pierre, puisqu'il s'agit d'une expérience intérieure vécue par l'artiste peintre et poétesse et néanmoins femme (sans que cela impacte l'acte de l'écriture en elle-même), à la sensibilité à fleur de peau toujours relayée par le désir de créer.Donc tout au long de ce recueil, un mot fait face, si présent et si impérieux: le voile. Tout le monde sait ce que mot a d'actuel d'un côté, et de profond d'un autre. C'est selon le contexte où on le fonctionnalise. Loubaba Laalej semble lever un voile, non pas pour montrer ce qui est derrière, caché, mais pour nous faire découvrir ce qu'on pourrait voir autrement. Comme dans sa peinture, elle nous fait introduire dans un univers de l'empreinte en maille avec les cimes dans l'espoir d'embrasser le spirituel qui part de l'individuel vers l'universel. Elle part des moindres signes tels le nom propre, la relation avec les proches, ou du désir, du rêve, du quotidien, pour arriver à réaliser l'entendement lié à l'élévation, autrement dit au poétique. Ce poétique qui est quête de soi dans l'errance du mot qui s'élève majestueux des fonds de ces poèmes où le «moi» de la poétesse est en prise avec les pérégrinations multiples : dedans et ailleurs, dans le rêve comme dans le souvenir. À Imouzzer Kandar, cette poésie s'est vue vivre une deuxième vie, et la création un autre étalement bienheureux, et il n'est que reconnaissance méritée que de discerner un titre signé dehonoris causas à l'artiste et poétesse.