La détérioration de la situation économique et financière du Pakistan, caractérisée notamment par la dévaluation de la roupie qui a perdu un tiers de sa valeur, une très faible croissance qui plafonne à 3% et une inflation qui a atteint 8%, a eu raison de la popularité d'Imran Khan, ancien champion de cricket devenu Premier ministre en Juillet 2018. Considérant que celui-ci avait été «sélectionné», de manière frauduleuse, par la puissante armée pakistanaise, c'est toute la classe politique du pays qui, aujourd'hui, exige son départ sans conditions. Autant dire qu'il s'agit-là d'un très sérieux revers pour cet homme à qui l'on reproche des propos contradictoires dès lors que bien que se disant «fasciné par le modèle scandinave», il «dénonce le féminisme occidental» et qu'il tient «des propos très laïcs» alors même qu'il lui arrive, parfois, de se rapprocher « des leaders religieux». Ainsi, après être partie le 27 Octobre dernier de Karachi et Peshawar, les plus grandes villes du pays, à l'initiative de Fazlur Rehman, le chef de «Jamiat Ulema-e-Islami-Fazal» (JUI-F), le plus grand parti islamiste du pays, une marche dite «Azadi» (marche de la liberté) et regroupant plusieurs milliers de manifestants est arrivée à la capitale, Islamabad, le 31 Octobre. Surnommé «Maulana» (le maître), coiffé d'un turban, portant une longue barbe blanche et soutenu par les principaux partis d'opposition, le dirigeant islamiste qui n'est pas un nouveau venu en politique puisqu'il avait déjà collaboré pendant dix ans avec l'ancienne Première ministre Benazir Bhutto a exigé qu'Imran Khan se dessaisisse du pouvoir au plus tard le 3 novembre avant de prolonger cet ultimatum de 24 heures – soit jusqu'à lundi – en déclarant devant des milliers de partisans : «Nous devons libérer le peuple de ce régime. La caravane ne s'arrêtera pas tant qu'elle n'aura pas atteint son but». Fazlur Rehman ayant menacé d'aller chercher le Premier ministre dans sa résidence alors même que ce dernier, parti passer quatre jours en Chine avec l'espoir de ramener une aide financière pour soulager les très précaires finances du pays, ne devait rentrer que lundi, les mesures de sécurité ont été renforcées autour de la zone qui abrite les bâtiments de la présidence, du gouvernement, du Parlement et des ambassades étrangères. Et si, par ailleurs, les écoles sont fermées et que d'importants embouteillages paralysent la capitale, ce sont 17.000 agents des forces de l'ordre qui ont été mobilisés pour faire face à tout débordement. Enfin, au vu de l'ampleur du mouvement de contestation et, surtout, de la détermination affichée par l'ensemble de la classe politique pakistanaise et par ces dizaines de milliers de manifestants qui investissent en masse les rues de la capitale bien décidés à en découdre une fois pour toutes avec Imran Khan, il semble bien que le glas a bel et bien sonné pour l'ancien champion de cricket et que ce dernier va devoir quitter, sans délais, les bureaux de la Primature. Alors, attendons pour voir…