Vouloir faire croire aux Algériens et à la communauté internationale qu'après avoir été victime de cet accident vasculaire cérébral qui, depuis 2012, l'a tellement affaibli qu'il l'empêche de marcher et de s'exprimer en public, le président Abdelaziz Bouteflika, aujourd'hui âgé de 81 ans, entendrait briguer un cinquième mandat est une flagrante méprise et un ineffable manque de respect envers un pays dont la jeunesse, qui constitue 45% de la population et qui est laminée par un profond «mal-être économique et social» et une absence totale d'avenir, a hâte d'entrer de plain-pied dans ce 21ème siècle qu'elle regarde de loin. Mais cette jeunesse algérienne qui ne connaît que le même homme et la même équipe au sommet de l'Etat n'est pas la seule à contester la fossilisation du pouvoir algérien. Même ses parents et ainés qui, après le traumatisme de la terrible guerre civile qu'avait vécu le pays dans les années 1990, s'étaient résignés à accepter que l'on prenne les mêmes et que l'on recommence, n'en peuvent plus et estiment que cette cinquième candidature du vieux Bouteflika est vraiment la goutte qui va incontestablement faire déborder un vase déjà plein. Plus personne dans le pays, n'admet, en effet, que, plus de cinq décennies après l'indépendance, le pays soit encore entre les mains des fossiles du FLN. Raison pour laquelle ce 22 février, alors que la capitale algérienne baignait sous un beau soleil printanier, les algérois, répondant comme un seul homme aux appels à manifester, lancés sur les réseaux sociaux, n'ont pas pris la direction de leurs domiciles après la prière du vendredi mais plutôt celle du centre-ville pour dénoncer la candidature du vieux chef de l'Etat; ce qui, en soi, est très étonnant dans la mesure où une telle «convocation» ne pouvaient que susciter méfiance et crainte de la part d'une population ayant vécu sous le régime de l'état d'urgence durant près d'une décennie. Or, rien n'y fit et c'est en masse que les algérois sont descendus dans la rue pour dire «Non au 5ème mandat de Bouteflika» rappelant, par-là, ces grandes émeutes historiques de 1988 qui avaient ouvert la voie au multipartisme. Débordée par l'ampleur et la spontanéité de la manifestation, la police a laissé faire même quand les contestataires s'en sont violemment pris à un portrait du président. Est-ce à dire qu'une fissure serait en train d'apparaître au sein même du régime ? Rien n'interdit de le supposer. Mais si, cette fois-ci, les manifestants ont clairement fait savoir leur opposition totale à une nouvelle candidature du Président Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1990 et dont un accident vasculaire cérébral a affecté l'élocution et la mobilité, ils n'ont pas dit, toutefois, ce qu'ils veulent et aucun parti d'opposition n'a essayé de profiter de l'exaspération des contestataires pour se mettre en avant alors même que, ce vendredi, l'occasion lui était offerte. Aussi si, à deux mois des élections présidentielles algériennes, ces évènements «changent la donne politiquement» quant au renouvellement du mandat d'Abdelaziz Bouteflika, comme le souligne Louisa Dris-Ait Hamadouche, professeur de Sciences politiques à l'Université d'Alger, l'absence flagrante des partis d'opposition et, par voie de conséquence, de tout encadrement de la population lors de l'importante manifestation de ce vendredi, pousse les observateurs à émettre des réserves quant à la poursuite de cette mobilisation mais attendons pour voir…