Quand les élections, qui sont une des expressions les plus nobles de la démocratie, donnent lieu à des violences, c'est que quelque chose ne tourne pas rond donc que ça va mal dans le pays. C'est ce à quoi nous assistons depuis vendredi dernier au Kénya après l'annonce de la victoire du président sortant Uhuru Kenyatta avec 54% des voix contre 44% pour Raila Odinga; des résultats contestés par la coalition d'opposition Nasa qui, en dénonçant une falsification des résultats du fait d'une manipulation électronique du système de transmission et de décompte des voix par la commission électorale censée prévenir toutes irrégularités a attisé la colère de ses partisans. Ainsi, durant le dernier week-end, les échauffourées qui ont éclaté entre les partisans des deux candidats en course pour la présidence de la république kényane ont laissé sur le bitume au moins vingt-quatre morts selon la Kenya National Commission on Human Rights (KNCHR); ce qui a poussé le Secrétaire Général de l'O.N.U. Antonio Guterres à demander à Raila Odinga, le candidat malheureux, d'adresser «un message clair à ses partisans afin qu'ils s'abstiennent de recourir à la violence». Mais ce dernier, qui ne l'entend pas de cette oreille et qui ne reconnait pas la victoire de son rival, a demandé ce dimanche à ses partisans – regroupés dans l'un des plus grands bidonvilles de Nairobi – de «ne pas aller travailler lundi» et d'attendre ses instructions quant à la «marche à suivre» avant d'ajouter «nous avions prévu qu'ils voleraient l'élection et commenceraient à tuer des innocents; c'est ce qu'ils ont fait». Mais quelque soit l'ampleur des violences post-électorales, nous sommes encore très loin cette fois-ci de la situation qui avait prévalue à l'issue des précédentes élections présidentielles où 1.200 morts avaient été tuées et quelques 600.000 autres blessées dans l'ensemble du pays puisque, pour l'heure, la violence reste cantonnée à quelques quartiers de la capitale notamment et que la majorité de la population n'adhère pas aux accusations portées par l'opposition à l'encontre d'un scrutin – transparent aux yeux des observateurs internationaux – auquel 78% des électeurs inscrits ont participé avec enthousiasme. Enfin, contrairement au précédent scrutin présidentiel et bien que, pour l'opposition, «Uhuru Kenyatta ne dispose(rait) d'aucun mandat pour être le président du Kenya », les perdants n'entendent pas, cette fois-ci, saisir une Cour Suprême qui ne serait pas prompte à invalider les résultats.